Une fouille de l'Inrap à Autun a permis de révéler une importante nécropole de l'Antiquité tardive. La diversité des sépultures et la richesse du mobilier découverts viennent enrichir considérablement la connaissance de l’histoire autunoise. Cette fouille est également d’une importance majeure pour la définition des pratiques funéraires de l’Antiquité tardive en Gaule romaine. 

Dernière modification
12 octobre 2021

Les archéologues de l’Inrap ont mené une fouille à Autun – l’antique Augustodunum, capitale du peuple éduen – sur prescription de l’État (Drac Bourgogne-Franche-Comté), en collaboration avec le service archéologique de la ville d’Autun. Réalisées dans le cadre d’un aménagement privé, les recherches portent sur une importante nécropole du quartier de Saint-Pierre-l’Estrier. Si ces recherches enrichissent considérablement la connaissance de l’histoire autunoise, elles sont aussi d’une importance majeure pour la définition des pratiques funéraires de l’Antiquité tardive en Gaule romaine.

Une grande nécropole de l’Antiquité tardive

Au cours des IIIe et IVe siècles, les trois principales nécropoles d’Autun sont en déclin au profit du nouvel ensemble funéraire, qui s’implante aux alentours des années 250 et semble devenir la principale nécropole de la ville durant l’Antiquité tardive. Les raisons de ce transfert restent incertaines ; fait nouveau, cette nécropole présente une grande diversité sociale.

L’apparition de la nécropole intervient à l’aube de la christianisation du monde romain mais précède l’implantation des églises fondées à ses abords, notamment celle de Saint-Pierre-l’Estrier, au cours des Ve-VIe siècles. Aujourd’hui, les vestiges exhumés ne confirment pas directement l’appartenance religieuse des défunts. La nécropole a pourtant dû accueillir les sépultures de la première communauté chrétienne d’Autun. En témoignent quelques inscriptions funéraires, dont la célèbre stèle de Pektorios : découverte au XIXe siècle à proximité du site, cette inscription du IVe siècle, constitue un des plus anciens documents du christianisme de Gaule.
 



Sarcophages de grès, cercueils de plomb

La fouille réalisée par l’Inrap est l’occasion d’étudier l’évolution des pratiques funéraires sur environ deux siècles. Plus de 230 sépultures ont été mises au jour et ont en effet une grande diversité dans leurs modes d’inhumation. Les archéologues ont ainsi identifié plusieurs mausolées et un édifice en bois ; une tombe en bâtière et un coffrage en tuiles rappelant certaines pratiques funéraires du Haut Empire ; mais aussi, plus remarquables, cinq sarcophages en grès et quinze cercueils en plomb… Généralement sans décors ni inscriptions, ils portent parfois des signes en « X » difficiles à interpréter. Ils viennent s’ajouter aux nombreux exemplaires déjà découverts à Autun, qui possède le plus grand ensemble de Gaule du Nord.

Un des sarcophages de grès contenait un cercueil en plomb, qui a fait l’objet d’une attention particulière.  Un espace clos a été aménagé sur le chantier, accompagné d’un protocole sanitaire strict. Equipés de masques et de combinaisons intégrales, pour se prémunir contre toutes formes de contamination, un anthropologue, un paléo-épidémiologiste, un carpologue, un archéologue en charge du mobilier, une restauratrice, deux spécialistes de la photogrammétrie et des tissus ont procédé à l’ouverture du cercueil puis à la fouille de la sépulture. L’ensemble de ces manipulations a été filmé et documenté. Un microscope, installé à proximité immédiate, a permis l’identification rapide de fils d’or, vestiges ténus d’une étoffe précieuse. Toutefois le cercueil n’était pas étanche. Les archéo-anthropologues y ont malgré tout étudié un squelette adulte très bien conservé.



Une aristocratie proche de Rome

Certaines tombes se caractérisent par des objets extrêmement rares.
Le plus imposant des sarcophages contenait un ensemble d’objets exceptionnels en Gaule romaine : tout d’abord un ensemble d’épingles en ambre, ainsi qu’un anneau en or finement ciselé et une bague en or sertie d’un grenat. D’autres tombes ont livré des épingles et anneaux en jais ou encore des boucles d’oreille en or. L’étude de certaines sépultures a révélé la présence d’étoffes tissées de fils d’or et, probablement, de la pourpre, colorant extrait d’un coquillage de Méditerranée.

L’objet le plus exceptionnel est un vase diatrète, dont on ne compte à ce jour qu’une dizaine d’exemplaires complets dans le monde antique. Summum de l’art verrier romain, cet objet en verre réticulé porte une inscription au-dessus de ses motifs décoratifs : “Vivas feliciter” (Vis en félicité). Il est réservé à d’éminentes figures, sans doute proches du pouvoir impérial. Complet, bien que fragmenté, il fera l’objet d’une restauration minutieuse.

Autun 18

Vue du vase diatrète dans le sarcophage

© Bérénice Bétend-Desgranges, Inrap



L’ensemble de ces éléments atteste la présence de représentants de la haute aristocratie d’Augustodunum dans cette nécropole. Les nouvelles découvertes archéologiques corroborent les sources antiques. Les élites éduennes, proches de l’empereur Constantin (306-337) sont ainsi évoquées dans les Panégyriques latins ou le Laudes domini, considéré comme le premier poème chrétien de la Gaule romaine.

Aménagement : Privé
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac Bourgogne-Franche-Comté)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Carole Fossurier, Inrap