… au patrimoine local

Des journées “portes ouvertes“ qui rendent accessibles des chantiers de fouilles archéologiques sont l'occasion pour le public de voir la “science en action“, et pour les archéologues de transmettre les enjeux scientifiques et les valeurs patrimoniales de leur discipline. Ici, à l'occasion des Journées nationales de l'archéologie de 2016, une visite du chantier médiéval de Lille-Souham fouillé par l'Inrap. © Elisabeth Justome, Inrap

Longtemps cependant les sites sélectionnés ont été de nature exclusivement monumentale, tandis que des vestiges archéologiques tout aussi exceptionnels, de périodes plus anciennes ou d’apparences moins spectaculaires, sont restés sous-représentés. De même, l’engouement pour l’inscription sur la liste, avec ses enjeux diplomatiques et ses retombées attendues en termes de visibilité et de tourisme, a parfois fait perdre de vue les objectifs initiaux. Au-delà des sites de valeur universelle exceptionnelle, l’enjeu est d’étendre les mesures de protection et de valorisation à l’ensemble du patrimoine culturel et archéologique, et d’en faire équitablement bénéficier ce patrimoine infiniment plus abondant, dont l’importance se limite au niveau national, régional ou même local.

Aux côtés d’une conception centralisée et « autorisée » du patrimoine national ou universel, émergent aussi des approches plus diversifiées, ancrées à différentes échelles dans la société civile et le monde associatif. Ces approches font place à une gamme de considérations identitaires et socio-politiques, que ce soit en rapport avec des revendications post-coloniales ou encore lors de controverses suscitées par certains aménagements du territoire considérés comme démesurés ou inappropriés.

Quant aux archéologues amateurs, malgré leur apport essentiel au développement de l’archéologie depuis le XIXe siècle, ils se trouvent de nos jours dans une situation difficile : dans un monde de plus en plus professionnalisé et managérial, où se soulèvent des questions de concurrence et des normes de sécurité, ils risquent d’être tenus à l’écart de ce patrimoine qu’ils ont pourtant longtemps contribué à faire connaître.

Ce n’est que récemment que la médiation et la communication au public ont pris une place légitime dans l’activité archéologique. Il a fallu pour cela que l’archéologie, science de pointe et activité culturelle, soit aussi reconnue comme une discipline citoyenne à part entière, pleinement située dans le présent.

Enfin, ces mêmes questions – à qui appartient le passé ? À qui revient-il de le valoriser, de le faire connaître et même d’en tirer profit ? – portent aussi sur des enjeux de trafics illicites et de marché noir en objets et en monuments archéologiques. La restitution de tels objets par leurs détenteurs occidentaux – souvent anciennes puissances coloniales – à leur pays d’origine est certes controversée, notamment lorsque ceux-ci appartiennent à d’anciennes collections désormais dans le domaine public. Néanmoins, au-delà de la réparation de torts historiques, une telle restitution devrait aussi permettre de développer des compétences professionnelles à travers le monde, et d’ainsi mieux faire connaître les valeurs scientifiques et patrimoniales de l’archéologie.