A Raillencourt-Sainte-Olle (Nord), les recherches menées dans ce secteur ont révélé les vestiges d’un important ensemble funéraire daté de la fin de l’âge du Fer, et, plus particulièrement, du Ier siècle avant notre ère. Le gisement se situe à la rupture de pente d’un plateau qui domine la rive gauche de l’Escaut, à 3 km au nord-ouest de Cambrai.

Dernière modification
10 mai 2016

Malgré la destruction passive due à la mécanisation de l’agriculture, il semble que la topographie, reflétée par un relief marqué du plateau, ait permis une bonne conservation des vestiges. Depuis 1998, plusieurs campagnes de sondages et de fouilles préventives ont été réalisées sur la zone Actipôle. Elles ont livré des vestiges d’occupations du Néolithique moyen et final.

Le décapage d’une surface d’1 ha a révélé le tracé d’un enclos quadrangulaire de 925 m2. Il comporte sept tombes au total. Trois tombes à incinération de taille réduite, de plan quadrangulaire, entrent dans un type bien connu des nécropoles laténiennes. Un mobilier céramique abondant et bien conservé y a été découvert. Outre ces trois incinérations, quatre autres tombes, d’organisation et de conception beaucoup plus aboutie, participent à cet ensemble funéraire. La tombe centrale peut être considérée comme fondatrice ; son ouverture couvre une surface de 13 m2. Deux tombes “ secondaires ”, réparties symétriquement autour de la précédente, possèdent des dimensions plus réduites. La dernière tombe, implantée au sud, est la plus modeste de l’ensemble. Ces quatre tombes se distinguent des trois premières par la grande diversité de leur mobilier. De nombreuses céramiques, mais surtout des vases et des chaudrons en bronze ainsi que des cistes, utilisées pour les libations lors des cérémonies religieuses, et des chenets y ont été découverts. La présence d’une colonnade périptère en bois peut correspondre soit au plan d’un simple édicule, soit à une colonnade ouverte ou encore à la structure porteuse d’un bâtiment entièrement clos qui servirait à protéger les sépultures. L’organisation spatiale de ces tombes est d’une grande régularité. L’alignement sur une façade et la colonnade, associé à la présence d’une haie régulière à l’aplomb des fosses et à l’absence de vestiges dans la partie orientale de l’enclos nous permettent d’envisager la mise en place de l’espace funéraire dans sa globalité.

La richesse du mobilier funéraire nous laisse entrevoir la place des individus inhumés au sein de la société gauloise. On citera pour exemple la présence d’un poêlon en bronze importé d’Italie du Nord. L’implantation de cet ensemble funéraire sur un point stratégique au sommet d’un plateau doit être le reflet d’une volonté. Visible de loin, il devait marquer de son empreinte le territoire de ce dignitaire gaulois.

Le plan de Raillencourt-Sainte-Olle, inédit dans le nord de la France, est à rapprocher de celui des imposantes tombes aristocratiques mises au jour dans les Ardennes, à Acy-Romance ou au Grand-Duché du Luxembourg, à Clémency, pour les plus significatives. Les quelques exemples de la vallée de la Somme correspondraient davantage aux dimensions des tombes secondaires présentes ici. Les études qui font suite à la fouille sont de différents ordres. Une équipe pluridisciplinaire a donc été mise en place afin de répondre aux besoins. Le mobilier métallique est traité à l’Institut de restauration et de recherches archéologiques et paléométallurgiques, à Compiègne. Le mobilier céramique fait l’objet d’un nettoyage et d’un remontage temporaire pour étude avant restauration. Les blocs osseux qui correspondent aux incinérations sont en cours d’étude par une équipe d’anthropologues. Les rares vestiges de faune sont étudiés au Centre de recherches archéologiques de la vallée de l’Oise. D’autres analyses, secondaires, et toutefois primordiales, comme l’anthracologie et la palynologie, ont été confiées au laboratoire d’archéobotanique du CNRS de Rennes.

Parallèlement, les observations portant sur la formation sédimentaire du comblement des tombes est en cours. L’analyse micromorphologique, associée à la taphonomie, permettra peut-être de comprendre comment la tombe a été mise en place et a été comblée. La découverte de sépultures aristocratiques laténiennes se place dans un contexte historique encore peu connu mais pourtant très intéressant. À quelques kilomètres, sur la commune de Mœuvres, au début du XXe s., fut découvert un charnier. La recherche actuelle voit dans ce fossé, contenant corps humains, armes et parures, daté de La Tène moyenne, l’exemple le plus septentrional d’un sanctuaire picard. On peut rappeler également l’existence du site fortifié d’Etrun (Nord) qui constitue un type de murus gallicus en vallée de l’Escaut. On connaît aussi quelques sites plus anciens, datés du Ve s. av. J.–C., dans les faubourgs de Cambrai. Le site appartiendrait, selon des travaux récents, à l’extrémité occidentale de la cité des Nerviens. Pourtant, les modes funéraires et la structuration de l’espace, que vient d’illustrer cette découverte, évoquent des éléments caractérisant les découvertes faites à l’ouest, en territoire atrébate et ambien. Les résultats de la fouille promettent donc d’aborder une problématique capitale de la Protohistoire régionale, c’est-à-dire les limites orientales du Belgium.