Une fouille archéologique menée au nord d'Autun dans le cadre d'un projet de logements sociaux, a révélé un îlot d'habitation antique. Les premiers états appartiennent au début du Ier siècle de notre ère, c'est-à-dire lors de la fondation de la ville. Autun est édifiée à l'initiative du premier empereur romain, Auguste (27 avant notre ère - 14 de notre ère), dont elle porte le nom, Augustodunum.

Dernière modification
10 mai 2016

Cadeau de Rome à un peuple allié de longue date, elle remplace la capitale gauloise des Éduens, l'oppidum de Bibracte situé sur le mont Beuvray. La ville d'Autun devient l'une des plus importantes de Gaule du nord, forte de son artisanat, de son rayonnement culturel et de sa position de capitale de cité. La fouille de cet ilôt permet de voir l'évolution d'une partie de la cité, à la fois quartier d'artisanat et lieu d'habitation. 

Pistillus, le coroplathe de Augustodunum

Pistillus, le coroplathe de Augustodunum
Entre le Ier et le IIIe siècle de notre ère, quantité de petites figurines sont produites et diffusées à travers la Gaule, voire au-delà.  Ces statuettes en terre blanche sont produites par moulage, à partir d'une argile très fine. Les deux faces, moulées séparément, sont collées à la barbotine puis cuites, avant d'être parfois peintes. En Gaule romaine, plusieurs ateliers ont fabriqué en masse ces images populaires, destinées à  une clientèle trop modeste pour acquérir des statuettes en bronze.
Ainsi, comme le rappelle en 1920 Camille Jullian dans son Histoire de la Gaule, sont parvenues jusqu'à nous les productions de : « Allusa à Bordeaux, connu pour ses Mères ; l'Armoricain Rextugénos, pour ses Vénus à la rigidité hiératique ; Sacrillos l'Arverne, de Toulon-sur-Allier, grand fournisseur de colombes ; et surtout l'Eduen Pistillus, qui passa maître dans le genre familial, remplissant toute la Gaule de Mères pouponnières, d'enfants au berceau, de lits domestiques, de chiens gardiens du foyer ».
On se doutait que Pistillus, avait été actif à Autun, autour de la fin du  IIe siècle et au début du III e siècle de notre ère. Sa production était largement diffusée dans l'ensemble de la Gaule, en direction de l'Atlantique (via Bourges, Poitiers, Nantes...) vers l'est et le nord ouest suivant la voie d'Agrippa. Elle a atteint aussi la Germanie supérieure, les provinces de Rhétie et du Norique (Mayence, Bavière, lac de Constance, Tyrol autrichien). La mise au jour par les archéologues de l'Inrap d'un four de potier, de moules, de figurines et de ratés de cuisson signés « Pistillus » confirme la présence de son officine à Autun. Pistillus se distingue des autres coroplathes (fabricants de figurines), par des statuettes soignées et des thèmes variés : déesses protectrices, Vénus, Abondance, animaux, mais aussi de aussi tendres représentations de l'intimité romaine comme Les amants de Bordeaux, découverts en 1850, où homme et femme échangent des caresses dans un lit de type romain, sous la protection d'un chien endormi.
Pour l'instant la fouille livre des figurines de Vénus, de déesses nourricières, sans révéler encore, d'autres oeuvres plus érotiques. « Qu'on ne se trompe pas d'ailleurs sur le mérite de Pistillus et de ses émules : ce sont de pauvres oeuvres que leurs figurines, faites pour de pauvres ménages, et qui s'en allaient remplir les boutiques à quelques as ou qu'étalaient les colporteurs aux heures de marché » (Camille Jullian).

Un quartier entre artisanat et belles demeures

Une activité métallurgique est également avérée sur le site : le travail du bronze est attesté par la présence de creusets pour la fonte, de fragments de moules et de tas (enclume) pour le façonnage de tôles, ainsi que par de nombreux déchets. Pour le fer, des fosses dépotoirs ont livré des éléments de tuyère (soufflet), de nombreuses scories, ainsi que des battitures qui montrent la présence de forges. Des déchets de coulées ont aussi été découverts, caractéristiques de la réduction du minerai de fer. Cette étape primaire dans la métallurgie du fer est extrêmement rare en contexte urbain.
En contrepoint, des salles à hypocauste (pièces chauffées par le sol) ont été exhumées. Quelques tesselles en pâte de verre et de nombreux fragments d'enduits peints trouvés dans les remblais de destruction témoignent des décors des habitations. Des installations liées à l'eau (puits, canalisation, réceptacle destiné à recueillir l'eau de pluie) se trouvent dans des cours intérieures. Un long tronçon de l'égout témoigne des aménagements créés lors de la fondation de la ville.
La fouille a également livré quelques marbres dont une tête janus, représentant Hermès et Pan (ou Dionysos), une plaque portant la dédicace d'un equites, membre de l'ordre équestre romain et tribun militaire de la XXIIe légion, jusque-là inconnu : Tiberius Claudius Potitus Sabinianus.
Aménagement : OPAC Saône et Loire
Contrôle scientifique : Service régional de l'archéologie (Drac Bourgogne)
Responsable scientifique : Stéphane Alix, Inrap
Contact(s) :

Mahaut Tyrrell
chargée de communication médias
Inrap, pôle partenariats et relations avec les médias
01 40 08 80 24
mahaut.tyrrell [at] inrap.fr

Astrid Chevolet
chargée de développement culturel et de communication
Inrap, Direction interrégionale Grand Est sud
06 86 28 61 71 - astrid.chevolet [at] inrap.fr