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Brèves du Bronze : des ossements de baleines de l’âge du Bronze ancien sur les côtes de la Manche
À l'occasion de la saison scientifique et culturelle de l'Inrap, des archéologues racontent des fouilles et des objets de l'âge du Bronze qui les ont marqués.
Les vestiges du milieu marin sont fréquents sur les sites de l’âge du Bronze ancien du littoral de la Manche. L’essentiel des restes alimentaires sont trouvés sous forme de dépôts de coquillages (moules et coques principalement). À l’âge du Bronze final, ces dépôts alimentaires seront beaucoup plus importants. En revanche, les restes de poisson sont rares, témoignant de conditions de conservation difficiles, ou d’une pratique de la pêche en mer peu développée, même si des pêcheries d’estran sont reconnues. Le bouillage du sel est également avéré dès le Bronze ancien sur la côte du Calvados.
Dans ce cadre, la présence d’ossements de grand cétacé apparait comme originale. Trois sites présentent des restes de ce type, dans le remplissage de fossés d’enceinte à vocation domestique, tous situés à moins de 10 km du rivage : à Blainville-sur-Mer (Ghesquière 2019) un fragment non identifié porte des traces de rubéfaction, dans l’enceinte d’Anisy (Guérin, étude en cours) plusieurs grands fragments correspondent à des côtes ou des mandibules (?), enfin à Étaples-sur-Mer, un fragment d’os de grand cétacé est trouvé dans une enceinte circulaire du Bronze ancien (Lorin 2019).

Fragments d’ossements de grand cétacé découverts dans le fossé de l’enceinte de l’âge du Bronze ancien d’Anisy, Chemin de Colomby (fouille L. Guérin, Inrap).
© E. Ghesquière, Inrap
Ces éléments ne sous-entendent pas une pêche à la baleine qui a peu de chance d’avoir été pratiquée à cette période. Il s’agit plus sûrement du dépeçage d’animaux échoués qui profitaient à une ou plusieurs communautés. De tels échouages adviennent aujourd’hui encore, au moins une fois par an, sur les côtes de la Manche. L’état des animaux varie si le cétacé vient de mourir ou pas, et si sa viande est encore comestible. Si une partie de la viande était prélevée à des fins alimentaires, l’épaisse couche de graisse de ces gros animaux était également recherchée et pouvait être utilisée pour de multiples usages, dont l’éclairage. La présence d’ossements dans l’espace domestique pourrait signaler des fonctions non directement liées à l’alimentation, mais plutôt à la fabrication d’objets ou d’éléments spectaculaires. Plus tard, au cours de l’Antiquité, les Romains utiliseront certains de ces ossements pour fabriquer des « tabourets » avec les grandes vertèbres ou réaliser de la tabletterie.
Emmanuel Ghesquière, Inrap
GHESQUIERE E., dir., 2019 – Blainville-sur-Orne « ZAC Terres d’Avenir » zones 1A et 1B Calvados. Un enclos elliptique de l’âge du Bronze ancien, RFO de fouille archéologique Inrap, mars 2019, 231 p.
LORIN Y. 2019 – Nord - Pas-de-Calais, Étaples-sur-Mer, ZAC du « Domaine du Chemin des Prés » Rapport de fouille, volume 8, fouille d’un enclos circulaire atypique du Bronze ancien-moyen. RFO de fouille archéologique Inrap, mai 2019, 210 p.