La fouille de Saint-Pastour Nord à Vergèze fait suite à trois diagnostics réalisés en 2011, 2013 et 2014 sur un tronçon du tracé de la LGV et sur une zone contigüe. 

Dernière modification
23 août 2017

De nombreux vestiges archéologiques ont alors été détectés, permettant de distinguer plusieurs phases d’occupation humaine entre le Néolithique et le Moyen Âge.  

Au total, six zones ont fait l’objet d’un décapage archéologique représentant une surface totale de fouille d’un peu plus de trois hectares.

Un ensemble funéraire exceptionnel du Néolithique

L’occupation la plus ancienne remonte au Néolithique moyen (4500 ans avant notre ère). Matérialisée par un ensemble de silos, un puits et deux dépôts de restes fauniques évoquant des repas collectifs, elle concerne un pôle à vocation agricole. À la fin du Néolithique moyen ou au début du Néolithique final (3600 à 3000 ans avant notre ère), un ensemble monumental exceptionnel se met en place. Trois enclos ovoïdes qui accueillaient chacun une sépulture en coffre sont construits à proximité d’un autre vaste enclos ovoïde entourant un alignement de stèles. 

Les trois plus petits enclos (entre 17 m et de 24 m de diamètre) présentent un plan similaire et une ouverture vers l’ouest. Deux ont pu être fouillés dans l’emprise décapée et ont livré en leur centre les restes des constructions des chambres funéraires. Il s’agit probablement de coffre fait de dalles en pierre destinés à accueillir le défunt...

Le plus énigmatique et le plus grand des enclos (50 m de diamètre) a d’abord enserré un alignement d’au moins 5 stèles orienté est-ouest. Ce type d’alignement est bien connu au Néolithique mais aucun n’avait été découvert entouré un vaste fossé. C’est dans un second temps que ce monument va être réinvesti et très largement transformé pour abriter une sépulture collective mégalithique probablement insérée dans un tumulus. Ce dernier construit en pierres et en terre recouvrait l’allée couverte nouvellement édifiée pour accueillir tous ou une partie des défunts de la communauté (voir la notice de découverte remarquable sur le monument funéraire du Néolithique).

En plus de cet ensemble monumental, d’autres vestiges du Néolithique ont été découverts dans les différentes zones. Une petite chambre funéraire en tout point comparable à celle de Cabrials à Béziers, datée du Néolithique final, a notamment été mise au jour. Elle pourrait constituer le maillon intermédiaire entre les deux phases d’aménagement du monument.

Un habitat du début de l’âge du Fer

Le secteur ne semble pas avoir été occupé au cours de la période suivante. Il faut attendre la phase de transition entre la fin de l’âge du Bronze et le début de l’âge du Fer pour enregistrer le retour d’un petit groupe humain. 

Sur l’ensemble des surfaces fouillées, les archéologues ont découvert deux pôles d’habitat. Ceux-ci étaient matérialisés par au moins un bâtiment dont seules les fosses d’implantation des poteaux étaient conservées, une fosse d’extraction de matériau destinée à construire les murs des maisons, un puits ainsi que différentes fosses ayant servi de dépotoirs. L’analyse des nombreux fragments de céramique modelée retrouvés ainsi que des restes de consommation apportera de précieuses informations sur ce type d’occupation dans les plaines languedociennes, qui n’a jusqu’à présent jamais fait l’objet d’investigations poussées. 

De riches sépultures gauloises et romaines

Près de 500 ans plus tard, une nouvelle occupation se manifeste à travers un réseau de chemins et de fossés parcellaires qui organisent et structurent les campagnes, de la fin de la période gauloise jusqu’à la période romaine. C’est au sein de ce paysage que deux ensembles funéraires ont été mis au jour. 

Le premier compte quatre sépultures datées entre le milieu du IIIe siècle et le Ier siècle avant notre ère. La plus ancienne est  très étonnante, puisque le dépôt sépulcral (les restes incinérés du défunt) prend place dans une amphore gréco-italique installée verticalement dans une fosse étroite. Une autre sépulture, remarquable également, possède une amphore italique complète déposée dans une grande fosse quadrangulaire avec de nombreux vases et les armes du défunt. Cet ensemble, à l’image de ceux découverts au sud de l’agglomération nîmoise, signale probablement des tombes de personnes au rang social élevé, peut-être issues de la population des oppidums du Cailar ou d’Ambrussum tout proche (voir la notice de  découverte remarquable sur les sépultures gauloises).

Le second ensemble se compose d’une dizaine de sépultures d’époque romaine (Ier-IIe siècle de notre ère), pour lesquelles on observe la pratique à la fois de la crémation et l’inhumation des corps. Certaines pourraient être des caveaux « familiaux » abritant plusieurs individus. L’implantation de ces sépultures dans les limites des champs ainsi que les offrandes qui y ont été déposées offrent des éléments de réflexion pour tenter de préciser l’identité de ce groupe humain dans la société romaine : paysans libres ou esclaves d’un domaine ?

Une aire d’ensilage du haut Moyen Âge

À la fin de l’Antiquité et surtout au haut Moyen Âge, une petite communauté villageoise est installée sous et aux abords de l’actuel Mas de Saint-Pastour.

Sur l’emprise de la fouille, seule une vaste aire d’ensilage, comptant près de 600 silos, quelques fossés ainsi qu’un puits, matérialisent les réserves et les pratiques agricoles de cette communauté.  L’aire d’ensilage est située pour l’essentiel dans le grand enclos néolithique. L’endroit était peu propice à une mise en culture et les habitants l’ont probablement choisi parce qu’ils pouvaient aisément récupérer les matériaux, notamment les grandes dalles de la couverture tumulaire pour fabriquer les bouchons de leurs silos. 

Le plan de l’aire d’ensilage montre l’existence de subdivisions internes : les alignements de structures dessinent des parcelles quadrangulaires et des bandes de terrain sans silos ou presque, que l’on interprète comme des cheminements. Les profils des fosses sont systématiquement de forme tronconique, à l’exception d’un silo creusé à partir du fond d’un autre, peut-être pour servir de cachette. Le volume de chaque silo est en cours de calcul et renseignera sur la capacité totale de stockage de l’aire.

L’étude de l’ensemble des mobiliers et des déchets de consommation permettra de préciser les différentes activités réalisées sur le site, ainsi que le niveau de production et de consommation de la population.

Pour compléter la connaissance de cet habitat, des prospections géophysiques ont été réalisées dans les parcelles situées entre la fouille et le Mas de Saint-Pastour. Une enquête menée dans les archives devrait quant à elle conduire à une meilleure perception de la nature des lieux à la fin du Moyen Âge et à l’époque moderne.