Éclats de flèche, outils de silex, dépôts de céramique, monnaie, habitats...les archéologues de l'Inrap ont mis au jour à Sainte-Anne-d’Auray de nombreux vestiges d'occupation humaine s'étalant du Mésolitique (environ 10 000 à 6 000 avant notre ère) au IIIe siècle de notre ère.

Dernière modification
28 janvier 2022

Depuis le 18 mai, une équipe de l’Inrap a repris son chantier de fouille rue de Pen Prat, à Sainte-Anne-d’Auray, préalablement à l'aménagement d'un lotissement par la société NEGOCIM. Prescrite par les services de l’État (Drac Bretagne), l’opération se développe sur 1,5 hectares. Elle fait suite à un diagnostic mené en 2019 au cours duquel des indices d’occupations protohistorique (âge du Bronze) et antique avaient été décelés. Confirmant ces premières données, les archéologues étudient les occupations humaines qui se sont succédé sur le site depuis la Préhistoire, les plus anciennes remontant au Mésolithique (environ 10 000 à 6 000 avant notre ère.). Parmi les vestiges découverts : des armatures de flèche et des silex du Mésolithique, un habitat du Néolithique final, des sépultures de l'âge du Bronze (2 200 à 1 400 avant notre ère) et les traces d'un habitat antique (Ier-IIIe siècle de notre ère).



Des indices remontant au Mésolithique 

Les traces d’occupation les plus anciennes remontent à la Préhistoire, et plus précisément au Mésolithique (environ 10 000 À 6 000 avant notre ère). Des éléments lithiques caractéristiques de cette période (éclats et petits outils en silex) ont été retrouvés « hors contexte », dans des niveaux ayant naturellement glissé (phénomène de colluvionnement). Les recherches ont aussi permis de mettre au jour un locus, c'est-à-dire une zone de concentration de vestiges de quelques mètres carrés, où plusieurs armatures de flèche ont été retrouvées. Ces indices attestent le passage ou la présence de l’homme dès le Mésolithique, dans un secteur propice aux installations humaines qui se développe au nord en direction d’une zone humide.

Sainte-Anne d'Auray

Pièces lithiques du mésolithique (8000-7000 av. J.-C.).

© S.Raudin, Inrap



Un habitat typique du Campaniforme (Néolithique final)

Concernant la Préhistoire récente, les archéologues ont détecté les restes ténus d’un bâtiment en forme d’amande, présentant un plan de 8,5 mètres par 5,5 mètres et orienté est/ouest. Construit en matériaux périssables de type terre et bois aujourd’hui disparus, l’édifice repose sur des poteaux très resserrés (l’empreinte des trous de poteaux est décelable dans le sol). Cette architecture est caractéristique des habitats du Campaniforme, une culture de la fin du Néolithique (environ 2 500 avant notre ère). Jusqu’à présent, seuls une douzaine de sites de ce genre ont été repérés en Bretagne ; un seul dans le Morbihan. La fouille a aussi livré quelques objets en céramique pour cette période, ainsi qu’un brassard d’archer et une pointe de flèche, retrouvés à quelques mètres du bâtiment.


Des sépultures de l’âge du Bronze 

Une autre découverte significative réside dans la mise au jour d’une nécropole remontant à l’âge du Bronze final et/ou moyen (de 1 600 à 800 avant notre ère). Une demi-douzaine d’architectures funéraires constituées de terre et de pierres, associées pour certaines à des coffrages, a d’ores et déjà été dégagée. Quelques indices supplémentaires permettent d’estimer à une dizaine le nombre de tombes présentes sur l’emprise de fouille. Les corps ne sont pas conservés en raison de l’acidité des terrains. Les archéologues sont à l’affût d’éventuels dépôts de céramiques ou de mobilier liés aux rituels funéraires qui permettraient d’affiner les datations de cette nécropole, en partie déstructurée par l’occupation antique postérieure.

Vue zénithale sur trois tombes de l'âge du Bronze avec coffrage en pierres (après nettoyage).

Vue zénithale sur trois tombes de l'âge du Bronze avec coffrage en pierres (après nettoyage).

©

Inrap



Les abords d’un habitat antique

Le site est ensuite réoccupé à l’époque gallo-romaine sur le tiers sud de la fouille. Trois fossés d’orientation est/ouest délimitent la zone antique ; ils correspondent à un axe de circulation de type chemin, longé par un fossé drainant qui a livré quelques incinérations (vases contenant des restes humains de crémation). Cette pratique funéraire reste courante durant l’Antiquité. Plusieurs constructions sur poteaux sont alignées le long des fossés ; elles sont entourées par un petit parcellaire dont le plan se dessine assez bien. Ces bâtiments pourraient matérialiser les espaces à vocation agricole (pars rustica) d’une villa gallo-romaine, dont la partie résidentielle (pars urbana) se situerait en dehors de l’emprise de fouille.

Une cellule de l’Inrap spécialisée dans la fouille des structures profondes est intervenue sur un puits, repéré à proximité d’un petit bâtiment dont il ne subsiste que de rares traces de fondation. Les éléments mobiliers (céramiques, terres cuites, verre, monnaie) retrouvés dans le puits témoignent de l’importance de l’établissement agricole qui s’est développé sur le site de Pen Prat entre le Ier et le IIIe siècle de notre ère.

Aménagement : NEGOCIM
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac Bretagne)
Recherche archéologique : Inrap
Directeur adjoint scientifique et technique : Michel Baillieu, Inrap
Responsable scientifique : Sébastien Raudin, Inrap