Les méthodes

Le Système d’information géographique

Le Système d’information géographique, ou comment faire parler les cartes

L’ampleur de l’aire d’investigation archéologique prévue pour le projet d’aménagement du canal Seine-Nord Europe induit une accumulation très importante de données scientifiques. Afin d’optimiser l’utilisation de ces données, la décision de mettre en place un système d’information géographique (SIG) est vite apparue comme une évidence.
Description de la place du système d’information géographique dans l’organisation des données.
© Inrap
Des recherches thématiques, des calculs statistiques
Le SIG est une base de données qui permet la gestion de données géographiques. Celles-ci sont affichées dans un système géographique de référence ou système de projection (Lambert 93 par exemple) qui assure le positionnement des entités les unes par rapport aux autres et de manière globale (positionnement en France, dans la région, le département, la commune et la parcelle…). À chaque objet représenté dans cet espace, un certain nombre de renseignements descriptifs sont associés (nature de l’objet, dimensions, datation, etc.). Ces informations servent de support pour effectuer des recherches thématiques et des calculs statistiques ; une recherche pourrait par exemple porter sur les inhumations de la période chrétienne, ou encore sur la taille moyenne des silos pendant l’âge du Fer. Ces recherches s'effectuent de la même manière qu'une simple requête sur un moteur de recherche internet

Comparer avec des données de nature différente
La puissance du SIG réside également dans la possibilité de croiser les données nouvellement récoltées sur le terrain avec des données déjà présentes, pour enrichir et élargir le champ d’investigation. Des comparaisons sont possibles avec des données archéologiques plus anciennes, mais également avec des données de nature différente mais apportant des informations complémentaires : relief, réseau routier, réseau hydrographique, matières premières, contexte géologique ou encore contexte climatique, mais aussi photographies aériennes ou documents cartographiques anciens. Des recherches sont alors possibles en prenant en compte ces nouveaux éléments : distance entre les installations humaines et l’eau potable ou les matières premières, calcul d’exposition au soleil à partir des données sur le relief ou sur les phénomènes d’érosion. Les possibilités du SIG sont multiples et variées, et fournissent autant de supports ou d’aides à la réflexion pour le scientifique.

Le SIG et les 2 500 hectares d’investigation du canal
Utiliser un tel dispositif pour gérer les données issues des 2 500 hectares de l’aire d’investigation du canal permet d’assurer leur cohérence et leur qualité et donc leur pérennité scientifique. Pour chaque diagnostic et chaque fouille, les données topographiques (plans fournis par les topographes) et les informations scientifiques décrites par les archéologues sont référencées. Le SIG ainsi constitué fournit tous les fonds cartographiques utiles aux raisonnements scientifiques (cartes thématiques par exemple), mais également les fonds destinés aux rapports réglementaires (rapports de diagnostics, rapports de fouilles) tels que les plans cadastraux, les plans masse du site, les plans chronologiques… Également intégrées dans le SIG, les conclusions des rapports de diagnostic et fouilles constituent un inventaire des sites découverts sur l’ensemble des 106 km du tracé.

Une consultation quelle que soit l’échelle de lecture
En consultant le SIG, les archéologues peuvent obtenir des réponses quelle que soit l’échelle de lecture : pour une sépulture par exemple, des études de la répartition des offrandes ou encore de l’éparpillement des restes osseux en fonction des conditions de décomposition du corps ; des calculs de densité de vestiges lithiques pour appréhender l’organisation d’un espace de débitage de silex voire même pour retrouver la position du tailleur. À l’échelle d’un site archéologique, la visualisation des phases d’occupation successives apporte un éclairage décisif sur la compréhension globale de l’implantation humaine.

Les archéologues peuvent aussi consulter les données issues de plusieurs sites. Des problématiques à l’échelle d’un terroir peuvent alors être envisagées : préférence d’installation pour les espaces agricoles, visibilité des installations cultuelles les unes par rapport aux autres, temps moyen de déplacement entre une installation agricole et un lieu de culte… Enfin, à l’échelle du tracé, des comparaisons sont possibles entre les découvertes, facilitant ainsi la production de synthèses globales.

Une archéomaticienne pour administrer le SIG
La chaîne opératoire mise en place sur l’opération du canal Seine-Nord Europe permet d’optimiser l’intégration des données archéologiques dans le SIG, de valoriser les compétences de chaque acteur du projet et d’assurer une véritable collaboration entre les archéologues et le plateau technique. Celui-ci, constitué de topographes, de dessinateurs et d'une archéomaticienne répond aux demandes techniques de l'archéologue pour lui permettre une exploitation de ses données en accord avec sa problématique scientifique. L’archéomaticienne, spécialiste de l’utilisation d’outils informatiques appliqués à l’archéologie, administre le SIG afin de garantir la cohérence et l’intégrité des données et de fournir la documentation cartographique à la demande.

L’outil permet ainsi d’harmoniser et de centraliser des données selon un référentiel géographique commun.
Caroline Font, Inrap