A Reims, Marne, le chantier de la rue de Contrai a permis d'éclairer un peu plus nos connaissances sur la ville antique de Durocortorum, depuis ses origines protohistorique jusqu'au début du Ve siècle en particulier.

Dernière modification
10 mai 2016

Les vestiges de l'oppidum, même s'ils sont limités au départ du creusement du fossé et à une partie de la levée de terre, nous ont permis, d'une part, de compléter le tracé de cette fortification monumentale de près de 50 m de large et, d'autre part, de confirmer que le fossé a été remblayé, dans ce secteur, à la fin du Ier siècle de notre ère (on ignore toutefois la datation de sa mise en place). 

Le destin du fossé gaulois

La fouille a mis en évidence la réutilisation des matériaux de la levée de terre. D'abord par des chaufourniers, dans le courant du Ier siècle de notre ère, qui ont cuit la craie dans un four de plus de 21 m3. Ce four, le premier de ce type mis au jour à Reims, est construit directement sur l'escarpe du fossé. Ainsi l'espace de chargement se trouve au niveau des matériaux et l'aire de chauffe est aménagée a l'abri des vents dans le fossé. Après la dernière cuisson, le four a été nettoyé pour permettre un chargement qui n'eut jamais lieu. Les chaufourniers ont interrompu leur travail, le four a été comblé et un espace de circulation a été aménagé à son emplacement. Si des traces d'ornières ont été mises au jour à la surface de cet aménagement, il ne s'agit aucunement d'une rue à proprement parler. L'hypothèse d'un chemin emprunté par les artisans qui continuaient probablement à exploiter la craie du rempart gaulois semble plus probable.
Aucune structure importante n'a jamais été installée dans la zone concernée par la fouille. Pendant au moins deux siècles, des véhicules ont circulé sur ce chemin entre la levée de craie et le cardo maximus, éloigné d'une cinquantaine de mètres seulement. À la fin du IIIe siècle, la nécessité de trouver toujours plus de matériaux de construction a entraîné l'exploitation de la craie géologique.

La ville rétrécie de l'Antiquité tardive

Après quatre siècles d'occupation urbaine, le tracé de l'enceinte de l'Antiquité tardive rejette à l'extérieur de la ville enclose cette zone auparavant située à la limite sud de l'enceinte gauloise. Un glacis (talus en pente) constitué de craie et de matériaux de démolition est aménagé devant le fossé. Il porte la largeur de l'enceinte à 75 m depuis le pied du mur (sous l'actuel collège Université, au nord de la rue de Contrai) jusqu'à l'avant du talus. La hauteur minimale de cet aménagement est de 3 mètres pour une largeur comprise entre 8 et 16 m. Le sud du talus est dorénavant extra-muros, et ce changement est perceptible à travers plusieurs éléments. D'abord, c'est la fin d'une occupation structurée comme elle l'était pour la période précédente. L'organisation de l'espace se fait parallèlement au talus. On y trouve à présent des vestiges correspondant à des rebuts qui n'avaient pas leur place en ville ; en particulier, des bouchers viennent déverser une grande quantité de fragments de carcasses découpées.
À la fin du IVe ou au début du Ve siècle, de nouvelles tombes sont installées au sud du talus. On ignore si ce phénomène résulte d'une coïncidence ou s'il s'agit d'une continuité par rapport aux premières tombes du début du IVe siècle. De plus, les individus ici enterrés le sont en dehors d'une des nécropoles péri-urbaines. Se pose alors la question de leur statut : individus allogènes (n'appartenant pas à la population autochtone) ou premiers chrétiens ?

Du Moyen Âge à la période contemporaine

Après un hiatus de plusieurs siècles, des constructions sont aménagées sur l'espace sépulcral. D'abord des caves ou des cabanes excavées datant du XIIIe siècle, puis, au XVIe siècle apparaissent les premières constructions en dur. Dans un premier temps, elles sont bâties en matériaux légers ou sur des fondations peu profondes, pour être remplacées, au milieu du XVIIe siècle par des constructions sur fondations en carreaux de craie. Les bâtiments de cette époque occupent plus densément l'espace et sont aussi les structures les mieux conservées sur le chantier. C'est dans ces maisons, probablement, que la première congrégation des frères de La Salle s'est installée au début du XVIIIe siècle. Au début du XIXe siècle, ils ont reconstruit les bâtiments de l'école, plus tard détruits par les bombardements de 1914.