Carriers et archéologues : Bâtir l’avenir et comprendre le passé
La relation entre carriers et archéologues va de soi, puisque le terrain où s’exercent leurs deux activités est commun : les couches superficielles de l’écorce terrestre. L’exploitation des ressources minérales étant une activité parmi les plus anciennes, c’est d’abord dans ces contextes que les collectionneurs de curiosités, les chercheurs de trésor ou, plus récemment, les naturalistes et les pionniers de la Préhistoire ont pu avoir accès au sous-sol et à ses richesses archéologiques.
Longtemps les découvertes archéologiques – pas celles bien sûr qui, telles les ruines du Parthénon, les pyramides ou les pierres dressées de Stonehenge, s’étalaient depuis toujours au regard du passant inculte ou savant –, celles donc qui avaient été conservées au sein de la terre ont été exhumées par hasard. Non par tel ou tel érudit qui, armé de sa pelle et de son intuition, a soudain vu apparaître un objet, un outil, des ossements couronnant des années de recherches. De telles découvertes sont rares et souvent d’un intérêt restreint faute de pouvoir être étudiées dans leur contexte.
C’est au hasard de grands travaux, d’aménagement du territoire ou d’extraction, que la plupart des vestiges que nous connaissons aujourd’hui ont pu non seulement être mis au jour, mais aussi et surtout être étudiés dans l’ensemble plus ou moins cohérent d’un site. L’ampleur des carrières, ou plus précisément des sablières et gravières, et les surfaces sur lesquelles elles se déploient, donnent accès à de larges portions de territoire. On peut ainsi saisir la diversité des activités humaines qui s’y sont déroulées, qu’elles concernent la vie quotidienne, les formes de l’habitat, les artisanats, les traitements réservés aux morts ; et cela permet d’appréhender ce que fut la vie dans un lieu à une époque donnée. Il n’est donc pas excessif de dire que, depuis plusieurs siècles déjà, l’activité d’extraction de matériaux a permis la découverte et l’étude de nombreux vestiges archéologiques, contribuant ainsi de manière très significative à la connaissance des sociétés du passé. Les professionnels des carrières, gravières et sablières creusent pour bâtir l’avenir, et les archéologues pour accroître la compréhension du passé et des processus qui ont abouti au présent.
- « Tout ce qui est sous cette terre reviendra au jour. » Tel un démiurge muni d’une pelle, l’antiquaire dégage les ruines et exhume les « trésors » du passé. Page de garde du Novus Commentarius Locupletussimus de C. Valérius Catallus, J.A. Vulpius, Padoue, 1737.
« Tout ce qui est sous cette terre reviendra au jour. » Tel un démiurge muni d’une pelle, l’antiquaire dégage les ruines et exhume les « trésors » du passé. Page de garde du Novus Commentarius Locupletussimus de C. Valérius Catallus, J.A. Vulpius, Padoue, 1737.
© Alain Schnapp - Dragueur-carrier au XIXe siècle Jean-Baptiste (dit Eugène) Piketty était passionné d'archéologie. Il a consacré sa vie à réunir une importante collectiton d'objets archéologiques, dont ses fils et petits-fils ont ensuite fait don au musée des Antiquités nationales.
Dragueur-carrier au XIXe siècle Jean-Baptiste (dit Eugène) Piketty était passionné d'archéologie. Il a consacré sa vie à réunir une importante collectiton d'objets archéologiques, dont ses fils et petits-fils ont ensuite fait don au musée des Antiquités nationales.
© Collection privée C. Piketty - Vue aérienne du site du Chemin de la Fosse de la Haie à Changis-sur-Marne (Seine-et-Marne), 2012. Lors de la fouille préventive d'un site gallo-romain lui-même remarquable, la découverte du squelette presque complet d'un mammouth a justifié la mise en place d'une opération de sauvetage menée conjointement par la Drac (Direction régionale des affaires culturelles) d'Île-de-France, l'Inrap, le CNRS et la Cemex, qui exploite cette carrière.
Vue aérienne du site du Chemin de la Fosse de la Haie à Changis-sur-Marne (Seine-et-Marne), 2012. Lors de la fouille préventive d'un site gallo-romain lui-même remarquable, la découverte du squelette presque complet d'un mammouth a justifié la mise en place d'une opération de sauvetage menée conjointement par la Drac (Direction régionale des affaires culturelles) d'Île-de-France, l'Inrap, le CNRS et la Cemex, qui exploite cette carrière.
© Denis Gliksman, Inrap