De « vieux os » dans l'Hérault

En Europe occidentale, les occupations humaines antérieures au million d’années sont très rares (une dizaine). Elles se répartissent principalement sur le pourtour méditerranéen, depuis l’Italie jusqu’au sud de l’Espagne, et ne sont jamais plus vieilles que 1,6 millions d’années (soit moitié moins anciennes qu’en Afrique).

Bois de Riquet à Lézignan-la-Cèbe (Hérault) est l’un des trois plus anciens sites français (avec le Vallonet et Pont de Lavaud). Des hyènes géantes (plus de 1,20 m au garrot) ont installé vers -1,1 Ma leur repaire au sein d’une des cavités basaltiques qui s’ouvraient sur un canyon où coulait une rivière. Les carcasses de nombreux grands mammifères typiques de cette période (chevaux, cervidés, rhinocéros, bisons, ours et éléphantidés) y ont été accumulées. Si la majorité des ossements découverts montrent des impacts de dents et de mâchonnage laissés par l’hyène, quelques traces sont imputées à l’homme. Ce sont des stries de découpe créées accidentellement par des outils tranchants en basalte lors du prélèvement de restes de viande sur les carcasses. Plusieurs de ces outils, de dimensions moyennes, ont été découverts parmi les os.

À l’époque, les groupes humains n’étaient pas encore chasseurs et se nourrissaient de charognes. Ils étaient donc en compétition avec de nombreux carnivores (le site conserve aussi des restes de jaguar européen, de loup et de renard), qu’ils devaient faire fuir pour accéder aux restes. Dans ce but, il est probable qu’ils aient, entre autres, jeté des pierres. Une cinquantaine de « boules » en basaltes, sélectionnées pour leur ergonomie (taille, poids et ellipticité), ont été découvertes à l’aplomb des corniches, parmi la faune. Certaines ont pu être lancées pour disperser les concurrents animaux, d’autres utilisées comme percuteurs pour sortir la moelle des gros os, d’autres enfin pour tailler l’outillage. De tels outils naturels, utilisés sans modification, sont fréquemment retrouvés parmi les vestiges lithiques de ces périodes.