En 2015, l’Inrap découvrait l’exceptionnelle tombe princière de Lavau (Aube), datée du milieu du Ve siècle avant notre ère. Confié au Centre de recherche et de restauration des musées de France, le mobilier funéraire fait désormais l’objet de nombreuses analyses.

Dernière modification
08 juin 2017

En 2015, l’Inrap découvrait l’exceptionnelle tombe princière de Lavau (Aube). La fouille a révélé une tombe celtique datée du milieu du Ve siècle avant notre ère, comparable à celles de Vix ou de Hochdorf (Allemagne). Étendu sur un char à deux roues, le défunt est paré d’un torque et de bracelets en or, d’une fibule et d’une ceinture finement décorées. Il est accompagné dans l’au-delà de vaisselles liées au banquet et à la consommation du vin : un grand chaudron et une ciste étrusques en bronze, une oenochoé attique figurant Dionysos allongé sous une vigne, une passoire et un gobelet en argent. Parmi les autres accessoires, se trouve une bouteille en céramique cannelée, production caractéristique des « résidences princières » telles que Vix, située à une soixantaine de kilomètres de Lavau. Cette découverte illustre les contacts entre les mondes celtique et méditerranéen. 

Des recherches tout azimut

La Direction générale des patrimoines a sollicité le C2RMF pour engager ses moyens d’analyse et ses compétences scientifiques au service de l’étude de ce mobilier d’exception. Ces recherches portent sur la composition des matériaux mais aussi sur la structure et le mode d’assemblage des objets, du macroscopique au microscopique. Les moyens d’analyse et d’investigation du laboratoire sont de quatre ordres : techniques d’analyses élémentaires et structurales, d’imagerie, d’analyse organique et de radiographie-tomographie.

Directement issu de la fouille, le mobilier n’a pas encore fait l’objet de traitements pour garantir sa conservation à long terme. Des travaux de nettoyage et de stabilisation des objets sont menés. Le mobilier issu de fouilles récentes constitue en effet une opportunité unique pour la réalisation d’analyses poussées. Les surfaces étant libres de tout traitement de consolidation, leur étude repose sur  une information « fraîche », non dégradée. Le mobilier de la tombe de Vix en est un contre-exemple : anciennement restauré il ne se prête plus à des analyses, comme celle de l’étude du contenu du cratère.
Face au processus d’altération accéléré et à la fragilité de certains objets de Lavau,  toutes les dispositions sont prises pour les maintenir dans les conditions de conservation les plus adaptées. Des radiographies et tomographies de rayons X fournissent les premières informations sur  la morphologie et l’état de conservation des objets, et notamment sur les objets prélevés en « motte » lors de la fouille (sur le corps du défunt et dans la chambre funéraire).
Les premières radiographies révèlent l’ornementation de la ceinture, rehaussée d’un très fin fil d’argent formant une frise continue de motifs celtiques. Cette pièce exceptionnelle, d’une très grande fragilité, est unique.

L’examen des radiographies a par ailleurs guidé le nettoyage du couteau et de son fourreau. Elles ont révélé un décor damasquiné, finement ouvragé de fils de bronze. 
Les images des grands éléments en bronze ont déterminé le recours à la métallographie pour étudier la technique de mise en forme du métal et à la composition élémentaire pour caractériser les alliages. Elles révèlent que le grand chaudron est d’abord et avant tout un remarquable travail de fonderie. La ciste à cordons illustre la virtuosité et la maîtrise technique du martelage sur un bronze assez fortement chargé en étain (autour de 12 %).

Photographie macroscopique, microscopie 3D  numérique et scanners 3D explorent les modes d’assemblage et les techniques de fabrication des matériels. Le scan 3D haute résolution a révélé un poli d’usure sur le torque et les bracelets en or, dû au frottement contre la peau du défunt ou de ses vêtements. Cette technique également employée sur le décor peint de l’oenochoé montre la finesse des traits de gravure, témoin du geste précis de l’artisan ou artiste grec. Pièce emblématique du dépôt funéraire, elle traduit dans ses techniques d’assemblage et de décoration, la rencontre de plusieurs mondes : la Grèce (la céramique attique), probablement l’Étrurie (les décors en or filigranés) et le monde celtique (décor ajouré en argent). 

L’analyse chimique élémentaire a été engagée sur l’ensemble du mobilier afin de connaître la composition exacte des matériaux à l’aide de l’accélérateur de particules AGLAE et d’un microscope électronique à balayage. Ainsi la matière première de la bouteille cannelée s’est avérée locale.
La tombe de Lavau contient de nombreux objets en fer : agrafes, fibule, bandages de roue, clavette, couteau. Ils constituent de très bons éléments de datation. L’étude de ces objets corrodés et fragmentés peut révéler des décors et des tissus minéralisés en surface. La fibule et de la clavette du char contribuent ainsi à confirmer la datation de la tombe vers le milieu du Ve siècle avant notre ère.   

Engagés depuis 2015, les recherches se poursuivront jusqu’en 2019 au C2RMF avec le concours d’autres plateformes analytiques comme le synchrotron.