Un gisement de « trésors »

« Tout ce qui est sous cette terre reviendra au jour. » Tel un démiurge muni d’une pelle, l’antiquaire dégage les ruines et exhume les « trésors » du passé. Page de garde du Novus Commentarius Locupletussimus de C. Valérius Catallus, J.A. Vulpius, Padoue, 1737. © Alain Schnapp

À la différence des monuments restés visibles et accessibles depuis leur construction –Stonehenge ou Carnac, l’acropole d’Athènes ou les thermes de Cluny –, l’essentiel des sites et des vestiges archéologiques que nous connaissons aujourd’hui ont été exhumés par hasard, au gré des travaux de creusement ou de terrassement qui marquent les villes et les campagnes en voie d’industrialisation.
La Vénus d’Arles, le groupe en marbre du Laocoon à Rome, l’ensemble du site de Pompéi et plus récemment le crâne de Néandertal ou la tombe celtique de Vix, sont parmi les plus connues de découvertes inattendues. Plutôt que de disparaître à jamais, saccagées ou démantelées, elles ont fort heureusement été portées à l’attention d’amateurs et d’érudits locaux. Si ces derniers ont eu le mérite d’étudier, de conserver et de faire connaître ces trouvailles, ils ne considéraient bien souvent le terrain de leur découverte que comme une simple concentration et accumulation de « belles pièces ». La présence d’éventuels édifices ou sépultures n’était pas ignorée, mais c’étaient avant tout les vestiges, statues de marbre, vases peints, bijoux précieux et autres offrandes funéraires, qui retenaient l’attention. Dans cette perspective, le site était perçu presque exclusivement comme un gisement d’où l’on pouvait extraire des pièces de valeur historique, esthétique et aussi, bien souvent, marchande.