La commune de Bellefontaine, située sur le littoral nord-ouest de la Martinique, dans la basse vallée de la rivière de Fond-Laillet, se dote d'une nouvelle centrale électrique qui sera bâtie sur d'anciennes plantations de canne à sucre exploitées pour la distillation du rhum.

Dernière modification
07 avril 2016

En 2009, le diagnostic, puis la fouille, réalisés en amont des travaux, ont permis de découvrir des vestiges archéologiques liés à deux phases distinctes de la présence humaine, l'une précolombienne, l'autre coloniale. Le site de Fond-Laillet est apparu aux archéologues comme un lieu complexe, témoignant d'une succession d'occupations liées à des activités horticoles et agricoles et proches d'un village littoral qui n'est pas encore identifié.

Les occupations amérindiennes

Les vestiges amérindiens d'époque précolombienne, dont les derniers remontent au Saladoïde moyen (VIIe-VIIIe siècle après J.-C.), recouvrent plusieurs horizons saladoïdes plus anciens. L'occupation amérindienne est attestée au débouché de la vallée de Fond-Laillet, dans un grand cône de déjection, sur lequel a divagué le lit de la rivière. La rivière s'est scindée en deux et la partie centrale du cône a été colmatée par des alluvions sur lesquelles se sont établies au fil du temps des populations amérindiennes. Les archéologues ont découvert un mobilier céramique bien conservé et peu fragmenté, des haches et des herminettes en roche polie utilisées pour l'abattage ou le jardinage, de nombreux charbons de bois, témoins d'activités horticole ou d'abattis qui permettaient de nourrir les familles implantées dans un village proche.

Les vestiges d'une distillerie

Les vestiges les plus récents sont des bâtiments en élévation appartenant à une distillerie créée au XIXe siècle qui a cessé son activité en 1962. La distillation du rhum était complétée par l'élevage ovin ou bovin. La distillerie se composait d'une maison, d'un logement de contremaître, d'entrepôts industriels et d'un magasin de commerce. Dès 1770, la carte de Moreau du Temple indiquait à cet emplacement des constructions dépendantes de l'ancienne sucrerie Lafaye située en amont dans la vallée. La présence d'une ménagerie témoigne d'un fermage ou d'une métairie. Les bâtiments du XIXe siècle donnent une bonne vision de l'occupation et des techniques de construction employées durant cette période. Quantité d'objets - vaisselles, outils agricoles... -, trouvés au sein de probables dépotoirs coloniaux derrière les habitations, fournissent des données importantes sur les productions locales - notamment la poterie - et les importations - céramique, faïence, verre, porcelaine, grès, etc.

Une fouille complexe mais riche d'enseignements

La commune de Bellefontaine s'étend aujourd'hui sur une superficie de 1 189 ha et compte 1 522 habitants. Le site de Fond-Laillet est bordé par des mornes issus des volcans des pitons du Carbet, constitués de coulées massives d'andésite porphyrique, de débris et d'empilements de nuées ardentes. À la complexité du terrain est venu s'ajouter un climat capricieux rendant les conditions de l'intervention archéologique malaisées. Mais l'apport de ces fouilles est capital pour l'histoire de la Martinique, particulièrement pour la période amérindienne, car elles permettent de reconstituer un paysage ancien et ses modifications et de connaître les zones périphériques des villages et leur occupation. Elles dévoilent aussi un pan d'archéologie coloniale qui permettra de mieux comprendre l'histoire économique de la région.