À Thuir, l'Inrap a mis au jour les vestiges de plusieurs occupations datées de la Préhistoire récente (environ 3500 avant J.-C.) à la période médiévale. Les périodes protohistoriques et antiques sont particulièrement bien illustrées.

Dernière modification
08 juillet 2022

De mai à août 2021, les archéologues de l'Inrap ont mené une fouille sur le site des Aybrines à Thuir, préalablement à la construction d’un lotissement à proximité de l’Hôpital, par le groupe immobilier Angelotti. Prescrites par le Service régional de l’archéologie (DRAC Occitanie), les recherches sont menées sur cinq secteurs, totalisant une surface de deux hectares.

Vue aérienne de l’emprise de fouille.

Vue aérienne de l’emprise de fouille.

© Cédric da Costa, Inrap



Un hameau protohistorique

Sur près de neuf mille mètres carrés, de nombreux vestiges ont été mises au jour, datés de l’âge du Fer. Plusieurs structures témoignent d’espaces d’habitations, avec des installations dédiées à l’approvisionnement en eau et au stockage des denrées, des meules, des foyers, ainsi que des trous de poteaux dont certains dessinent un bâtiment absidial. Des activités artisanales ont également été détectées par les archéologues, au travers d’outils en pierre (galets, molette, percuteur), de fusaïoles illustrant une activité de tissage, et d'un fond de loupe en fer issu d’une coulée de forge témoignant d’une activité métallurgique.

Ensemble de vases.

Ensemble de vases.

© Christophe Coeuret, Inrap

Le mobilier céramique découvert au cours de la fouille est composé de productions locales (vaisselle en céramique grise roussillonnaise, céramique non tournée), de vases de stockages (pithoi et jarres) et de céramiques importées (vaisselle attique, mortier, amphores étrusques, ibériques et massaliètes). Cet ensemble permet de dater cette occupation des VIe-Ve siècles avant J.-C.


Un réseau d’échange dynamique entre la Méditerranée et l’arrière-pays roussillonnais

Installé à l’extrémité occidentale de la plaine du Roussillon, au contact de la zone collinaire des Aspres, ce site s’insère dans un maillage d’occupations plus vastes, dont les études à venir permettront de rendre compte de l'étendue et de la complexité.
La présence de céramiques attiques à figures noires et de deux monnaies grecques est indicative de la circulation de biens de prestiges méditerranéens dans l’arrière-pays roussillonnais. L’occupation des Aybrines pourrait avoir constitué un territoire vivrier de l’oppidum de Teixonères, centre économique important dans le massif des Aspres situé à seulement deux kilomètres. À cette même période, l’oppidum intensifie ses échanges commerciaux avec Ruscino, chef-lieu du Roussillon, notamment entre 550 et 480/450 avant J.-C.


Une vaste villa romaine et ses thermes retrouvés

Les archéologues ont également mis au jour les vestiges d’une vaste villa (demeure aristocratique) et de bâtiments secondaires dédiés aux productions agricoles, dont l'exploitation débute au milieu du Ier siècle après J.-C et se poursuit jusqu’au dernier tiers du IVe siècle. Révélés partiellement en 2012 au cours d’une précédente fouille menée par l’Inrap, les vestiges sont lacunaires et arasés ; seuls quelques éléments conservés permettent d’entrevoir leur importance.
Du nord au sud, les restes des bâtiments romains ont pu être identifiés sur une longueur de 170 m et sur un minimum de 90 m dans le sens est-ouest ; ils permettent d’estimer la superficie de la villa et son domaine à un minimum de 1,5 hectare.

Par ailleurs, une partie des thermes a pu être fouillée ; l’ensemble conservé mesure 12 m de long sur 4 m de large et se compose de trois pièces : le praefurnium (pièce de chauffe), le caldarium (salle chaude avec un bassin nommé solium) et le tepidarium (salle tiède). L’étude de ces vestiges met en évidence plusieurs phases de réfection et de réaménagement.



Les dépendances agricoles : témoignage d’une continuité de l’occupation de l’Antiquité au Moyen Âge

Au nord de la villa, plusieurs structures de production et de stockage avaient été découvertes en 2012. Les archéologues avaient mis au jour un chai datant du Ier siècle, de plus de deux cents mètres carrés au sein duquel a pu être restitué l’emplacement de soixante-dix à quatre-vingt dolia : grandes cuves de stockage en terre cuite pouvant contenir entre cinq et six mille litres. La présence de poix sur certains fragments laisse présumer le stockage du vin. À une soixantaine de mètres au sud de ce bâtiment, les vestiges d’un pressoir ont été mis au jour, ainsi que des fours à chaux et un atelier de potier.

Vue de trois-quart des fours à chaux antiques.

Vue de trois-quart des fours à chaux antiques.

© Cédric da Costa, Inrap

En outre, six silos conservant de nombreuses graines carbonisées, ont complété ces découvertes ; l’appartenance probable de ces structures de stockage à une phase plus récente permet de supposer une continuité de l’occupation de ce secteur durant le Haut Moyen Âge.

Vue d’ensemble du site antique.

Vue d’ensemble du site antique.

© Cédric da Costa, Inrap

Aménagement : Groupe immobilier Angelotti
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac Occitanie)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Cédric da Costa, Inrap
Responsable de secteur : Ingrid Dunyach, Inrap
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