Boulevard de la Corderie (Provence-Alpes-Côte d’Azur, Bouches-du-Rhône, Marseille)

Sous-titre

Rapport de fouille 2019

Numéro DAP
35
Image d'entête
DAP 35 | Marseille « Boulevard de la Corderie » (Bouches-du-Rhône)
Média
DAP 35 | Marseille « Boulevard de la Corderie » (Bouches-du-Rhône)
date expertise
septembre 2019
date achevement
juin 2019
Paragraphes

La fouille de la carrière de la Corderie a été réalisée en 2017 sur la rive sud du Vieux-Port à Marseille, à l’extérieur des murs de la cité grecque et romaine. Elle a permis de mettre au jour, sur plus de 1200 m2, une exploitation antique de calcaire qui a connu trois périodes successives d’exploitation, la première à la fin de l’époque grecque archaïque (fin du VIe et début du Ve s. avant notre ère), la seconde à l’époque hellénistique (IVe-IIIe s. avant notre ère) et la dernière durant la période romaine.

Cette opération nous a offert l’occasion, pour l’instant unique, d’étudier de façon extensive un des gisements antiques de calcaire dit « de Saint-Victor ». Cette roche, dont il existe plusieurs faciès ayant chacun ses spécificités[1], a constitué l’un des principaux matériaux de construction de la ville grecque, utilisé dans les monuments publics (remparts, chapiteaux) ou privés (murs, caniveaux, …) ainsi que pour la sculpture. La pierre exploitée dans la carrière de la Corderie est une veine particulière, mal adaptée aux élévations car sensible aux intempéries ; elle semble avoir servi à produire principalement des sarcophages et des dalles (vraisemblablement destinées à la confection de cistes funéraires). D’autres types de productions, comme par exemple des bases de pressoir, sont également attestées, soit par leur empreinte en négatif dans le rocher, soit par des blocs abandonnés sur place par les carriers.

Le déplacement progressif de l’activité extractive a entraîné le remblaiement rapide des fronts de taille grecs et leur « fossilisation » sous des milliers de mètres cube de déchets de taille, permettant ainsi la parfaite conservation des impacts et traces d’outils dans cette roche pourtant très tendre. Les outils traditionnels des carriers, le pic à l’extrémité pointue et l’escoude, dotée d’un tranchant transversal à l’axe du manche, tous deux à percussion lancée, servaient à détourer les blocs au moyen de tranchées périphériques, puis des coins métalliques, introduits sous l’arête frontale inférieure des blocs, permettaient de les désolidariser du socle rocheux. Ces techniques d’extraction classiques pour l’Antiquité sont demeurées les mêmes jusqu’à la période moderne, mais les outils utilisés durant la plus ancienne phase d’exploitation de la carrière de la Corderie présentent quelques spécificités. Ainsi, les empreintes de fers d’escoude qui ont pu être observées sont larges de 1,5 cm dans la carrière grecque des VIe-Ve s. avant notre ère et de 2,5 cm dans la partie exploitée aux IVe-IIIe s. avant notre ère. Ces dimensions inédites permettent d’enrichir pour ces périodes anciennes le corpus d’outils élaboré par Jean-Claude Bessac (Bessac, 2002). L’utilisation de coins métalliques, bien présente en Grèce même, dès le VIe s. avant notre ère, est ici également attestée pour la première fois en Méditerranée occidentale. Aucun exemplaire n’en a été retrouvé, mais il est possible, encore une fois à partir de leurs empreintes dans la roche, de restituer des coins cylindriques d’un diamètre de 3 à 5 cm, appointés à l’une de leurs extrémités et longs d’une vingtaine de centimètres. L’utilisation de ces « pointes » dans la roche très stratifiée de la carrière de la Corderie permettait, sans trop de difficultés, de détacher les blocs le long des joints de stratification.

Carrier en train de réaliser une saignée à l'escoude dans la carrière de calcaire coquillier de Rognes (Bouches-du-Rhône), milieu du XXe siècle. Document "Les amis du Patrimoine de Rognes".

À ces outils propres aux carriers, d’autres, destinés aux finitions, étaient également utilisés sur site comme le marteau-taillant, muni de deux tranchants droits, parallèles au manche et employé pour façonner et régulariser les parois des blocs, notamment celles des cuves de sarcophages.

La carrière archaïque ne trouve que très peu de parallèles dans le monde grec, où les exploitations de marbre ont généralement été l’objet de toutes les attentions.

L’ancienneté de cette exploitation, l’excellente conservation des fronts de taille, ainsi que leur grand intérêt scientifique et patrimonial, ont conduit, en janvier 2018, au classement au titre des monuments historiques d’une partie de cette carrière. La partie nord du site a été détruite par la construction de l’immeuble pour lequel la fouille préventive avait été prescrite, tandis que les vestiges situés au sud, conservés sur 735 m2 ont été préservés.

La conservation et la valorisation de ce site archéologique ont été au cœur de mobilisations des riverains et de nombreuses manifestations citoyennes ; elles ont constitué un des thèmes de la campagne des élections municipales en 2020 dont le maire actuel et son équipe se sont saisis. Début 2023, le sort de la partie conservée de la carrière est encore incertain : valorisation in situ et présentation au public ou remblaiement pour la protéger et valorisation dans le cadre du Musée d’Histoire de la ville ?

1

Le calcaire de la Corderie a pu bénéficier d’une étude géologique et géochimique poussée qui ouvre la voie à de fructueuses collaborations à venir entre géologues et archéologues marseillais (M. Fournier et al., 2022). La carrière a également fait l’objet d’une présentation lors d’une journée d’études du Centre Camille Jullian à Aix-en-Provence et d’un article de synthèse dans les actes de ces journées (Mellinand et al., 2020).

Sommaire

Volume 1 

I. Données administratives, techniques et scientifiques

II. Résultats

1. Présentation de l’opération

1.1. Le cadre technique
1.2. Zones et secteurs, enregistrement et méthodologie
1.3. Le cadre archéologique
1.4. Recherches en archives

2. Les carrières antiques

2.1. Introduction
2.2. La carrière archaïque
2.3. La carrière hellénistique : zones 5, 6 et 2
2.4. La carrière romaine

3. L’occupation moderne du site, description et interprétation des vestiges

3.1. Corderie et Ignorantins (XVIIIe s. )
3.2. La caserne (années 1810 – années 1970)

4. Conclusion

4.1. Carrières et carriers grecs
4.2. Outils et techniques
4.3. Carrières grecques et romaine, des gestions très différentes
4.4. Essais de restitution des volumes et quantité
4.5. Pistes de travail …
Bibliographie
Liste des illustrations

5. Études spécialisées

5.1. Le cadre géologique
5.2. Compétences des matériaux
5.3. Les mobiliers céramique d’époque grecque (et romaine) de la carrière antique du boulevard de la Corderie à Marseille
5.4. Quelques céramiques modernes du site de la Corderie
5.5. Les Remparts modernes de Marseille, Cours Pierre Puget, et Rue du Rempart


Volume 2

III. Inventaires techniques

Bibliographie / Ressources

Rapport de fouille

MELLINAND, Philippe (dir.). (2019). Marseille, Bouches-du-Rhône, Boulevard de la Corderie, Provence-Alpes-Côte d'Azur (Rapport de fouilles, 2 vol.). Nîmes : Inrap Midi-MED. https://dolia.inrap.fr/flora/ark:/64298/0159902.

Rapport de diagnostic

RICHIER, Anne, MICHAUDEL, Benjamin. (2016).Provence-Alpes-Côte d'Azur, Bouches-du-Rhône, Marseille, boulevard de la Corderie (Rapport de diagnostic, 1 vol.). Nîmes : Inrap MED. https://dolia.inrap.fr/flora/ark:/64298/0146055.

Publications citées dans l'introduction

FOURNIER, François, MELLINAND, Philippe, VILLENEUVE, Michel, MARIÉ, Lionel & KADRI, M. Nazim. (2022). Géologie et géochimie de la carrière de la Corderie (Marseille) : implications pour la caractérisation et la provenance des matériaux lapidaires antiques. Géologie de la France, 2, 11-27. http://geolfrance.brgm.fr/geologie-geochimie-carriere-corderie-marseille-implications-caracterisation-provenance-materiaux.

MELLINAND, Philippe, FRANGIN, Elsa, PAONE, Françoise, SAGETAT-BASSEUIL, Elsa, SCHERRER, Nadine, VACCA-GOUTOULLI, Mireille & VOYEZ, Christophe. (2020). La carrière de calcaire du boulevard de la Corderie à Marseille. Dans H. Aurigny et V. Gaggadis-Robin (éd.), Nouvelles recherches sur la sculpture en calcaire en Méditerranée : journée d’études du 19 juin 2018. Aix-en-Provence : Centre Camille Jullian (p. 43-52). https://hal.science/hal-03078423.

BESSAC, Jean-Claude. (2002). Les carrières du Bois des Lens (Gard). Gallia, 59, 29-51. DOI : 10.3406/galia.2002.3095.

Autres publications sur la Corderie

MELLINAND, Philippe & DELESTRE, Xavier. (2019). La carrière antique du boulevard de la Corderie à Marseille (Bouches-du-Rhône). Monumental2019-1, 28-29.

MELLINAND, Philippe. (2018). La carrière antique du boulevard de la Corderie. Dossiers d’Archéologie, 389, 28-29.

MELLINAND, Philippe. (2018). Les grecs ont laissé une carrière à Marseille », Archéologia, Hors-série 23, 54-57.

Citations

L'ensemble

MELLINAND, Philippe (dir.), CASTRUCCI, Colette, CHEVILLOT, Pascale, FRANGIN, Elsa, GANTÈS, Lucien-François, MICHAUDEL, Benjamin, PAONE, Françoise, SAGETAT-BASSEUIL, Elsa, SCHERRER, Nadine, SILLANO, Bernard, VACCA-GOUTOULLI, Mireillei, VILLENEUVE, Michel, VOYEZ, Christophe et coll. (2023).  Boulevard de la Corderie (Provence-Alpes-Côte d’Azur, Bouches-du-Rhône, Marseille) : rapport de fouille 2019 (2 vol.). Paris : Inrap. (Documents d’archéologie préventive ; 35). <https://doi.org/10.34692/e5cr-rs02>.

Le volume 1

MELLINAND, Philippe (dir.), CASTRUCCI, Colette, CHEVILLOT, Pascale, FRANGIN, Elsa, GANTÈS, Lucien-François, MICHAUDEL, Benjamin, PAONE, Françoise, SAGETAT-BASSEUIL, Elsa, SCHERRER, Nadine, SILLANO, Bernard, VACCA-GOUTOULLI, Mireillei, VILLENEUVE, Michel, VOYEZ, Christophe et coll. (2023).  Boulevard de la Corderie (Provence-Alpes-Côte d’Azur, Bouches-du-Rhône, Marseille) : rapport de fouille 2019. Vol. 1, Données administratives et résultats. Paris : Inrap. (Documents d’archéologie préventive ; 35). <https://doi.org/10.34692/e5cr-rs02>.

Le volume 2

MELLINAND, Philippe (dir.), CASTRUCCI, Colette, CHEVILLOT, Pascale, FRANGIN, Elsa, GANTÈS, Lucien-François, MICHAUDEL, Benjamin, PAONE, Françoise, SAGETAT-BASSEUIL, Elsa, SCHERRER, Nadine, SILLANO, Bernard, VACCA-GOUTOULLI, Mireillei, VILLENEUVE, Michel, VOYEZ, Christophe et coll. (2023).  Boulevard de la Corderie (Provence-Alpes-Côte d’Azur, Bouches-du-Rhône, Marseille) : rapport de fouille 2019. Vol. 2, Inventaires techniques. Paris : Inrap. (Documents d’archéologie préventive ; 35). <https://doi.org/10.34692/e5cr-rs02>.

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Boulevard de la Corderie à Marseille (Bouches-du-Rhône)
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