A Besançon, Doubs, Le 85 bis, rue Battant était concerné par la construction d'un ensemble de logements. La première cour côté rue Battant serait conservée, tandis que l'arrière de la parcelle, longée par la rue du Fort Griffon, serait occupé par les nouveaux bâtiments d'habitation, un parking souterrain, un jardin et une rampe d'accès pour véhicules.

Dernière modification
14 janvier 2019

L'emprise concernée par la fouille représentait une surface totale de 1 423 m2, dont les contraintes principales étaient l'étroitesse de la parcelle (70 m de long sur 20 m de large), l'épaisseur de la stratigraphie (jusqu'à 4 m), et surtout un fort dénivelé (10 m).  


Malgré un contexte topographique contraignant, l'opération archéologique menée a permis de mettre en évidence des éléments complétant la connaissance de ce quartier.

Pour la première fois, une zone de production de matériaux de construction a pu être en partie observée dans la ville antique. Cette activité se traduit dès le début du Ier siècle de notre ère par l'exploitation d'une carrière d'extraction de moellons calcaires, caractérisée par la présence de fronts de taille (paroi rocheuse verticale marquant l'extrémité d'une carrière en cours d'exploitation), de sols de carrière (surface rocheuse horizontale marquant la limite inférieure de la carrière en cours d'exploitation), de murs d'ateliers de carriers ou de murets retenant des remblais constitués de hagues (déchets de taille).

Progression chrono-spatiale des activités

Puis, entre le milieu du Ier siècle et la première moitié du IIe siècle, cette activité prend une nouvelle forme avec la fabrication de chaux, marquée par les traces d'un bâtiment en appentis et d'une aire de travail aux sols réalisés à partir de matériaux de rejets et démantèlement de fours. Il est intéressant de mettre en relation cette évolution avec celle observée lors des fouilles de l'hospice Bellevaux, place Bacchus : des fours à chaux précoces sont en effet présents sur ce site au début Ier siècle, alors que, au nord-ouest, la carrière du 85 rue Battant est en exploitation. Par la suite, l'installation de la domus à Bellevaux, et peut-être la construction d'une frange de bâtiment sur la bordure nord de la rue antique, marquent sans doute le recul de la zone de production de chaux à l'arrière de la parcelle du 85 rue Battant, la zone d'extraction s'en trouvant quant à elle soit désaffectée, soit rejetée encore plus loin. Il semblerait donc que la limite de construction urbaine progresse vers le nord-ouest entre le Ier et le IIe siècle, faisant ainsi reculer la « frange » d'espaces ouverts dévolus aux activités artisanales liées à la construction.

Ruptures et continuités

La fonction de ce secteur change nettement dès la première moitié du IIe siècle. Aux activités artisanales succède une mise en végétation (cultures vivrières, jardins ou enclos) structurée par la construction de murets de terrasses en pierres sèches, puis de murs de clôtures, ce qui pourrait indiquer que le secteur se trouve alors en bordure de la zone urbanisée.
Entre ces jardins qui constituent la dernière occupation antique et la première occupation médiévale au XIIIe siècle, précédant la mise en place d'un nouveau lotissement du secteur, aucune trace d'activité humaine n'a été observée.
Au XVe siècle, une cave semi-enterrée, de plan allongé, révélatrice d'un parcellaire médiéval en lanière, est installée dans la partie sud de l'emprise.
La parcelle est profondément remaniée au début du XVIIe siècle par la construction de l'« Auberge du Mouton blanc », dont les bâtiments et les jardins sont encore en partie visibles de nos jours malgré la destruction partielle récente.
À noter enfin que le relief important généré par le front de taille de la carrière au début du Ier siècle reste encore décelable aujourd'hui, et que cette topographie particulière a continué de déterminer jusqu'à nos jours toute l'organisation du parcellaire et de l'urbanisme du quartier.