Vous êtes ici
Le village carolingien de Saint-Don à Riom (Puy-de-Dôme)
À Riom, l'Inrap a mis au jour les vestiges d'un village carolingien. Les maisons à demi enterrées, les outils, les séquelles d'activité et les traumatismes identifiés sur les squelettes évoquent une population de statut médiocre, esclaves ou serfs, au service d'un seigneur.
Trois parcelles situées dans la périphérie est de Riom, ont été fouillées par une équipe d’archéologues de l’Inrap, sur prescription de l’État (Drac Auvergne - Rhône-Alpes), en préalable à la construction de pavillons résidentiels. Ce secteur, qui porte le nom de la chapelle romane voisine, est occupé pendant l’Antiquité par un établissement agricole auquel succède un village du premier Moyen Âge. Installé sur la partie basses d’un versant, les niveaux du début du Moyen-Age sont particulièrement bien conservés. La richesse des données stratigraphiques permet de suivre de manière fine les transformations incessantes et complexes de cet espace entre le VIe et le XIIe siècles, une période encore mal connue.
Un espace en constante mutation
Des changements interviennent environ toutes les quatre-cinq générations. Après l’abandon des bâtiments antiques, le percement de grands fossés va redécouper une première fois cet espace. Puis un nouveau parcellaire est créé à l’époque mérovingienne. Un bâtiment est alors construit dans un enclos palissadé. Les fossés mérovingiens sont ensuite comblés et le secteur est alors occupé par des silos à grains et des fosses. Dans le même temps, une aire funéraire se développe à l’ouest.
Vers 900, une exploitation agricole essentiellement constituée de deux bâtiments autour d’une cour, est implantée. Un siècle plus tard, le secteur redevient presque exclusivement une zone d’ensilage. Enfin, au cours du XIIe siècle, quatre nouveaux bâtiments sont construits ; les plus récents sont contemporains de la chapelle de Saint-Don nouvellement construite.
Des maisons enterrées
Les fouilles ont montré que les habitants de Saint-Don vivaient dans des maisons enterrées sur plus d’un mètre de profondeur. Les foyers conservés à l’intérieur des bâtiments excluent la possibilité de simples caves surmontées d’un étage. On pénétrait dans les maisons par une rampe couverte. En bas de celle-ci, une porte munie d’une serrure ouvrait sur l’intérieur. Les murs étaient constitués de solins en pierre surmontés de parois en terre crue, probablement de type pisé pour certaines d’entre elles. La charpente reposait sur les murs ou sur des poteaux et supportait une couverture végétale. Un système de drain souterrain permettait d’évacuer l’eau infiltrée dans le sol vers l’extérieur. Les différentes périodes de construction, Ve, Xe et XIIe siècles, permettent de suivre les constantes et l’évolution de l’architecture de ces maisons.
Vue d’ensemble de la fouille de Riom (3) avec un bâtiment enterré du Xe siècle au premier plan.
Fabrice Gauthier, Inrap
Vue d’un bâtiment mérovingien en cours de fouille.
Marie.-Jo Henry, Inrap
Les vivants et les morts
Tout comme son environnement, l’aire funéraire, datée de 650-900, se transforme. A l’origine, les tombes sont régulièrement espacées, évoquant un type de cimetière bien connue du début du Moyen Âge : « les cimetières en rangées », avant d’évoluer vers un cimetière paroissial, plus anarchique d’apparence. On suit ainsi le déplacement progressif de l’espace funéraire vers le sud-est, se rapprochant d’une église (début du VIIIe siècle ?), dont un fragment de vitrail-mosaïque a été découvert. La grande majorité des tombes sont des « coffrages ». Les planches sont assemblées dans la fosse et calées avec quelques blocs ; de simples planches constituent le couvercle. De rares coffres mixtes associent parois de bois avec un muret par exemple ou des tuiles romaines. D’autres tombes, dites « en pleine terre », encore plus rares, sont de simples fosses dans lesquelles le corps est directement recouvert par de la terre.
Fouille du cimetière.
Alain Boissy, Inrap
Une population en souffrance
L’étude des squelettes montre un profil démographique très médiocre. De mauvaises conditions sanitaires et vraisemblablement alimentaires peuvent être déduites de l’évolution des maladies, de celle de la stature des individus et des courbes de mortalité. Par ailleurs les séquelles d’activités et la typologie des traumatismes évoquent une population de travailleurs, homme comme femmes : des agriculteurs et/ou des artisans. C’est également ce que suggèrent les outils découverts sur le site. L’étude anthropologique fait apparaître de mauvaises conditions de vie. Ceci nous conduit à envisager pour ces gens un statut médiocre, celui d’esclaves ou de serfs au service d’un seigneur.
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac Auvergne – Rhône-Alpes)
Recherche archéologique : Fabrice Gauthier, Inrap
Étude anthropologique : Véronique Gallien, Inrap