Le site de Gingsheimer Feld, à Gougenheim, est implanté sur l'une des collines du Kochersberg, un riche terroir agricole.

Dernière modification
10 mai 2016

La fouille a révélé, sur près de 4 hectares, des vestiges d'habitats allant du Néolithique ancien à l'âge du Fer et, surtout, un ensemble important d'inhumations en fosses circulaires de la période du Néolithique récent. Cette dernière découverte est d'un intérêt majeur pour la connaissance des pratiques mortuaires au cours de cette période.

Premiers agriculteurs

Les vestiges les plus anciens datent du Néolithique ancien, aux alentours de 5000 avant notre ère (période du Rubané récent). Très ténus, ils permettent néanmoins d'identifier la présence de bâtiments d'habitation, occupés par les premières communautés d'agriculteurs en Europe. Deux inhumations d'enfant ont été retrouvées au sein de fosses de construction flanquant les maisons. La pratique de l'inhumation dans l'habitat est en effet courante au Néolithique. 

Des silos à grain

Sur l'ensemble du site, l'opération archéologique a mis au jour plusieurs centaines de structures remontant au Néolithique récent (4100 à 3500 avant notre ère). Il s'agit de fosses apparentées, pour la plupart, à des silos destinés au stockage du grain. Elles contenaient d'abondants rejets domestiques, comptant de nombreuses céramiques et des outils en pierre (en rhyolite et en silex).
Bien que les bâtiments n'aient pas laissé de traces dans le sol, leur présence se vérifie sur l'ensemble du site par la profusion de restes de torchis rejetés dans les fosses désaffectées. L'étude, en cours, déterminera si l'occupation correspond à de petites installations successives sur une fourchette de quelques siècles, ou s'il s'agit, au contraire, d'une implantation étendue relevant d'un site de rang particulier. 

Un corpus exceptionnel d'inhumations en fosses

Une partie des fosses-silos a été réutilisée entre 3950 et 3700 avant notre ère pour servir de sépultures. Elles ont révélé les restes de quarante-trois individus, faisant du site de Gougenheim le plus important ensemble funéraire de la vallée du Rhin supérieur pour le Néolithique récent.
L'étude en cours va permettre de faire évoluer significativement notre connaissance des gestes mortuaires à cette période. On peut d'ores et déjà noter l'existence de manipulations peri mortem se traduisant notamment par des déplacements de portions de corps, ainsi qu'une grande variabilité des positions des défunts. Outre un certain nombre d'individus en position « standard » (sur le côté, membres supérieurs et inférieurs fléchis), d'autres adoptent en effet des postures inhabituelles (sur le ventre, assis, etc). 

Rares indices

Pour une longue période après l'occupation du Néolithique, il n'existe que de rares indices de fréquentation du site. Il s'agit de fosses étroites et profondes datées de la première moitié du IIIe millénaire avant notre ère. Certaines contenaient des squelettes d'animaux en connexion (suidés et canidés). Des vestiges plus récents attestent une implantation datable de l'âge du Bronze ancien, au début du IIe millénaire avant notre ère. Il s'agit d'un secteur d'habitat placé en rupture de pente et très érodé, dont les vestiges démantelés pourraient bien avoir été découverts à quelques centaines de mètres en contrebas (voir le site de Gingsheim - Steinbrünnen). 

L'occupation de l'âge du Fer

Les opérations archéologiques conduites dans le Kochersberg montrent que dès le début de l'âge du Fer (-800), il existe un réseau dense d'exploitations agricoles sur le territoire. Ce fait se vérifie également sur le site de Gougenheim, où un ensemble de structures de stockage et de larges fosses d'extraction du loess a été mis au jour. Cette occupation est à situer dans le courant du VIIIe siècle avant notre ère.
Elle se distingue par un mobilier archéologique abondant dans un bon état de conservation, qui regroupe de nombreux éléments de vaisselle finement décorée ainsi que des objets métalliques peu courants. Deux dépôts d'inhumation en silo dépourvus de mobilier d'accompagnement remontent également à l'âge du Fer.

Yohann Thomas