Le site de Burgweg Rechts a livré des vestiges appartenant à cinq périodes distinctes.

Dernière modification
10 mai 2016

Au sud-ouest de la zone de fouille , le Néolithique est représenté par un habitat ; l'âge du Bronze se révèle à travers une nécropole à incinération, et le premier âge du Fer, à travers deux tumuli (tertres funéraires) ; le second âge du Fer a été reconnu au sein d'une petite occupation domestique en limite nord du chantier ; enfin, l'époque romaine est présente avec une série de cinq enclos funéraires, à l'est de la fouille. La nécropole mise au jour à Eckwersheim constitue vraisemblablement la limite sud de la vaste nécropole des âges du Bronze et du Fer de la forêt de Brumath, connue depuis le XIXe siècle.  

Métallurgie néolithique

Au sud-ouest du site, une douzaine de fosses appartiennent à un habitat du Néolithique récent (3850-3600 avant notre ère). Deux fosses ont livré les vestiges d'une activité métallurgique, encore inédite à l'ouest du Rhin pour cette période. Cinq fragments de terre cuite semblent correspondre à un creuset dans lequel était fondu le métal. Une petite masse de cuivre constitue probablement le fragment d'un lingot de matière première en attente de mise en forme. Quelques paillettes du même métal ont également été mises au jour.

L'analyse chimique des différents éléments métalliques montre qu'ils proviennent des pré-Alpes autrichiennes. Au Néolithique récent, le cuivre extrait dans cette région devait circuler sous la forme de lingots vers des régions plus ou moins éloignées, pour ensuite y être fondu et transformé en objets finis. La découverte d'Eckwersheim fait de ce site le représentant le plus occidental de cette première tradition métallurgique, apparue dans le bassin des Carpates et dans les Balkans au milieu du Ve millénaire avant notre ère.

Les incinérations de l'âge du Bronze

Sur toute la partie orientale du chantier, la fouille a livré une nécropole à incinération de l'âge du Bronze (entre la fin du Bronze moyen et la première étape du Bronze final, soit vers 1400-1300 avant notre ère). La soixantaine de sépultures fouillées a révélé une grande diversité. Dans certaines tombes, l'ossuaire (ossements du défunt récupérés sur le bûcher après la crémation) est déposé dans un vase qui contient lui-même un mobilier d'accompagnement plus ou moins abondant ; d'autres tombes consistent en des dépôts en pleine terre, accompagnés de vases ou de mobilier métallique. Parmi l'ensemble des tombes, quelques-unes ont semble-t-il été couvertes d'un tertre de petite dimension.

Le mobilier métallique est abondant et varié. On compte de la parure (épingles, bracelets, chaînes de ceinture), ainsi que de l'armement (épée, couteaux). Quelques éléments de parure en or, en verre ou en ambre viennent compléter les vestiges.

Les tumuli aristocratiques du Hallstatt

À l'époque du premier âge du Fer, autour du VIIIe-VIe siècle avant notre ère, plusieurs tumuli sont installés sur les sépultures de l'âge du Bronze, les intégrant à leur masse. Ces monuments représentent, dans l'état actuel de nos connaissances, les aménagements les plus méridionaux de la nécropole tumulaire du sud de la forêt de Brumath.

Deux tertres encore visibles dans le paysage ont été fouillés. Le premier est édifié autour d'une tombe centrale ayant exceptionnellement livré une situle en bronze (récipient en forme de seau), dont l'origine pourrait être italique. Quelques tombes ont ensuite été installées dans le périmètre du tumulus.

Le second tumulus, situé au sud du précédent, est organisé autour d'une vaste chambre funéraire bâtie sur de puissants poteaux. Elle recelait les restes de deux individus, mais seul un rasoir en fer les accompagnait. Deux couronnes concentriques de sépultures ont plus tard été créées autour du monument. Enfin, plus au sud, la découverte de deux autres sépultures permet de supposer l'existence d'un troisième tertre de plus petite taille. La grande majorité des tombes a livré des éléments de parure en bronze, en verre ou en lignite (roche sédimentaire de couleur noire).

La présence peu courante de la situle, la taille des monuments et de la chambre funéraire du deuxième tertre, attestent du caractère aristocratique de cette partie de la nécropole de la forêt de Brumath. 

L'habitat de la fin de l'âge du Fer

Quelques fosses de la fin de l'âge du Fer (150-30 avant notre ère) ont été mises au jour au niveau de la limite nord du chantier. Elles appartiennent certainement à une petite occupation domestique établie à proximité des tumuli de la nécropole du premier âge du Fer, selon une configuration déjà observée en Alsace. 

La nécropole romaine

La dernière occupation attestée sur le site de Burgweg Rechts est une nécropole romaine. Les structures funéraires se répartissent en deux groupes distincts. Le premier groupe, dans la moitié sud de la fouille, est daté du deuxième tiers du Ier siècle de notre ère et de la deuxième moitié du IIe siècle. Il est composé de cinq enclos quadrangulaires alignés, avec une ouverture à l'est. Le plus grand des enclos mesure une trentaine de mètres de côté, le plus petit, une vingtaine. Ils sont volontairement construits à proximité des tumuli de l'âge du Fer, tout en les préservant.
Les tombes sont des dépôts de crémation (issus du bûcher), plus ou moins richement dotés en mobilier d'accompagnement. Certaines tombes ne contiennent qu'un vase avec les ossements du défunt, d'autres ont livré plusieurs plats, des cruches et divers récipients en verre. L'un des dépôts était accompagné de vaisselle métallique (cruche, poêlon) et de deux fers de lance.
Le second groupe de sépultures, au nord, appartient à la transition entre la fin de l'âge du Fer et le début de l'époque romaine (seconde moitié du Ier siècle avant notre ère). La richesse de certaines tombes indique la présence à proximité d'un habitat de très haut statut qui n'a cependant pas été repéré, que ce soit en fouille, en prospection ou en photographie aérienne. 

Persistance du souvenir

La fouille du site d'Eckwersheim révèle une superposition de monuments funéraires, les aménagements des périodes postérieures intégrant les aménagements antérieurs. Ce phénomène semble attester le souvenir, à chaque époque, des nécropoles précédentes.  

Madeleine Châtelet