A Nice, Alpes Maritimes, la fouille du Pont-vieux, préalable à la construction de la ligne 1 du tramway de Nice, couvre une superficie de 290 m².

Dernière modification
10 mai 2016

Elle a permis d'observer les vestiges médiévaux et modernes du seul ouvrage d'art permettant entre le XIIIe et le XIXe siècle de franchir le Paillon, fleuve côtier bordant au nord-ouest la ville.

La profondeur à atteindre -6 m- a nécessité un accompagnement technique important et l'installation d'un blindage pour permettre la réalisation de l'opération.
La tranchée de diagnostic, implantée judicieusement, avait permis de constater que les vestiges du Pont-Vieux étaient encore présents et conservés de façon remarquable. La fouille qui a suivit a eu entre autre comme objectifs de dater sa construction et de vérifier la présence de traces éventuelles d'un ouvrage d'art plus ancien.
Depuis le Moyen-âge la ville a progressivement empiété sur le lit du fleuve par la construction de plusieurs enceintes et digues visant à contenir l'impétuosité du cours d'eau, si bien que les vestiges découverts s'étendent du sud vers le nord suivant un ordre chronologique.

Le pont médiéval

Le pont médiéval grossièrement orienté nord-sud a été retrouvé dans la rue du Pont-Vieux sur une longueur de 10,50 mètres environ, à la limite du Vieux-Nice. Son élévation n'a pu être étudiée, des constructions postérieures étant venues s'accoler de part et d'autre. Par chance, une cassure dans la voûte de la première arche a permis de pouvoir clairement identifier l'ouvrage et de mieux observer son mode de construction. L'arche et les écoinçons sont en moellons de calcaire finement équarris, liés au mortier. Un important blocage de cailloux et galets pris dans un bain de mortier charge les reins de la voûte.
Le tablier du pont est conservé à son extrémité sud, sur une longueur de 1,50 m. Sa largeur est de 2,05 m. Il est constitué de dalles dont la surface est usée. La présence d'ornières profondes montre l'intense fréquentation de cet axe, un des principaux points d'entrée dans la ville.
L'ensemble de ces structures pourrait dater de la fin du Moyen Âge (XIVe-XVe s.).
Aucune trace de la fortification médiévale n'a été reconnue en fouille. L'étude en cours permettra peut-être d'y rattacher certaines maçonneries observées très partiellement.

Construction d'une nouvelle enceinte et d'un nouveau pont au XVIe siècle

Au début du XVIe siècle une nouvelle enceinte est construite. L'une des phases de (re)construction est datée par une inscription découverte in situ, de l'année 1516. Le pont médiéval est en partie détruit à cette occasion, au moins la deuxième arche, mais il est possible que les piles de l'ouvrage aient été conservées. Le pont découvert en fouille (déjà aperçu lors du diagnostic) est plus tardif et correspond certainement à la dernière des reconstructions attestées par les textes au milieu du XVIe siècle.
Les vestiges de la culée et du départ de la première arche en sont particulièrement bien conservés. L'élévation du tympan est faite de moellons en calcaire froid de dimensions variables, disposés en assises irrégulières et liés au mortier. Des fragments de tuiles servent de blocage. La première arche, construite en grande partie avec des briques, présente le profil d'un arc segmentaire à double rouleau et à un ressaut. Le parapet est, seul conservé, est constitué de trois assises de moellons équarris liés au mortier posés en assises régulières. Seule la face amont semble avoir été recouverte d'un enduit de surface. Postérieurement à sa construction son accès a été élargi par l'ajout de deux arcatures latérales raccrochant le pont à la courtine.

La construction du Bastion du Pont vers 1640

Au milieu du XVIIe siècle le bastion du Pont, construction indépendante situé plus au nord, est considérablement agrandi et vient englober l'extrémité du pont construit au siècle précédent pour mieux protéger ce point faible de la fortification (ce qui explique son excellent état de conservation). Pour conforter la construction et mieux résister aux fortes poussées engendrées par le Paillon, des murs de refend servant d'entretoises sont régulièrement disposés. La limite nord de la fouille correspond à l'avancée maximale du bastion dans le lit du fleuve. Le pont contemporain se trouve donc légèrement plus au nord et n'a pu être observé.

La reconstruction du bastion au début du XVIIIe siècle

Les structures les plus massives concernent sans aucun doute la reconstruction du Bastion du Pont dans la première moitié du XVIIIe siècle consécutive aux destructions ordonnées par Louis XIV en 1706. Un grand mur, d'une largeur supérieure à 2 mètres, marque la limite du bastion dans le lit du fleuve. Les murs de refend sont reconstruit mais d'une largeur supérieure aux précédents. La documentation iconographique nous permet de restituer pour cette époque la physionomie du bastion. Au débouché du pont deux rampes latérales permettant d'accéder au boulevard dit « des Bastions » aménagé sur les anciennes fortifications. L'accès direct à la ville se fait toujours par la Porte du Pont, passage voûté présentant un fort pendage vers la ville. De part et d'autre de ce passage deux espaces caladés ont été dégagées : une cave construite à la fin du XVIIIe siècle et une pièce dont l'accès se fait directement par la Porte du Pont au moyen d'un seuil en pierre de taille. Ces deux pièces sont encore visibles sur le cadastre napoléonien du XIXe siècle avant l'arasement définitif des structures et la création du Boulevard Jean Jaurès.