Depuis le 18 avril 2017, des élèves du collège Victor Hugo de Narbonne se succèdent dans l’une des cours de leur établissement pour mener à bien la fouille d’une partie du Capitole, enfoui sous leurs pieds.

Dernière modification
02 mai 2017

Pendant deux semaines, ils mettent en pratique les apprentissages dispensés depuis le début de l’année scolaire par leurs enseignants et par les professionnels de l’Inrap, du CNRS (ASM – Archéologie des sociétés méditerranéennes) et du MuRéNa, impliqués dans ce projet de résidence d’archéologues. Les résultats de leur campagne de fouille sont d’ores-et-déjà prometteurs : la partie du podium du monument située sous la cour explorée a pu être entièrement dégagée et un volume conséquent de mobilier archéologique a été recueilli.

Au cours des deux semaines de fouille prévues, ce sont près de 200 élèves qui auront œuvré à la redécouverte du patrimoine antique narbonnais. Là ne s’arrêtera pas leur mission, puisqu’ils feront partager les résultats de leurs recherches lors de visites guidées et d’une exposition, organisées les 16 et 17 juin 2017 à l’occasion des Journées nationales de l’archéologie.  

Sous le collège, le Capitole de Narbonne

Le sanctuaire du Capitole, monument majeur de la ville antique de Narbonne,  constituait un élément remarquable de la parure monumentale de la cité romaine. Ses vestiges ont été découverts entre 1877 et 1888, notamment pendant la construction du collège Victor Hugo, entre 1879 et 1885.
Sous la conduite des archéologues, les élèves fouillent actuellement une partie du podium ainsi que les remblais utilisés par les découvreurs du XIXe siècle pour reboucher la zone. Ces remblais contiennent à la fois des objets ou matériaux datés du XIXe siècle et des vestiges antiques, alors fouillés mais rejetés dans ces couches de remplissage.

L’observation de l’architecture  

La fouille est l’occasion, en tout premier lieu, d’opérer un relevé topographique du podium et ainsi de préciser les plans réalisés au XIXe siècle. Le dégagement d’une partie de sa surface et de ses abords a en outre pour objectif d’étudier sa mise en œuvre architecturale. La base du monument est construite en moellons de calcaire : elle a été dégagée sur une longueur de 14 m pour 8 m de large, et sur une profondeur de 1,70 m. Il s’agit des fondations du podium et des premières assises de l’élévation du monument. Les archéologues ont pu vérifier que les fouilleurs du XIXe siècle avaient sondé profondément les abords du podium afin d’atteindre des vestiges de constructions antérieures au Capitole. Les bâtisseurs de l’Antiquité avaient également ménagé un espace vide dans la construction, afin d’économiser des matériaux. L’analyse de toutes ces données va ainsi permettre de proposer des restitutions du monument et de confirmer ou d’infirmer les hypothèses formulées au XIXe siècle.

Des couches de remblaiement au contenu précieux

Les terres utilisées au XIXe siècle pour reboucher les zones dégagées contiennent quantité de matériel archéologique. Ce mobilier est soigneusement prélevé, lavé et trié par les élèves. Certains objets ou matériaux proviennent directement de rebuts du XIXe siècle utilisés dans les remblais, tels des fragments de vaisselle en porcelaine ou des bouteilles de verre. Les fouilleurs du XIXe siècle ont toutefois également rejeté dans ces comblements modernes des vestiges antiques, que l’on peut associer au Capitole. Les élèves ont ainsi découvert plusieurs antéfixes en céramique, ornées d’une tête, qui constituent des éléments de décoration du toit de l’édifice. Un pouce en marbre, provenant sans doute d’une statue, a également été mis au jour. Les apprentis archéologues recueillent enfin de nombreux éléments issus de la destruction du monument, tels des tuiles, des éclats de marbre, des fragments de stuc et de moulures en calcaire.

La suite du programme : la valorisation de ces recherches auprès du public

Les Journées nationales de l’archéologie (17 et 18 juin 2017) seront l’occasion pour les partenaires du projet, enseignants et élèves, d’organiser une restitution du programme mené pendant l’année et de présenter les vestiges mis au jour. Le collège ouvrira ses portes au grand public pour proposer une exposition préparée par les enfants, des projections et des animations sur l’archéologie. Les élèves mèneront également des visites de la fouille, après avoir été initiés à la médiation par les étudiants de la licence professionnelle de guide-conférencier de l’Université de Perpignan Via Domitia. Un montage d’images prises en continu et en accéléré (time-lapse), réalisé par un professeur et un élève, présentera les deux semaines d’évolution de la fouille. Les premières images d’un film documentaire réalisé par « Passé Simple » sur toutes les étapes du projet sera aussi diffus

Un projet rassemblant de multiples partenaires

C’est à l’initiative du collège et de l’Institut national de recherches archéologiques préventives que de nombreux partenaires sont réunis dans ce programme de sensibilisation des enfants au patrimoine et aux sciences de l’archéologie : les chercheurs de l’Inrap sont associés à ceux du CNRS (ASM – Archéologie des sociétés méditerranéennes) et du MuRéNa, et bénéficient de l’engagement du Conseil départemental de l’Aude, de la Drac Occitanie (service régional de l’Archéologie) et de la licence professionnelle de guide conférencier de l’Université Perpignan Via Domitia. Le projet reçoit également le soutien du LabEx Archimède, dans le cadre du programme « Investissements d’avenir ».

Cette opération s’inscrit dans le cadre d’une fouille programmée placée sous la responsabilité de l’Inrap, sur autorisation du service régional de l’Archéologie (Drac Occitanie) et sous son contrôle scientifique ; dans ce cadre, elle fera également l’objet d’un rapport de fouille remis à l’État. Le mobilier ainsi que les données recueillies seront par la suite intégrées dans le cadre du projet muséographique du futur MuRéNa.   

Contrôle scientifique (fouille programmée) : Service régional de l’Archéologie (Drac Occitanie)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Véronique Canut, Inrap
Avec : Tanguy Wibaut, Inrap et Corinne Sanchez, CNRS (UMR 5140 - ASM)