A Fréjus, Var, l'opération archéologique, basée sur les sondages réalisés en 2004, est menée dans le cadre d'une collaboration entre le service du patrimoine de la ville de Fréjus et l'Inrap.

Dernière modification
25 janvier 2024

La fouille s'est orientée dans trois directions complémentaires : les secteurs où une stratigraphie était préservée afin de dater et qualifier l'édifice, les zones recelant des informations sur la façade extérieure disparue, et enfin les structures dégagées anciennement mais peu documentées (loge, podium, galerie de service, etc.).

Un tiers environ de la surface totale de l'édifice et de ses abords a été fouillé, soit environ 5 000 m2. Ces travaux ont concerné la piste, le côté nord-est de la cavea et le contact avec l'enceinte urbaine et l'entrée sud-est.


Dans le cadre du plan Patrimoine antique, lancé à l'initiative de la région et mené par l'architecte en chef des Monuments Historiques, Francesco Flavigny, un projet de restauration et de mise en valeur de l'amphithéâtre de Fréjus, comportant également la réhabilitation de la fonction de lieu de spectacle est actuellement à l'étude. Ce projet a offert l'opportunité de développer un programme de fouilles archéologiques visant à répondre aux questions non résolues concernant l'histoire et le fonctionnement du monument, comme à celles plus spécifiquement soulevées par le projet architectural en cours. Classé dès 1840, l'amphithéâtre avait fait l'objet de recherches depuis le XIXe s., mais restait en attente d'une étude globale. Une campagne de relevé topographique de l'édifice et de ses abords a été menée, permettant la réalisation du plan complet et précis qui faisait jusqu'à présent défaut.

L'amphithéâtre est construit au sud-ouest du plateau qui forme l'assiette topographique de la ville, immédiatement à l'extérieur de l'enceinte, distante de moins de 4 m. Il se développe sur un plan elliptique orienté nord-ouest/sud-est, et mesure 112,75 m suivant son grand axe et 82,65 m suivant le petit axe. L'édifice n'est pas construit avant la fin du  Ier s. de notre ère. L'abandon, sensible dès la fin du IIIe s., se confirme dans le siècle suivant par l'exploitation des matériaux calcaires (marbres et calcaires importés) pour la fabrication de la chaux, puis par la récupération des blocs du grand appareil. La fouille a révélé l'existence de niveaux antérieurs à la construction auxquels se rattache en particulier une série d'aménagements d'un secteur humide en partie sud-ouest et une portion d'enceinte urbaine au nord-est. L'amphithéâtre est construit en maçonnerie de blocage parementée en petit appareil pour l'essentiel des structures, limitant le recours au grand appareil aux éléments les plus visibles.

Ces blocs ont pratiquement tous été récupérés. Ainsi de la façade extérieure ne subsistent que ses fondations et quelques blocs piégés dans les remblais tardifs. Elle était rythmée par des piliers soutenant des arcades et dotée de consoles permettant l'ancrage des mâts du velum, dont plusieurs exemplaires ont été retrouvés. L'entrée principale, orientée vers la ville, était marquée en façade par deux pilastres de dimensions doubles. Du côté de la piste, l'accès passe sous un arc en grand appareil qui n'apparaît plus que sous forme de négatifs de piliers. L'étude de l'origine des matériaux et des modes de construction permet de préciser les approvisionnements et les techniques mises en oeuvre sur le chantier et d'en suivre en partie le déroulement.

La piste est parcourue sur le grand axe par une galerie axiale souterraine longue de 54 m, dotée de plusieurs diverticules dont l'un se raccorde avec le petit axe sud. Le plan de cette galerie, en partie creusée dans le rocher, est à présent connu dans sa totalité. Le mur du podium est doté d'un ressaut portant les traces d'encastrement des plaques de marbre de Carrare qui le revêtaient à l'origine, et dont des fragments ont été retrouvé dans les niveaux d'abandon. Au nord, les gradins appuyés sur la pente rocheuse ont disparu mais, en partie médiane de la première section de gradins, les substructures de la tribune d'honneur (pulvinar) restent lisibles. Cette loge bénéficie d'un accès particulier sur le petit axe nord. Cependant les communications existantes entre la piste et la loge permettent d'imaginer en partie le rituel inaugural lié au spectacle. Les cheminements vers la première section de gradins réservés à l'élite sont isolés de ceux menant aux sections hautes dévolues au peuple. La mise en évidence de pièces fermées situées de part et d'autre de l'entrée principale, dotées de portes et pour l'une d'entre elles d'un couloir d'accès très étroit débouchant sur la piste, incite à conférer à ces espaces une fonction de coulisse ou de ménagerie.

La fouille n'a pas révélé l'existence d'un système d'évacuation des eaux de ruissellement cohérent comme sur d'autres édifices. En revanche, entre l'enceinte et l'amphithéâtre, les caniveaux captant des eaux provenant de la ville contournent l'édifice par le nord.

L'intervention archéologique a permis de replacer le monument dans l'évolution urbaine et dans le contexte technique et économique local. Son fonctionnement est à présent mieux cerné et un certain nombre d'hypothèses anciennes ont pu être vérifiées ou au contraire infirmées. L'intervention sur cet édifice, connu anciennement et plusieurs fois étudié, s'est avérée porteuse de nombreuses informations restées jusqu'ici inexploitées.