A Reims, Marne, deux opérations de fouilles de sauvetage ont été réalisées, en 1999 et 2000.

Dernière modification
10 mai 2016

La première opération, en 1999, portait sur une voie romaine bordées de chemins creux, probablement utilisée jusqu'au Moyen Âge ; l'autre, en 2000, a permis d'étudier un cimetière médiéval.
 

 

Une voie antique fréquentée jusqu'à l'époque médiévale

La voie découverte sur le site vient dans le prolongement du decumanus maximus (rue gallo-romaine qui traverse la ville d'est en ouest) et permettait de sortir de la ville vers le sud-ouest. Il s'agit probablement d'une voie qui permettait de relier Reims à Dormans, et non le tronçon de la « voie militaire » Trèves-Reims-Soissons, comme certaines hypothèses le proposaient.
La largeur de cet axe n'a pas été complètement dégagée, mais elle est proche de 10 m, ce qui, malgré son statut de voie « secondaire », la place toutefois parmi les plus importantes. Il est fréquemment admis que les ingénieurs romains ont assis leurs routes sur un agger (surélévation de terrain) permettant un drainage parfait... Généralement l'agger s'élève d'environ 1 m au-dessus du terrain adjacent ; y sont employés, autant que possible, les matériaux locaux.
Ici, la chaussée se trouve légèrement en agger, non pas en raison d'un apport de matériaux sous l'empierrement, mais à cause d'un creusement latéral, qui a été relevé côté sud. Il s'agit d'un chemin creux au fond duquel ont été mises au jour deux ornières empierrées, témoins d'une circulation. Des fragments de bois recueillis au fond de ces ornières, et dont une datation par radiocarbone a été réalisée, attestent que le chemin était encore présent dans le paysage au VIIe siècle. Une détermination des essences indique la présence de chêne, hêtre et fruitier à noyau.

Une nécropole médiévale

La fouille a permis l'exploration d'un ensemble de tombes et de réductions représentant en tout 157 individus. Cette nécropole était située à 500 m de l'une des portes sud de la ville de Reims. Sa période de fonctionnement, du moins en ce qui concerne la partie connue, s'étend du VIIIe siècle jusqu'à la fin du XIIIe siècle.
L'étude biologique a permis de mettre en évidence une forte proportion d'hommes jeunes présentant de nombreuses pathologies. Ce lieu d'inhumation avait d'abord été pressenti comme celui de la léproserie Saint-Ladre, fondée au XIIe siècle. Toutefois, la localisation de la léproserie indiquée par les textes et les plans anciens ne correspond pas, tout comme les datations obtenues par le radiocarbone. De plus, les pathologies recensées ne laissent aucunement transparaître des traces de lèpre. Il demeure cependant possible qu'il s'agisse des membres valides d'une léproserie, qui pouvaient avoir et gérer leur propre cimetière. On comprend difficilement pourquoi son organisation ne respecte pas les tombes les plus anciennes. On ne peut pas non plus parler de sépultures bâcléés : les sujets étaient vraisemblablement déposés dans des fosses anthropomorphes, ou des coffres, toujours orientés. Certes les cimetières médiévaux montrent, à partir du XIIIe siècle, un désintérêt relatif pour la conservation des sépultures à longue échéance, mais l'attitude constatée dans le cimetière de la rue Martin-Peller date d'une période antérieure. Faut-il alors y voir une absence d'esprit communautaire ? Dans cette perspective, le lieu d'inhumation découvert serait celui de pauvres, d'étrangers, de personnes n'appartenant pas ou plus aux paroisses intra-muros, bref d'exclus et de marginaux. La précarité des liens familiaux peut expliquer qu'il n'y ait pas eu la continuité d'une gestion intergénérationnelle du lieu de sépulture, et que l'entretien des tombes et de leur signalisation ait été délaissé. La population de cette nécropole peut donc être celle soit d'un hôtel-Dieu, soit d'un de ces cimetières « de pauvres » que l'on commence à identifier aux abords des villes, dans des faubourgs en devenir. Leur abandon derniers peut être consécutif la création d'autres cimetières dépendant directement d'un tramage paroissial plus clairement défini, où les lieux d'inhumation sont le plus souvent proches d'une chapelle ou d'une église.