Fermé depuis 1998, le musée du vin de Champagne et d’Archéologie régionale d’Épernay a ouvert ses portes le 29 mai après de longs travaux de réhabilitation. Grâce à ses fouilles et à ses recherches, l'Inrap a collaboré à la création du nouveau parcours permanent du musée et à la révélation de sa collection archéologique, l'une des plus importantes en France. 

Dernière modification
26 juillet 2021

Labellisé « musée de France », le musée du vin de Champagne et d’Archéologie régionale d’Épernay invite à explorer l'histoire de la Champagne sous tous ses aspects à travers quatre sections : la géologie, l'archéologie, le champagne et les collections. 

C’est au second étage du musée, que la charpente du bâtiment a permis d'aménager un vaste espace entièrement consacré à la collection archéologique d’Épernay. 
Riche d'environ 80 000 pièces, ayant notamment pour origine les fouilles de l'abbé Pierre Favret (1875-1950), Joseph de Baye (hypogées néolithiques), André Brisson et André Loppin, il s'agit de la première collection d’archéologie régionale en France, après celle du musée d’archéologie nationale de Saint-Germain-en-Laye. Partenaire scientifique privilégié du musée d’Epernay, l'Inrap a été sollicité afin de collaborer à la réalisation d'un nouveau parcours archéologique permanent. Celui-ci embrasse une séquence qui s'étend des chasseurs cueilleurs du Paléolithique jusqu'aux orfèvres mérovingiens, tout en s'inscrivant dans le fil conducteur du musée : le sol crayeux, substrat exploité par les premiers agriculteurs du Néolithique, jusqu’aux viticulteurs champenois. 

 

Du Paléolithique aux mérovingiens

Ce parcours retrace des millénaires d'occupation humaine de la Champagne, depuis les bifaces, pointes de racloirs et lames des premiers chasseurs-cueilleurs du Paléolithique (à partir de - 300 000) et outils plus sophistiqués des populations mésolithiques (- 9000-5300) jusqu’aux pièces d’orfèvrerie des Mérovingiens. La section néolithique est une des plus riches du parcours, car elle bénéficie des fouilles d'hypogées creusés dans la craie dont plus de 160 ont été découverts en Champagne. Les vestiges qui sont présentés au musée dressent un tableau complet de la vie quotidienne de ces populations sédentaires qui ont pratiqué l'élevage et la culture (blé, épeautre, légumineuses...), creusé des minières de silex, introduit la poterie, le tissage, de nouvelles techniques du travail du bois, de la peau, des os, conçu de nouveaux outils (pics, leviers, haches…) et apporté un soin tout particulier à leur parure (pectoraux, ceintures, collier, en pierre, coquillage, bois de cerf...).

La section consacrée à l'âge du Bronze (entre 2200 et 800 av. J.-C.) montre des échantillons exceptionnels des productions des premiers métallurgistes (trésor de Saint-Martin-sur-le-Pré), mais c'est la période de l'âge du Fer (à partir du VIIIe siècle avant J.-C.) qui est la plus représentée dans le musée. En témoignent le mobilier funéraire découvert dans les tombes de guerriers ensevelis avec leur panoplie militaire (arme de poing, poignard, dague...) et les parures féminines (bracelets, boucles d’oreilles, fibules, ceinturons, agrafes de ceinture à décors estampés...) aux formes sophistiquées, en particulier les torques dont le musée expose une collection exceptionnelle par sa variété. En dépit d'un artisanat florissant, cette créativité est peut-être moins mise à l'honneur pendant la période romaine, mais elle est illustrée de nouveau au travers de la richesse des bijoux, parures d'orfèvrerie et armements (épées, scramasaxes, haches de jet, angons) qui composaient le mobilier funéraire des élites mérovingiennes (nécropole du Val-des-Marais/Aulnizeux, IVe-VIIe siècles), témoignant à nouveau d'une maîtrise complète des techniques de la métallurgie en Champagne.

 

Un nouveau regard sur l'histoire de la Champagne

Par-delà la valeur patrimoniale exceptionnelle des nombreuses pièces présentées au sein de ce parcours, l'intérêt de ce dernier est de permettre de nouvelles lectures de la vie, de l'histoire et du patrimoine de ce territoire. Riche des résultats accumulés pendant plus de vingt années d'archéologie préventive dans la région, l'Institut est intervenu à différents niveaux dans l'élaboration de ce parcours muséal, dans une approche visant résolument à renouveler le regard sur les anciennes collections du musée et sur l'histoire de la Champagne. Cet apport récent de l'archéologie préventive est concrétisé par la présentation de nombreux objets découverts par l'Inrap et provenant du Dépôt archéologique de la DRAC Grand Est, ainsi que par une aide à la sélection du mobilier dans les anciennes collections et des études et expertises ponctuelles de certains objets.

Toutefois, la contribution de l'Institut va bien au-delà de ce travail sur le mobilier puisque ce sont aussi les données collectées sur le terrain et en laboratoire qui donnent du sens et donc une vie et une valeur aux vestiges archéologiques. Ce sont elles qui ont permis de documenter l'exploitation des ressources, l'habitat, la vie quotidienne, l'alimentation, le commerce, le transport, les rites funéraires (...) dans toutes les différentes sections archéologiques de ce parcours. L'Institut a ainsi mis à disposition du musée toutes ses données scientifiques, plans, cartes, ressources documentaires et iconographiques, ressources multimédias et vidéo, tout en participant à la conception des supports muséographiques (panneaux, animations, maquettes...).


Ce parcours « neuf » sur l'archéologie en Champagne offre également l'occasion d'un regard sur les méthodes actuelles d'investigation : archéologie expérimentale, céramologie, anthropologie, archéozoologie, carpologie, géomorphologie, prospections aériennes ou géophysiques, restauration. À travers un voyage dans le temps long de l'histoire de la Champagne, le public accèdera donc à l'état le plus actuel de la discipline.