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Des traces d’occupation précolombienne parmi les plus anciennes à Saint-Barthélémy (Guadeloupe)
Sur l'île Saint-Barthélémy, les archéologues de l'Inrap ont mis au jour des rejets de préparation / consommation de coquillages associés à des foyers et à des éléments d’outillage lithique et sur corail, remontant à la période précéramique ou mésoindienne (vers 2000 avant J.-C.).
Située sur un cordon sableux littoral de la côte nord de l’île de Saint-Barthélemy, la fouille a permis aux archéologues d'étudier des traces d’occupation précolombienne parmi les plus anciennes jamais trouvées dans l’île. Ainsi, au moins deux niveaux de vestiges successifs, caractéristiques des populations amérindiennes de la période précéramique ou mésoindienne des Petites Antilles, ont été dégagés. Les résultats des datations ne sont pas encore disponibles mais les vestiges suggèrent un positionnement autour du second millénaire avant notre ère. Ils sont suivis de phases de fréquentation plus récentes, de la période céramique ou néoindienne, sans doute situées dans le second millénaire de notre ère. Quelques indices de fréquentation durant la période historique (coloniale) ont aussi été détectés en sommet de fouille.
Un cadre littoral particulier
La fouille, menée sur une épaisseur de dépôts d’environ 2,40 m, intégrait ce qui correspond à une partie de l’ancien cordon dunaire et de l’arrière-plage bordant la baie de Saint-Jean. Ce secteur se complétait autrefois très certainement par la présence, en arrière de la plage, d’une lagune reliée à la mer qui ne correspond plus, aujourd’hui, qu’à un étang isolé de la mer et en grande partie remblayé dans le cadre d’aménagements récents. La fouille de l’avant et du sommet du cordon dunaire ancien ainsi que d’une partie de l’arrière de la plage a révélé que ces contextes ont été fréquentés lors de plusieurs phases successives par les populations amérindiennes précolombiennes pour y mener des activités en lien avec les ressources marines, notamment la collecte de coquillages.
Des phases anciennes de l’occupation de Saint-Barthélemy
Les phases les plus anciennes se signalent par des rejets de préparation / consommation de coquillages associés à des structures foyères et à des éléments d’outillage lithique et sur corail. Quelques ensembles organisés d’outils lithiques et en coquillage et d’éléments de matières premières lithiques marquent le sommet du cordon et suggèrent la pratique de dépôts de stocks, peut-être pour une utilisation ultérieure lors du retour sur les lieux. En revanche, aucune structure renvoyant à un habitat pérenne n’a été observée. Dans l’état des connaissances sur ces périodes anciennes, ce type de vestiges semblerait témoigner de fréquentations ponctuelles mais récurrentes sur le temps long avec une répétition des mêmes activités, ici tournées vers les coquillages. Ces derniers sont essentiellement des bivalves – arches Arca zebra, palourdes Codakia orbicularis – et des strombes Aliger gigas. Ceux-ci devaient être présents en quantités au droit du site, puisque la baie de Saint-Jean offre des fonds sableux à herbiers, graviers et coraux morts propices à leur développement ce qui devait aussi être le cas, à l’époque, dans l’ancienne lagune présente en arrière du gisement. D’autres espèces viennent en complément, tels les chitons et nérites et des indices suggèrent également l’exploitation de crabes de terre et de langoustes marines.
Permanence de la fréquentation du cordon littoral
Pour les phases précolombiennes plus récentes, les coquilles retrouvées – essentiellement des strombes Aliger gigas et des burgos Cittarium pica – semblent surtout témoigner du décoquillage (extraction de l’animal hors de sa coquille) sur place, après collecte. La préparation et la consommation alimentaires ont, elles, pu se dérouler ailleurs, sur des sites d’habitat villageois peut-être en retrait du trait littoral.
Les quelques indices coloniaux trouvés, en sommet de stratigraphie, sur cette bande sableuse littorale sont trop ténus pour caractériser le type d’occupation mais confirment la permanence d’une fréquentation de ce secteur.
La fouille a donc permis d’aborder certains des témoins les plus anciens d’une présence amérindienne précéramique ou mésoindienne sur l’île de Saint-Barthélemy jusqu’alors uniquement documentés dans le cadre de diagnostics. Ces vestiges font écho à un ensemble de données plus étoffé dans certaines îles voisines des Petites Antilles, notamment à Saint-Martin. Sur cette île, les premières fréquentations sont documentées dès le milieu du 4e millénaire avant J.-C. et les nombreux gisements littoraux connus pour ces périodes révèlent également des fréquentations répétées sur un temps très long impliquant des activités spécifiques récurrentes en lien avec certaines ressources dont les coquillages.
Contrôle scientifique : service régional de l’archéologie - DAC Guadeloupe
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Nathalie Serrand, Inrap