À  Grandchamp-des-Fontaines et Treillères, l'Inrap fouille une station de transmission de l’armée allemande datée de la Seconde Guerre mondiale, une opportunité d'étudier un type d'installation encore très mal connu du Mur de l’Atlantique.

Chronique de site
Dernière modification
25 août 2022

Dans le cadre de l’aménagement de la ZAC de la Belle Étoile sur les communes de Grandchamp-des-Fontaines et Treillères, les archéologues de l’Inrap ont réalisé une fouille archéologique, entre mars et juin 2021, sur une station de transmission de l’armée allemande datée de la Seconde Guerre mondiale. Financé par la Communauté de Communes Erdre et Gesvres, ce projet constitue pour les scientifiques une opportunité, sans précédent dans la région, d’explorer ce type d’installation. Éléments constitutifs du Mur de l’Atlantique, ces sites de détection et de radio-navigation sont encore mal connus et englobent des infrastructures diverses et variées, tant d’un point de vue technologique que fonctionnel. Leur étude participe par ailleurs au développement de l’archéologie des conflits récents observé ces dernières années sur l’ensemble du territoire national.

 

Première étape : un contexte historique révélé par le travail d’archive

La recherche documentaire réalisée préalablement à la fouille archéologique indique la présence des troupes allemandes sur la commune dès octobre 1940, et l’occupation des terrains soumis à projet à partir de mars 1941. S’il est peu fait mention de la station de Grandchamp-des-Fontaines jusqu’à la fin de la guerre, un courrier en date de janvier 1945 signale toutefois la présence sur site des troupes américaines qui occuperont les installations allemandes. Leur présence sera effective jusqu’à la libération de la Poche de Saint-Nazaire.

Les clichés d’époque donnent également un aperçu du centre de transmission. Deux grandes antennes montées sur mâts métalliques et tenues par des haubans sont disposées sur le site tandis que plusieurs baraquements en bois sont construits pour le logement du personnel et l’installation du matériel technique. Un transformateur protégé par un abri en béton et mâchefer complète le dispositif.

Un site témoin de l’implantation de l’armée allemande

La station qui s’étend sur environ 2 hectares est composée d’une voie d’accès, d’un transformateur électrique toujours en élévation et de son réseau de distribution, d’une série d’enclos palissadés ou fossoyés et de plusieurs constructions sur fondations de pierre, de béton ou sur poteaux. Une quinzaine de fosses-dépotoir situées à l’extérieur des installations militaires ont par ailleurs été dégagées au nord du site. L’entrée du camp, protégée par un poste de garde et une guérite ouvre sur un enclos palissadé situé au centre du projet. D’une superficie d’environ 2800 m², il contient au moins trois bâtiments sur poteaux. L’un d’entre eux, dont le plan a pu être entièrement observé, a une superficie de 100 m². Les données d’archives associées aux observations de terrain permettent d’interpréter cette construction comme étant le local de transmission.  Un premier enclos fossoyé vient s’appuyer sur son angle sud-est. Partiellement observé, celui-ci à une superficie minimum de 1600 m². Il ceinture une construction sur fondations de pierre orientée Est/Ouest d’une superficie d’au moins 800 m². Cette construction est a priori antérieure à l’occupation militaire et partiellement remployée par l’armée allemande, sans doute à des fins logistiques.

Le second enclos fossoyé de 1200 m² est situé au nord-est de l’emprise. Ouvert sur l’enclos palissadé, il ceinture un baraquement sur poteaux de 350 m² raccordé à un réseau d’assainissement. Cet équipement, absent des autres enclos, semble être destiné du logement des troupes.

Le dernier enclos au nord-ouest du projet s’aligne sur l’enclos précédent. De taille plus modeste (375 m²), il est également aménagé d’une construction sur poteaux (175 m²) dont la fonction n’a pu être précisée. Une dernière construction fondée sur du béton (élévation en parpaing de mâchefer ?) et partiellement observée en limite du projet indique une extension du site au sud de l’emprise fouillée.

De nombreux objets, témoins de la présence des troupes américaines

L’essentiel du mobilier archéologique est issu de la quinzaine de fosses-dépotoir repérées au nord de la fouille. Il s’agit d’effets militaires (équipements, armement, lampe-torche), de produits d’hygiène ou pharmaceutiques (mousse à raser, lotion après-rasage, compresses de gaze, flacons divers), mais également d’objets de la vie quotidienne (vaisselle de table, bouteille d’alcool et de soda). Une première analyse du corpus attribue ces dépotoirs à la phase américaine du site, le mobilier allemand étant quasi inexistant.

Dépollution pyrotechnique : un protocole adapté à la fouille d’un site militaire

La fouille de ce site militaire de la Seconde Guerre mondiale a nécessité la présence de la société Bérengier Dépollution en assistance du décapage archéologique. L’objectif était d’évaluer le risque pyrotechnique, de détecter d’éventuels engins de guerre et de déterminer les mesures à prendre en cas de découverte de ce type de vestiges sensibles.

Appel à témoignages

En complément de l’étude archéologique du site de la Belle Étoile, une enquête orale est conduite auprès des habitants des communes de Grandchamp-des-Fontaines et de Treillières. Celle-ci a pour but de collecter de nouvelles informations sur la période, de compléter les données déjà compilées mais également d’appréhender et de documenter le regard de la population sur ce patrimoine récent.
Les équipes de l’Inrap seront donc à l’écoute de toute information ou témoignage qui pourra abonder le travail d’archives et de fouille déjà engagé, afin d’enrichir la phase d’étude qui débute à l’issue de l’opération archéologique. Toutes informations ou propositions de rencontre ou d’entretien téléphonique pourront être adressées à l’adresse suivante : antoine.le-boulaire [at] inrap.fr

Aménagement : Communauté de communes Erdre et Gesvres
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac Pays de la Loire)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Antoine Le Boulaire, Inrap