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Mis à jour le
22 novembre 2023

Avec Laurent Nespoulous, archéologue, chargé de la direction du département d'études japonaises à l’Institut National des Langues et Civilisations Orientales (INALCO).

L’archéologie japonaise révèle un lointain passé fort original…

Le Japon possède actuellement bien plus d’archéologues que la France et l’ensemble des nations : il est intéressant de voir ce pays où la tradition semble très prégnante, accéder à cet éclairage, et ainsi, au travers de l’archéologie, de remodeler la manière dont il peut se représenter sa propre histoire.

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Figurine en terre cuite du Jômon récent (entre 4 400 et 3 200 ans environ), "dogū aux mains jointes" (site de Kazahari 1, département d'Aomori) - © musée de Korekawa / photo : Laurent Nespoulous

Vers 38 000 ans

Alors qu’il n’était pas encore un archipel, le Japon est conquis par Homo sapiens, il y a environ 38 000 ans. Ces petites communautés paléolithiques issues de Corée et de Sibérie, produisent de nombreux outils dans des obsidiennes, notamment issues des falaises de l’île Kôzu, un des plus anciens gisements exploités par l’Homme. Les volcans japonais sont déjà, durant cette époque, très actifs et leur dépôt de cendres sont des marqueurs bien datables pour les archéologues.

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Carte de la répartition des poteries à fond plat retrouvées au Japon il y a environ 5000 ans - © éditions Belin
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Vase du type "kaendoki", ("flammiforme"), du Jômon moyen (entre environ 5 500 et 4 400 ans), de provenance précise inconnue mais probablement d'un gisemement en amont du cour de la Shinano (département de Nagano) - © Collection du Musée d'Art de Cleveland

La culture Jômon, un paradoxe ?

Le Jômon constitue un grand tournant, une période très originale qui émerge voici 16 000 ans. Cette culture perdurera jusqu’à la première moitié du Ier millénaire avant notre ère. Dès ses phases très anciennes (ce que les archéologues dénomment la culture de Mikoshima), les communautés de chasseurs-collecteurs jômons inventent l’arc et les flèches.

Le Jômon a longtemps été jugé comme un paradoxe, sorte de société néolithique sans toutefois l’être. Le Néolithique se caractérise généralement par la sédentarité, l’agriculture, la poterie, et si les jômons ne sont en rien agriculteurs, ceux-ci sont déjà sédentaires et produisent de la céramique. Ils sont aussi, dès les 8e-7e millénaires, une société stockeuse, versée dans une économie de transformation : ils collectent d’importants volumes de glands, châtaignes et marrons qui, avant d’être conservés, sont longuement bouillis. La culture Jômon constitue donc une sorte de société néolithique non agraire, très originale à l’échelle de la planète.

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Maquette du site d'Itazuke et des ses rizières, un des premiers villages de paysans de l'archipel, Yayoi archaïque (IXe-VIIIe siècle de notre ère), nord-ouest de Kyūshū - © musée de la ville de Fukuoka / photo : Laurent Nespoulous

Le riz Yayoi

La culture Yayoi, au nord-est de Kyūshū, introduit l’agriculture et la riziculture inondée. Longtemps, les archéologues ont été partagés entre théories autochtones ou diffusionnistes, l'arrivée de nouvelles populations, ou de nouvelles techniques. Cette période voit surtout les inégalités sociales s'accroître par rapport à la période précédente (le Jômon). D’ailleurs, à la fin de la période Yayoi, au tournant de notre ère, le système semble imploser avec l’apparition d’une forte violence, l’émergence d’élites sociales dites "ostentatoires", la création de lointains réseaux d’échanges.

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Poterie conique du Jômon naissant trouvé sur le site d'Omotedate 1 (daté entre 15 700 et 13 200 ans) - © Musée départemental d'Aomori

Pour aller plus loin

Quelques références citées

Durée :
29 min
Année :
2023