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La découverte d’un quartier gallo-romain de Melun (Seine-et-Marne)
L’Inrap fouille dans la cour de l’ancienne École Normale d’Institutrices construite entre 1878 et 1880, suite à un diagnostic mené par le Service Départemental d'Archéologie de Seine-et-Marne (SDASM) et préalablement au projet d’aménagement d’un futur collège. Murs, puits, caves, petits objets … Autant de traces du passé qui racontent le quotidien des habitants d'un quartier de Metlosedum à l’époque romaine et que le public sera invité à découvrir lors des Journées européennes de l’archéologie les 13 et 14 juin prochains.
La place de Metlosedum au sein de la cité des Sénons
L’opération porte sur une parcelle d’environ 3500 m² située dans un quartier de la ville antique de Melun qui portait alors le nom de Metlosedum, localisée à un carrefour d’itinéraires terrestres et fluviaux.
Située à une quarantaine de kilomètres au sud-est de Paris, l’agglomération de Melun s’est développée dans un méandre de la Seine, de part et d’autre du cours d’eau, entre les plateaux de Brie et du Gâtinais. Durant l’Antiquité, Metlosedum dont l’arrière-pays est fertile et riche en ressources, est une ville intégrée à la cité - au sens de territoire civique - des Sénons, peuple dont la capitale était Sens. Cette cité était elle-même rattachée à la province de Gaule lyonnaise créée sous le règne de l’empereur romain Auguste.
Metlosedum se trouvait alors à l’extrémité nord-ouest du territoire des Sénons, non loin des limites avec les cités voisines des Meldes (autours de Meaux), des Parisii (autour de Paris) et des Carnutes (autour de Chartres et Orléans). Entre le Ier siècle avant J.-C. et le IIIe s., la ville se développe essentiellement sur l’île Saint-Étienne et la rive gauche de la Seine.

Vue-drone de la fouille de Melun (Metlosedum), juin 2025.
© Hamid AZMOUN, Inrap

Vue-drone de la fouille de Melun (Metlosedum), juin 2025.
© Hamid AZMOUN, Inrap

Vue-drone de la fouille de Melun (Metlosedum), juin 2025.
© Hamid AZMOUN, Inrap
L’implantation du site dans la ville antique
Le site s’insère dans un grand îlot urbain localisé dans la partie occidentale de la ville antique, à l’angle d’une rue orientée est-ouest, le decumanus, qui se trouve sous l’actuelle rue de Belle Ombre, au nord, et d’une rue orientée nord-sud, le cardo, dont le tracé est repris par la rue de Dammarie à l’est. À l’ouest, passait une deuxième rue nord-sud, le cardo qui n’est pas conservé dans la trame viaire actuelle. Un tronçon de ce cardo a été mis au jour sur la fouille de la rue de Belle Ombre tandis que deux autres tronçons de ce cardo avaient déjà été repérés lors de précédentes opérations de fouilles préventives.

Une possible domus
Deux principaux secteurs bâtis ont été découverts. À l’ouest, un vaste corps de bâtiment rectangulaire orienté nord-sud bordé par le cardo s’étend sur une superficie d’au moins 700 m². Ses maçonneries ont pour une très large part été récupérées dès l’Antiquité et l’essentiel de son plan apparaît sous la forme de tranchées de récupération. Toutefois, quelques tronçons des semelles de fondation en pierre liées au mortier de chaux subsistent ponctuellement. Les limites ouest et est du bâtiment sont connues et dessinent un édifice de 28 m de long, les limites nord et sud étant hors emprise. Le plan du bâtiment montre plusieurs pièces s’articulant autour d’un grand espace central, probablement une cour qui s’ouvre sur le cardo.

Vue-drone d'une cave qui était intégrée au bâtiment, conservée sur 2,20 m de profondeur.
© Hamid AZMOUN, Inrap
Au nord-ouest, une cave qui était intégrée au bâtiment a été récemment mise au jour. Elle a été partiellement endommagée par l’installation d’un puits perdu ayant fonctionné avec l’établissement scolaire. Conservée sur 2,20 m de profondeur, cette cave présente une mise en œuvre de belle qualité avec des murs montés au mortier de chaux. Le mur oriental est percé d’un soupirail tandis que deux petites niches quadrangulaires sont aménagées dans les murs nord et sud. On accédait à la cave grâce à un escalier en double quart tournant comprenant trois volées de marches et deux paliers. Un petit tambour de colonne lisse pourvu d’une mortaise sur son lit d’attente et d’une sur son lit de pose a été retrouvé sur le premier palier.

Vue de la cave au nord-ouest de l'emprise.
© Hamid AZMOUN, Inrap

Mur oriental de la cave monté au mortier de chaux et percé d’un soupirail.
© Hamid AZMOUN, Inrap
De nombreux trous de poteaux avec pierres de calage indiquent possiblement une architecture mixte combinant murs en dur et en matériaux périssables ou, autre hypothèse, l’existence d’un bâtiment plus tardif ayant succédé au bâtiment ouest.
À une quarantaine de mètres vers l’est, un deuxième espace bâti d’environ 600 m² a pu être cerné. Il est pour l’heure difficile d’en restituer un plan précis car les vestiges ont fortement été impactés par les réseaux souterrains contemporains qui nous privent d’une lecture immédiate de l’ensemble. On discerne un ou deux corps de bâtiments dont l’orientation nord-sud diffère légèrement du bâtiment ouest. Dans la partie centrale se trouve une pièce excavée, toujours en cours de fouille, traversée par d’anciennes conduites d’eaux usées. La découverte d’une structure de combustion quadrangulaire formée de tegulae posées à plat, peut-être un foyer domestique, voisine d’une canalisation avec conduite en terre cuite témoignent de la présence possible d’une cuisine à cet endroit.

Structure de combustion quadrangulaire formée de tegulae posées à plat.
© Hamid AZMOUN, Inrap
Plusieurs séquences de niveaux d’occupation et de sols sont également perceptibles sur ce secteur.
Les deux secteurs bâtis sont séparés par des espaces ouverts au sein desquels se placent de nombreuses structures en creux, fosses de stockage et petites caves non maçonnées ainsi que des puits cuvelés avec des parements de moellons calcaires bruts. Au total, huit puits antiques ont été découverts.7

Puits cuvelé. Huit ont été découverts dans l'emprise.
© Hamid AZMOUN, Inrap
Aucune activité artisanale spécifique n’a pour l’instant été mise en évidence à ce stade de la fouille. Le plan de l’édifice ouest évoque une domus, à l’image de celle fouillée en 2008 à Melun au 3 place Lucien-Auvert. Les vestiges construits dans le secteur est rappellent aussi ceux d’une domus.
Étant donné le caractère partiel du plan, on ne peut être certains que les secteurs bâtis à l’ouest et à l’est appartiennent à deux bâtiments distincts ou s’ils s’intègrent dans un même complexe qui serait alors de grandes dimensions (plus de 2000 m²).
Des tranchées abris de la Seconde Guerre mondiale
Par ailleurs, un réseau de tranchées disposées en lignes brisées se rapportent à un ouvrage défensif mis en place dans la cour de l’école au cours de la Seconde Guerre mondiale. Ces tranchées abris étaient destinées à protéger les populations civiles contre les attaques aériennes. Un premier tronçon de tranchée a fait l’objet d’un sondage dans lequel a été retrouvé un exemplaire de casque Adrian, probablement un modèle 1926.

Un site ouvert au public pendant les Journées européennes de l'archéologie (JEA)
Ce chantier de fouilles, exceptionnellement ouvert le samedi 14 juin dans le cadre des JEA de 10h à 17h, offre l’opportunité au public de rencontrer les archéologues du Service municipal de l'archéologie, du SDASM et de l’Inrap et de découvrir ainsi le patrimoine antique et l’avancée des connaissances de Melun, grâce aux recherches archéologiques préventives.

Vue de la fouille de Melun (Metlosedum), à l'est, juin 2025.
© Hamid AZMOUN, Inrap
Contrôle scientifique et technique : DRAC Île-de-France (service régional de l’archéologie)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Steve Glisoni, Inrap