Le territoire d'Eckwersheim, à une vingtaine de kilomètres au nord de Strasbourg, abrite deux sites d'importance ayant fait l'objet d'une fouille. Le site du lieu-dit Burgweg Links, au nord du village, est localisé sur le versant est du vallon de la rivière Muehlbach, au bas d'une importante nécropole protohistorique et romaine (voir le site de Burgweg Rechts, Eckwersheim).

Dernière modification
10 mai 2016

La fouille a révélé une occupation très dense : dans la partie basse de la pente, des habitats successifs s'échelonnent du Néolithique à l'époque carolingienne, tandis qu'en haut de pente, une zone d'ensilage des époques néolithique et protohistorique a été investie, à l'époque mérovingienne, par une petite nécropole riche en mobilier.

Une présence au Néolithique

La première occupation est datée du Néolithique récent (-4100 à -3500) et se limite, en bas de pente, à quelques fragments de céramiques dans une fosse plus récente. Sur le haut, des silos au profil caractéristique en U poursuivent une zone d'ensilage mise au jour plus à l'est, sur le site de Burgweg Rechts.

Des habitats pérennes pendant la Protohistoire

Le bas du vallon est réoccupé à partir de l'âge du Bronze moyen (-1600 à -1350) jusqu'au début du second âge du Fer (à partir de -450), sans apparente interruption. Les habitats se signalent par des structures agricoles et domestiques (silos à grain, fosses, four). Un enclos d'une vingtaine de mètres de large a été partiellement dégagé. Il délimitait des aménagements datés principalement du début du premier âge du Fer (autour de -800). Parmi les objets remarquables recueillis dans ces habitats, une perle en verre bleu avec un décor en spirale blanche de l'âge du Bronze final (-1350 à -800) compte parmi les premiers produits en verre connu dans la région. Un creuset contenant des restes de cuivre, retrouvé avec un fragment de moule de torque, date de la fin du premier âge du Fer (autour de -500). Ces indices d'une activité artisanale ont été retrouvés à l'écart de l'habitat, dans la zone d'ensilage installée plus à l'est. 

Un grand bâtiment gallo-romain

Pour l'époque romaine, deux phases distinctes ont été mises en évidence. La majorité des vestiges appartiennent à la première phase, datée du deuxième quart du Ier siècle de notre ère. Ils se composent d'un grand bâtiment en bois à quatre nefs (14 m de long sur 10 m de large) et d'une série de fosses. Cet habitat s'organisait en bordure d'un chemin creux reliant le site à la nécropole de Burgweg Rechts. La deuxième phase, datée de la seconde moitié du IIe siècle, correspond à une occupation moins dense, matérialisée par deux fosses et un four. 

La nécropole du haut Moyen Âge

Après quatre siècles d'abandon, le site connaît une dernière occupation aux époques mérovingienne et carolingienne (du VIe au IXe siècle). L'existence à cette époque d'une petite communauté d'habitants a été mise en évidence par la découverte, non pas de son habitat - certainement en dehors de l'emprise de fouille -, mais de sa nécropole. Fondée dans les dernières décennies du VIe siècle, elle a été utilisée pendant une centaine d'années environ, jusqu'à la fin du VIIe siècle. Les tombes, une soixantaine à l'origine, ont été installées en haut du versant où elles se répartissaient sur une aire rectangulaire de 80 m de long et de 60 m de large. Trente-huit d'entre elles ont été fouillées. 

Armes et bijoux

La majorité des sépultures disposait d'une grande chambre funéraire coffrée de planches assemblées à mi-bois. Le défunt, vêtu, était généralement installé au nord, dans un cercueil ou au sein d'un coffrage construit sur place. Les femmes étaient parées de colliers, parfois aussi d'une fibule, et portaient des longs pendants (dites « châtelaines ») à la ceinture. Des perles y étaient attachées, souvent aussi des anneaux en bronze ou en fer, ainsi qu'un couteau ou un peigne. Les hommes avaient été inhumés avec leur scramasaxe et leur épée. Leur ceinture était parfois garnie d'éléments en argent, en fer damasquiné ou en alliage cuivreux. La moitié sud de la tombe était réservée au dépôt d'objets ou de mobilier. C'est là qu'étaient placées les grandes armes comme les lances et les boucliers, ainsi que la vaisselle en terre cuite et en verre souvent accompagnée d'un dépôt alimentaire (oeufs et pièces de viande). Divers objets et des meubles en bois, dont certains se dessinaient encore sous forme de traces dans le sol, pouvaient compléter ces dépôts.

La nécropole comprenait également quelques sépultures en fosse étroite. Pour une partie d'entre elles, elles avaient été aménagées aussi en chambres, mais sans coffrage, refermées par un simple couvercle reposant sur des décrochements taillés dans les parois de la fosse. Dans d'autres, le cercueil ou le coffrage du défunt avait été directement recouvert de terre. 

Riche tombe féminine

L'une des tombes les plus riches était celle d'une femme. Elle portait au cou un collier constitué de médaillons en or et de perles en améthyste et, à la ceinture, une châtelaine à laquelle pendait, à l'extrémité, une rouelle ajourée en bronze enserrée dans un anneau en ivoire. À ses côtés, avaient été déposés une poterie, un verre à boire, deux fusaïoles, un oeuf et deux côtes de porc ainsi que, probablement, des meubles en bois.  

Une petite communauté dans sa diversité

La population inhumée se composait d'hommes, de femmes et d'enfants aux niveaux de richesse différents ; elle devait correspondre à une communauté rurale classique. Seule une légère surreprésentation de la mortalité des enfants de 5 à 9 ans a pu être décelée. La population ne se distinguait par aucune pathologie particulière. 

Fin de l'occupation

Un habitat un peu plus tardif a été mis en évidence sur le bas de la pente, représenté par les vestiges d'une cabane semi-enterrée et d'un petit groupement de sept tombes datées du VIIIe siècle. Les dépôts funéraires se limitaient à des poteries.