À Mouliets-et-Villemartin, Gironde, la mise en place d'une canalisation de gaz naturel traversant de part en part le village gaulois de Lacoste est à l'origine d'une importante fouille préventive.

Dernière modification
31 octobre 2017

L'absence de fortification et la quantité exceptionnelle de mobilier métallique découvert à cette occasion permettent dorénavant de placer Lacoste parmi les agglomérations artisanales d'Europe celtique les mieux documentées.

Le site de Lacoste occupe le replat légèrement surélevé d'une terrasse alluviale de la vallée de la Dordogne et s'étend sur une superficie d'environ 25 hectares, à moins de 2 kilomètres au sud de la rivière où est localisée une zone de franchissement. Découvert en 1954, ce site a fait l'objet de prospections systématiques, de sondages et de fouilles programmées qui ont non seulement permis de réunir un ensemble exceptionnel de mobilier archéologique daté entre le IVe siècle avant notre ère et le Ier siècle de notre ère, mais aussi de localiser la principale zone d'habitat ainsi qu'un vaste quartier de potiers.
 

Une fouille et des techniques adaptées

La fouille préventive a été réalisée entre août 2007 et mars 2008 sur une emprise linéaire de 7 000 m2, offrant la possibilité d'explorer le site d'une extrémité à l'autre. L'opération s'est tout d'abord déroulée en plein air, puis sous un vaste chapiteau de 100 m de long. Les constructions gauloises de terre et de bois n'ont pas laissé beaucoup de traces car le terrain est sableux et perméable. La présence, la nature et la position de différents types d'artefacts ont quand même permis l'interprétation des espaces et des structures domestiques ou artisanales exhumés. La principale technique de fouille a consisté à dégager soigneusement le mobilier archéologique abandonné sur les sols (céramiques, faune, métal), puis le tout a été photographié à la verticale pour être ensuite dessiné. Chaque objet particulier a été isolé et repéré dans l'espace ; près de 2 000 pièces, principalement métalliques, ont ainsi pu être individualisées.

Un monde d'artisans

Depuis sa découverte, le site de Lacoste a livré une multitude d'objets témoignant d'activités domestiques, artisanales, agricoles ou artistiques avec des objets de parure. La fouille préventive apporte une information capitale sur leur origine. En effet, nombre d'entre eux étaient fabriqués sur place, dans des quartiers spécialisés. Outre des amas de scories et des battitures , les forgerons ont laissé derrière eux une importante quantité d'objets en fer cassés, rompus lors de leur mise en forme - principalement des petites pièces comme des fibules - ainsi qu'un lingot de fer de type Currency bar.
 
La fouille a également permis d'étudier un espace voué à la fabrication d'objets métalliques à base de cuivre. Il s'agit d'une aire de travail formée d'un sol de terre battue sur lequel est apparue une zone de concentration de gouttelettes de bronze. À ces gouttelettes étaient associés de nombreux fragments de creusets (dont un complet), quelques barrettes de métal préformées, ainsi que des fragments de petites fibules vraisemblablement cassées en cours de fabrication. La manufacture de petits objets en bronze à Lacoste n'est pas une surprise. Les ramassages de surface ont depuis longtemps permis d'identifier la pratique de cet artisanat, notamment grâce à la découverte de certains objets caractéristiques, comme les entonnoirs de coulée  et des fragments de moule en terre cuite.

Parmi les objets de parure, ont été également découverts des fragments de perles et de bracelets en verre. Le verre gaulois, qui n'est pas soufflé mais filé, présente une extraordinaire gamme de bleus, de jaunes, de verts et de pourpres. À la centaine de fragments déjà recueillie sur le site depuis sa découverte s'ajoutent 28 nouvelles pièces qui font aujourd'hui de Lacoste l'un des sites les plus riches de Gaule pour ce type de parures. Leur fabrication in situ est probable, au même titre que celle des objets en fer et en bronze dorénavant bien attestée.