À l'occasion des travaux de prolongement d'une ligne de métro à Marseille, une équipe d'archéologues de l'Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap) met actuellement au jour une partie d'un cimetière utilisé entre 1784 et 1905. Ce site offre une opportunité inédite de suivre l'évolution d'un cimetière, des pratiques funéraires et de la population inhumée de la veille de la Révolution française à la révolution industrielle.

Dernière modification
24 août 2017

L'évolution du cimetière

En 1784, un petit cimetière vient s'implanter sur un terrain situé dans la campagne au nord de Marseille, alors occupée par des domaines agricoles ou des bastides d'agrément appartenant à de riches propriétaires marseillais. Le cimetière primitif, visible sur le cadastre napoléonien, occupe une surface de 150 m² et se situe à une centaine de mètres au sud de l'église Notre-Dame de la Crotte.
Dès le milieu du XIXe siècle, le cimetière devient trop petit puisque ce secteur de la ville connaît un boom démographique dû au développement économique et industriel de Marseille : entre 1790 et 1890, la population passe de 100 000 à 300 000 habitants dont près d'un quart sont d'origine italienne. Le cimetière est agrandi par deux fois à partir de 1852. Il prend la forme d'un vaste enclos de
2 650 m² avec une entrée monumentale au sud, en bordure du chemin. Il restera en usage jusqu'en 1905 puis sera désaffecté en 1926.

Les vivants face à leurs morts

De profonds changements dans l'organisation et l'idéologie funéraires se déroulent entre la fin du XVIIIe siècle et le début du XXe siècle : les vieux cimetières urbains des siècles précédents sont peu à peu remplacés par de nouveaux enclos funéraires beaucoup plus vastes, à l'extérieur des villes, et pourvus de tombeaux et de monuments funéraires.
Dans le cimetière des Crottes, une certaine régularité est notable dans l'organisation des tombes qui sont placées au sein de rangées parallèles à partir des murs d'enceinte. Les sépultures les plus récentes correspondent à des tombeaux construits pourvus de pierres tombales et de crois en pierre, alors que les autres sont des simples cercueils en bois. De nouvelles tombes s'installent souvent sur les plus anciennes, obligeant les fossoyeurs à réinhumer les os des premiers occupants.
Les défunts sont le plus souvent enterrés habillés, comme en témoignent tissus, boutons, agrafes ou boucles. Quelques objets peuvent également leur être associés : bagues, bracelets, chapelets, médailles, monnaies...

Les morts, une histoire sociale

L'étude des squelettes permet d'appréhender l'évolution de la population inhumée et de ses conditions de vie : alimentation, activités quotidiennes, maladies, épidémies...
La fouille en cours a déjà livré une centaine de sujets représentés par des os en bon état de conservation. Hommes, femmes et enfants de tous âges sont présents dans des proportions comparables, les nouveau-nés et nourrissons étant regroupés dans des secteurs particuliers. Les os de certains sujets révèlent des conditions de vie difficiles : carences alimentaires, fractures, maladies infectieuses ou liées à l'âge, problèmes dentaires.
L'histoire nous apprend que la population du quartier des Crottes correspondant en grande partie à des familles italiennes de condition modeste venues travailler dans les nouveaux ports de la ville, les huileries ou les savonneries proches. Les recherches en archives permettront de connaître les identités et les métiers des défunts inhumés dans ce cimetière. Il sera alors particulièrement intéressant de comparer les textes aux découvertes archéologiques.
Aménagement : MPM
Contrôle scientifique : Service régional de l'Archéologie (Drac Paca)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Anne Richier, Inrap
Contact(s) :

Cécile Martinez
Chargée du développement culturel et de la communication
Inrap, direction interrégionale Méditerranée
06 87 01 62 86 - cecile.martinez [at] inrap.fr