La première fouille par l'Inrap du château de Caen a eu lieu en 2005, avant la construction des salles du Rempart. Entre 2011 et 2015, plusieurs fouilles programmées ont permis ensuite d'étudier ce grand édifice construit au milieu du XIIe siècle . En juillet 2021 et 2022, une nouvelle opération archéologique permet d'explorer un appentis, un chantier de fouille à découvrir à l’occasion du Banquet fantastique, fête médiévale organisée au cœur du château, complétée par de nombreuses animations, le mardi 26 juillet 2022.

Dernière modification
09 août 2022

 fouille préventive (2005)

Dans le cadre du programme de mise en valeur du château de Caen lancé par la ville au début des années 2000, une opération d’archéologie préventive a été menée par l'Inrap à l’emplacement des « salles du rempart ».
Trois forges ont été fouillées. Succédant à un premier atelier, la forge la plus importante est construite au XIVe siècle, probablement après le début de la guerre de Cent Ans. Elle mesure 160 m², soit près de cinq fois la surface de la première forge. Lorsque la guerre se termine, à la fin du XVe siècle, une troisième forge aux dimensions plus classiques (30 m²) prend le relais. Au début du XVIe siècle, la grande forge est transformée en écurie prestigieuse ; les murs sont recouverts d’enduits, partiellement peints selon un motif en quinconce intercalant un monogramme et un dessin de mors de chevaux. À côté de ces ateliers, une maison avec cave est construite au XIVe siècle. Elle réutilise un mur en pierre calcaire d’un édifice antérieur qui a fait l’objet d’une fouille programmée entre 2011 et 2014.

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Vue générale de la fouille de 2005 avec au centre la grande forge.

© Mathias Dupuis, Inrap


La fouille programmée (2011-2014)

Au XIIe siècle, un espace de circulation de huit mètres de large est aménagé le long de la courtine ouest. Puis, à la fin du siècle, probablement sous Henri II Plantagenêt, un grand édifice mesurant plus de 300 m² est construit contre l’enceinte, ce qui en fait l’un des bâtiments les plus imposants du château avec la salle de l’Échiquier. À l’est, le mur de façade comprend une grande entrée centrale. À l’ouest, le mur s’adosse au rempart et est conservé sur plus de 4,50 m de hauteur. Il s’agit d’un édifice sur deux niveaux avec un étage bas de 90 m² et 2,80 m sous plafond. Quatre grands plots maçonnés, régulièrement espacés, permettent de supporter la toiture réalisée majoritairement en ardoises. L’édifice est doté d’un bas-côté au sud, avec un pavage extérieur en calcaire permettant de guider les eaux de pluie vers l’intérieur du bâtiment où un caniveau en pierre les conduit vers l’ouest et les fortifications. Cet aménagement ne devait pas servir seulement à évacuer les eaux de pluie, mais également à les recueillir, peut-être dans une citerne.


L’étude de la courtine nord-est (2014-2015)

Après la portion nord-ouest en 2005, le rempart nord-est est la deuxième section de l’enceinte du château à avoir bénéficié d’une étude puis d’une restauration. Tout comme la première section, ce rempart conserve une importante part du mur d’origine (XIe-XIIe siècle). Il se caractérise par des contreforts et un soubassement à chanfrein, le tout installé sur un talus au bord d’un fossé. Au XIVou XVe siècle, le rempart est épaissi sur les deux tiers de sa hauteur et son parapet est certainement refait. À hauteur du contre-mur, une ou deux canonnières sont installées pour défendre l’accès à la barbacane. La prison ducale toute proche, installée au XIe ou XIIe siècle, se trouve de ce fait accolée contre le rempart. Après diverses reprises ponctuelles entre le Moyen Âge et la Révolution, le parapet est entièrement reconstruit pour y installer des créneaux de fusillade au cours du XIXe siècle. Puis, la création de la caserne Lefebvre à la fin du même siècle entraîne la destruction de
l’extrémité nord du rempart.
 

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Étude de bâti sur la courtine nord-est.

© Florian Bonhomme, Inrap


L’étude du donjon (2016)

Une deuxième phase du programme de restauration et de mise en valeur du château a débuté en 2016, portant en partie sur le donjon. Ce dernier comprend des éléments du XIe siècle, avec une tour-porche, la tour maîtresse construite au XIIe siècle, une chemise
rectangulaire édifiée au XIIIe siècle abritant elle-même diverses constructions. L’ensemble a été fouillé par Michel de Boüard entre 1956 et 1966, puis a fait l’objet de restaurations.
La mission archéologique de 2016 consacrée au donjon comprend une étude documentaire reprenant les documents de fouilles de Michel de Boüard, une étude de bâti préliminaire visant principalement à identifier les maçonneries d’origine, et enfin quelques sondages. Ces derniers permettront de retrouver des vestiges encore enfouis à ce jour et de localiser les niveaux archéologiques en place. L’objectif est de présenter à la fin de l’année un bilan des connaissances sur le donjon, élément , élément essentiel constituant le cœur résidentiel et politique du château.

2018, l’étude du Vieux-Palais

En 2018, une nouvelle tranche d’aménagement du château de Caen a conduit à entamer l’étude du secteur dit du Vieux-Palais, situé entre la salle de l’Échiquier et le donjon. Selon Michel de Boüard, qui a fouillé dans les années 1960, il s’agirait de la partie résidentielle du château de Guillaume le Conquérant (XIe siècle) divisée en au moins trois secteurs : la grande salle ducale (ou aula) (bât. A), la partie résidentielle privée (dite camera) et ses annexes (bât. B) et une chapelle (ou capella), probablement dédiée à saint Georges (bât. C). Comme pour le donjon étudié en 2016, la mission archéologique de 2018* comprend une étude documentaire des archives de Michel de Boüard (1962-1967), une étude des maçonneries encore visibles et quelques sondages. L’objectif est de compléter les données anciennes, en intégrant de nouvelles approches archéologiques et des technologies innovantes : photogrammétrie, drone, scanner 3D, étude chimique des pâtes céramiques ou des mortiers, utilisation d’un système d’information géographique (SIG). Ce dernier outil permettra à terme de restituer des vues 3D du château de Caen à différentes époques.

 

Un chemin le long des remparts jusqu’au milieu du XIIe siècle

Au XIe et jusqu'au milieu du XIIe siècle, le terrain est faiblement occupé sauf une bande d'un peu plus de 7 m le long des remparts, où le chemin est soigneusement aménagé. La circulation se fait directement sur le terrain en place. Lorsque ce dernier présentait des creux, on note des recharges régulières en argile, en gravillons ou en éclats de calcaire, voire même la mise en place de portions dallées en calcaire.

C'est aux abords de ces passages qu'à été mise au jour une pierre en position horizontale et peu usée présentant un graffiti de jeu de la triple enceinte ou marelle. C'est un rare exemple de vestige de jeu en place au XIIe siècle. Ce jeu se compose de trois carrés emboîtés, reliés par quatre médianes qui s'arrêtent sur le périmètre du plus petit carré. La partie se joue avec neuf pions et deux joueurs ; le gagnant est le premier à aligner trois jetons sur les points d'intersections du diagramme.

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Vue du chemin avec au premier plan une pierre graffitée avec le jeu de la marelle.

© Bénédicte Guillot, Inrap

 

L'édifice du XIIe siècle

Au milieu du XIIe siècle, le secteur va être totalement remanié avec la construction d'un grand édifice par Henri II Plantagenêt, roi d'Angleterre et duc de Normandie. Cet édifice a été dégagé lors de la fouille entre 2011 et 2014. Il possède un plan rectangulaire avec une surface interne de près de 300m2, ce qui en fait l'un des bâtiments les plus imposants du château.

À l'est, en direction de la salle de l'Échiquier, le mur de façade comprend en son centre une grande entrée de 2.20 m de large. Cet édifice s'étendait sur deux niveaux.

 

Un appentis au sud

La fouille de 2022 poursuit l'étude d'une construction accolée au sud de la grande salle. Large de 3.50 m seulement elle mesure plus de 20 m de long et peut être interprétée comme un appentis en lien avec l'édifice. Les murs sont construits en calcaires et mortier coquillé. Une première entrée se trouve dans le pignon est, à l'angle avec le mur sud. deux autres portes ont été mises en évidence dans le mur gouttereau sud. Elle sont soigneusement aménagée. L'existence de ces ouvertures laisse penser que l'annexe possédait plusieurs espaces cloisonnés.

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Plan de l'angle nors-ouest de la fortification avec les découvertes de 2005 à 2014 et l'emprise de la fouille programmée de 2021-2022

© Bénédicte Guillot, Inrap

 

Le mobilier

La fouille de la grande salle et de son appentis a livré un abondant mobilier de la vie quotidienne. Des fragments de céramique, comprenant des pichets à vins et des pots à beurre ont été mis au jour. En 2021, la découverte d’éléments de décor cassés lors de la récupération des matériaux de l’édifice et de nouveaux boulets en pierre complète la série déjà très fournie de vestiges relatifs à la guerre de Cent Ans.

On peut également signaler de nombreuses boucles, des grelots, des dés à coudre, un sifflet en bronze, un chapelet, une possible broche/enseigne de pèlerinage et près d’une vingtaine de carreaux d’arbalètes. Dans les remblais du XVIe siècle, un fragment de statuette représentant une tête avec des traces de peinture a également été mis au jour.

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Tête de statuette en pierre et médaille de pèlerinage

© Serge Le Maho

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