La fouille révèle une occupation du site du Ier siècle avant notre ère au XVIIIe siècle. L’époque moderne est marquée par la présence successive d’un château défensif puis résidentiel. Couplées à des recherches en archives, ces découvertes contribuent à une meilleure connaissance des abords de Lille et la vie quotidienne de ses habitants.

Dernière modification
07 juin 2019

En préalable au chantier du projet immobilier Ekla, porté par le promoteur Icade, à la frontière entre le quartier d’affaires Euralille et le quartier plus résidentiel de Fives, une équipe de l’Inrap a réalisé, d’août à novembre 2015, une fouille archéologique prescrite par l’État (Drac Nord-Pas-de-Calais).

Une occupation dès la Protohistoire

De la céramique et des ossements d’origine animale, mais aussi de multiples fosses découvertes dans une terre marécageuse témoignent d’une occupation dès le Ier siècle avant notre ère. D’ouest en est, trois grands fossés parallèles semblent marquer la présence d’un parcellaire antique probablement lié à un établissement rural à proximité.

Au Moyen Âge (XIVe-XVe siècles), le site est encore occupé, comme en témoigne une série de très grandes fosses, probablement à usage artisanal. Il pourrait s’agir de la basse-cour du château de la Phalecque, attesté à cette époque dans les archives et qui aurait laissé place à l’édifice fouillé par les archéologues.

Visuel 1 - Lille rue de la Chaude Riviere

Vue générale de la fouille, avec les deux châteaux des XVIe et XVIIIe siècles.

© JP Pepek Balloïde photo, Inrap

Le château de la Phalecque au XVIe siècle

Des différents châteaux qui se sont succédé sur ce site, seuls subsistent les vestiges archéologiques. La fouille a mis en évidence l’édifice du XVIe siècle et des communs desservis par des chemins, dont l’un menait à un gué maçonné. Ce château de plan trapézoïdal présente une maçonnerie particulièrement soignée : la base talutée, composée de blocs de calcaire et de briques avec parement de grès présente des arcs de décharge sur deux côtés (est et ouest).
La première vocation du château semble être défensive : il est entouré d’un fossé dans lequel les archéologues ont mis au jour des boulets de canon en métal et en pierre portant des traces d’impacts. La découverte témoigne des périodes de conflits entre le Royaume de France et les Flandres et de la position vulnérable du château aux portes de Lille.

Les planches et pieux en bois qui servaient à stabiliser ce fossé d’enclos, remarquablement conservés dans ce milieu assez humide, permettront d’affiner la datation de l’occupation grâce à la dendrochronologie (étude des cernes des bois). Les nombreux objets exhumés du fossé, comme les services de table (verreries de Venise, cuillères en argent, céramiques de Delft), reflètent également le niveau de vie privilégié des résidents. Des fragments de vitraux, de poêle à bois domestique, des éléments de pompe à bras pour puiser l’eau, des carreaux de pavements décorés, des épis de faitage modelés, des éléments de construction métalliques ainsi que les nombreux blocs de calcaire sculptés récoltés laissent entrevoir le mode de construction de ce logis.

Un château résidentiel du XVIIIe siècle

Fin XVIIe - début XVIIIe siècle, l’édifice du XVIe siècle est arasé et réaménagé en jardin tandis qu’un nouveau logis est construit au sud, en front de parcelle. En témoigne la série de caves découverte lors des fouilles, ainsi qu’une pièce attenante comportant un sol en béton de tuileau étanche et un puisard et qui a pu servir de buanderie. Témoin de la fonction résidentielle du nouveau château, une « folie » occupait le fond de jardin. À l’image du pavillon français du petit Trianon de Versailles, ce petit édifice présentait une rotonde entourée d’un couloir circulaire reliant quatre pièces quadrangulaires réparties en croix.  
Lors du dernier siège de Lille par les Autrichiens, en 1792, le château de la Phalecque sert de poste avancé pour les assiégeants et abrite 300 uhlans. Pour une meilleure défense de la ville, il est ensuite décidé de créer un no man’s land autour de ses remparts et de détruire définitivement la propriété.

Porteur du projet Ekla :  Icade
Aménagement du quartier :  SPL Euralille – Ville de Lille - Métropole Européenne de Lille
Contrôle scientifique : Service régional de l'Archéologie (Drac Nord-Pas-de-Calais)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Vincent Lascour, Inrap