Pour répondre aux nouvelles exigences de la recherche archéologique, l'Inrap privilégie le recours raisonné à la détection géophysique. Cette méthode d'exploration du sous-sol offre un très large domaine d'application pour l'étude archéologique dans différents contextes opérationnels : prospection, diagnostic, fouilles.

Mis à jour le
22 janvier 2024

La géophysique a de nombreuses applications en archéologie. Elle peut être utilisée à différentes échelles, de la détection de vestiges archéologiques à la mise en contexte d’un site. Lors de la fouille, elle permet également d’aider à caractériser les niveaux archéologiques après décapage. La géophysique peut être mise en œuvre à différents stades de l’étude archéologique en fonction des problématiques scientifiques et des contraintes techniques.

Un solide dispositif et une expérience confirmée

L’Inrap est actuellement doté d’une unité de géophysique capable de réaliser des études en contexte archéologique, préventif comme programmé. Cette unité est constituée de 3 géophysiciens spécialisés en archéologie et de 19 agents formés à l’acquisition des données de terrain et répartis sur l’ensemble du territoire. L’institut possède son propre parc matériel ce qui lui permet de répondre efficacement aux différentes sollicitations.

L'institut a réalisé, depuis sa création, 413 études géophysiques dont 325 depuis 2015. La grande expérience de l’institut dans l’archéologie de terrain et dans l’acquisition de données géophysiques en lien avec les résultats des opérations (fouille ou diagnostic), lui permet d’avoir pleinement conscience des limites et des potentialités des différentes méthodes.

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Opérations géophysiques réalisées par la cellule géophysique de l’Inrap au 31 décembre 2023.

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G. Hulin, Inrap, janvier 2024.

Les différentes méthodes utilisées à l’Inrap

La méthode électrique

Cette méthode est fondée sur l’injection d’un courant électrique dans le sol. La différence de potentiel mesurée traduit la difficulté du courant à se propager et révèle les éventuelles anomalies de résistivité. Relativement simple à mettre en œuvre, cette méthode est particulièrement bien adaptée à la détection des vestiges en dur (murs, fondations…). Dans certains contextes, elle permet également de repérer les fossés et autres structures en creux de grande taille comme les grandes fosses.

La méthode magnétique

La mesure du champ magnétique terrestre et de ses composantes permet de mettre en évidence des contrastes d’aimantation pouvant traduire la présence de vestiges archéologiques. Cette méthode est rapide à mettre en œuvre et permet de couvrir de grandes surfaces. Elle est souvent utilisée pour repérer les vestiges en creux (fosses, fossés) et les structures ayant subies une chauffe (fours de potier, forges…).

La méthode radar

Il s’agit de la méthode la plus fine en termes de résolution spatiale. Elle est particulièrement bien adaptée à la recherche de structures bâties et en cas de forte stratification. Les revêtements en dur, tels qu’un dallage ou du bitume, n’affectent pas la mesure faisant de la méthode radar la méthode à préconiser en contexte urbain.

La méthode électromagnétique à basse fréquence

Comme son nom l’indique, la méthode électromagnétique est sensible à la fois aux propriétés électriques et aux propriétés magnétiques des sols. Elle est particulièrement bien adaptée à la caractérisation géomorphologique (recherche d’anciens chenaux de rivière notamment) et à la recherche des zones de forge sur surface décapée (mesure de la susceptibilité magnétique).

Recherche et développement

Voir le carnet de recherche dédié aux travaux de recherche et développement du pôle géophysique de l’Inrap et de ses partenaires : https://geophinrap.hypotheses.org/

Archaeological Geophysics Toolbox (AGT)

L’Inrap a créé en 2017 un module QGIS de traitement des données géophysiques à vocation archéologique intitulé Archaeological Geophysics Toolbox (AGT).

Par ce module de traitement de données, le réseau géophysique de l’Inrap dispose d’un outil simple et efficace permettant de traiter les mesures issues des prospections électriques, magnétiques  et électromagnétiques réalisées avec les appareils géophysiques que possède l’institut. Des traitements avancés sont en phase d’intégration et viendront compléter prochainement ce plugin.

Ce plugin opensource a été validé par QGIS.org. Il est directement téléchargeable à partir du logiciel QGIS dans son onglet “Extension” : https://plugins.qgis.org/plugins/AGT/

Liste des appareils gérés par AGT : Geoscan Research RM15 et RM85, Sensys MXPDA, Bartington Grad 601, Geonics EM31, Geophex GEM2.

Pour en savoir plus : https://geophinrap.hypotheses.org/plugin_qgis-agt

Traitement des données électriques avec AGT

Traitement des données électriques avec AGT.

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F.-X. Simon, Inrap, 2020

ArchEM

Le projet ArchEM porte sur la mise en œuvre des méthodes électromagnétiques basses fréquences pour la détection et la caractérisation des structures archéologiques. Ce projet, articulé autour de 4 axes, est particulièrement orienté vers les problématiques rencontrées en contexte d’archéologie préventive. 

Il s’agit de présenter à la communauté géophysique le potentiel des méthodes électromagnétiques basses fréquences pour l’archéologie mais également de sensibiliser la communauté archéologique à la diversité des problématiques pouvant être abordées, à travers l'utilisation de ces techniques encore assez peu courantes en prospection archéologique.

Les quatre axes de recherches portent sur :

  1. la caractérisation sur surface décapé,
  2. la cartographie des unités sédimentaires,
  3. la détection et caractérisation de vestiges en contextes volcaniques,
  4. la reconnaissance de sols et structures pour les niveaux paléolithiques.

Pour en savoir plus : https://geophinrap.hypotheses.org/archem

Carte de susceptibilité magnétique sur la villa gallo-romaine de Noyon « La Mare aux Canards » (60)

Carte de susceptibilité magnétique sur la villa gallo-romaine de Noyon « La Mare aux Canards » (60).

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Inrap

L'imagerie multispectrale

L’imagerie multispectrale permet d’offrir une vision nouvelle des sites archéologiques. En s’intéressant à des bandes spécifiques du spectre lumineux, du proche infrarouge et de l’ultraviolet, il est possible de fournir à l’archéologue des images complémentaires de ce qui peut être perçu par l'oeil humain.

L’idée de cette thématique de recherche repose sur l’utilisation de cette technique sur terrain décapé. Après le retrait de sols superficiels, les vestiges sont directement apparents et l’obtention d’images acquises par drone ou avec une perche peut apporter des informations sur les niveaux archéologiques en place. Corrélées avec des analyses pédologiques, géochimiques ou géophysiques, certaines signatures anthropiques pourraient ainsi être mises en avant rapidement et spatialisées à l’échelle de la fouille. On pense notamment aux phosphates qui indiquent la présence de stabulation, aux zones de chauffe (rubéfaction des sols) ou encore à la présence de micro-déchets ferreux qui sont autant d’indices souvent peu lisibles des activités artisanales et agraires conservées sur les sites. S’ajoutent à ces premiers indices des signatures encore inconnues qui sont certainement à découvrir par cette technique encore sous-exploitée en archéologie.

Pour en savoir plus : https://geophinrap.hypotheses.org/imagerie-multispectrale

Utilisation de la caméra multispectrale 6 bandes Pixinov–Spectra 610. Fouille paléolithique d’Ittenheim (67)

Utilisation de la caméra multispectrale 6 bandes Pixinov–Spectra 610. Fouille paléolithique d’Ittenheim (67).

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G. Hulin et F.-X. Simon, Inrap.

Bibliographie

HULIN (Guillaume). — L’application de la géophysique sur le canal Seine-Nord Europe. In : Traversée des territoires. Paris : Inrap, 2016, p. 101-105. (Archéopages, hors-série ; 4). DOI : 10.4000/archeopages.7929.

HULIN (Guillaume), JAGOU (Benjamin), DE MUYLDER (Marjolaine) collab., HENTON (Alain) collab., LAMOTTE (Didier) collab., LEFÈVRE (Philippe) collab., ROUSSEAU (Aurélie) collab. — Reconnaître et caractériser les zones de forge sur surface décapée. Apport de la géophysique à l’étude paléométallurgique. Archéopages 39, 2014, p. 92-99. DOI : 10.4000/archeopages.560.