Le pénitencier pour enfants (1863-1879) redécouvert de l’Îlet à Guillaume (Nouvelle-Aquitaine et Outre-Mer, La Réunion, Saint-Denis)

L'étude historique et archéologique de la colonie pénitentiaire agricole pour enfants de « l'Îlet à Guillaume » (Saint-Denis, La Réunion) est une commande portée par le Département de La Réunion. Elle vise à acquérir la connaissance la plus exhaustive du site dans le cadre d'un projet de restauration des vestiges et d'une nouvelle présentation au public.
L'aboutissement de cette étude est le fruit d'une collaboration étroite entre une historienne, spécialiste de la justice des enfants au sein du ministère de la Justice, une équipe d'archéologue et une archéobotaniste.

Le pénitencier de l'Îlet à Guillaume s'inscrit dans l'histoire de la justice des mineurs qui voit, à partir des années 1840, la création de lieux d'enfermement alliant travail et discipline. La Réunion coloniale n'échappe pas à cette nouvelle législation. Fort de ses bonnes relations avec les autorités religieuses, l'administration confie aux Spiritains la création d'un premier établissement à Saint-Denis, la Providence, regroupant hospice, école professionnelle et pénitencier pour enfants. Une vice-communauté de la Providence est fondée à l’Îlet à Guillaume, en 1864, réservée aux mineurs délinquants et déviants. En quelques années, la communauté composée de 10 frères et de plusieurs dizaines d'enfants vont aménager le plateau en construisant bâtiments, chemins, terrasses et système d'irrigation. Parallèlement, des travaux sont engagés pour faciliter l'accès au pénitencier par le percement d'un « chemin charrette », borné par deux bâtiments et un pont suspendu qui enjambe le Bras Guillaume. Enfin, cette communauté, aussi agricole, tentera toujours, sous l'impulsion du père supérieur Duboin, d'atteindre la meilleure rentabilité économique par les nombreuses tentatives de cultures du tabac, de la vanille, du quinquina et surtout du café. Leurs échecs successifs précipiteront le déclin et l'abandon du pénitencier, dont l'accès promis n'aura jamais pu être terminé.

Cette image du pénitencier a pu aussi être affinée par une exploration archéobotanique, destinée à faire la part entre l'héritage des activités agricoles du pénitencier et celles des occupations antérieures (une plantation de café) ou postérieures (la colonisation de cet espace par les forestiers dans le courant du XX^e siècle).
Enfin, ces résultats ont aussi pu être mis en image, grâce à la présence lors de l'opération de terrain, d'une dessinatrice, qui en plus de témoigner de l'action des archéologues a su apporter son regard à l'interprétation des vestiges. L'édition de ce carnet de terrain, par le Département et l'Inrap, est un outil majeur de valorisation vers le public réunionnais, qui s'ajoute aux nombreux échos qu'ont reçu ces recherches dans les médias locaux et nationaux.

Cette étude inscrit une nouvelle thématique à l'axe 15 de la programmation du Conseil national de la recherche archéologique (CNRA), l'archéologie d'outre-mer, celle de l'enfermement. Mais elle intéresse surtout la question de la place de l'Îlet à Guillaume parmi les colonies pénitentiaires de la métropole, aux caractéristiques proches, et au sein de l'histoire coloniale, évidemment particulière.