À Marseille, une équipe de l'Inrap a fouillé trois fosses d'époque grecque (IVe siècle avant J.-C.) qui ont révélé, sur plusieurs niveaux, une importante quantité de résidus d'un atelier de potier, de vaisselles et d'amphores massaliètes.

Dernière modification
27 octobre 2021

À l’automne 2021, les archéologues de l’Inrap ont procédé à une fouille, prescrite par le Service régional de l’archéologie (Drac PACA), au 19 rue Barbusse /rue Jean-Baptiste Pétré à Marseille. Cette opération d’archéologie préventive, qui fait suite à un diagnostic réalisé en février 2021 par l’Inrap, s’inscrit dans le cadre du projet de réhabilitation d’un immeuble de bureaux dans une cour de 360 m² ; la fouille est prescrite sur une superficie de 61 m².

Un secteur très remanié

Ce secteur de la ville a été très largement remanié lors des importants travaux de terrassement réalisés dans la seconde moitié du XIXe siècle, notamment pour le percement de la rue Colbert. L’emprise de la fouille était alors occupée par le couvent des Prêcheurs, construit au XVIe siècle, et dont ne subsistent plus que l’église, placée sous le vocable de Saint-Cannat en 1802, et le clocher. Une grande partie des vestiges et niveaux archéologiques ont été affectés par ces grands travaux et le diagnostic archéologique, a montré qu’une fosse d’époque grecque était toujours présente dans l’emprise des aménagements. Aux environs immédiats de cet aménagement, les marnes naturelles sont partout affleurantes. C’est cette fosse, simplement entrevue lors du diagnostic, qui fait l’objet d’une opération de fouille préventive menée par l’Inrap.

Trois fosses d’époque grecque – IV°siècle avant J.-C.

La fosse à l’origine de la prescription de fouille, large de 2,50 m et profonde de 3,30 m, présente des parois verticales. Elle a été observée sur une longueur de 5,30 m, son plan est tronqué au sud. Le comblement de ce vaste creusement est riche en charbons de bois et nodules d’argile rubéfiée ; plusieurs fragments de fours et surcuits de céramiques à pâte claire et à pâte micacée (amphores et mortiers) montrent que cette fosse a été utilisée pour rejeter des résidus d’un atelier de potiers qui devait se situer à proximité. La fouille exhaustive de ce creusement met en évidence la succession de niveau de rejets.  L’analyse des mobiliers prélevés permettra de comprendre s’il peut être mis en relation avec l’artisanat céramique ou l’extraction d’argile. En effet, dans ce secteur périphérique de la ville grecque, plusieurs autres fosses, vastes et profondes, ont déjà été observées (sites de la Bourse, de l’Alcazar, et école de la rue Barbusse) et sont considérées comme des carrières d’argile destinées à la construction, notamment à la fabrication d’adobes, briques d’argile crue largement utilisées dans les bâtiments de Marseille grecque.

Une seconde fosse, aux parois verticales, de plan similaire de 1,80 x 3,20 et profonde de 2,70 m a été fouillée à proximité de la première fosse contenant des rejets. Celle-ci est en partie comblée par des amphores massaliètes disposées entières, selon un mode de dépôt accusant un fort pendage en direction du sud. La fosse est scellée par un sédiment contenant également des surcuits et fragments d’argile rubéfiée.

La dernière fosse, conservée seulement sur une profondeur de 60 cm et comblée par un sédiment homogène ayant livré quelques éléments céramiques en cours d’analyse, a été très endommagée par la construction de l’immeuble moderne, son plan n’est pas caractérisé et sa datation grecque reste à vérifier.

Un comblement riche en céramiques

La fouille a permis de recueillir une grande quantité de mobilier céramique, vaisselles et amphores, datant de façon homogène de la seconde moitié du IVe siècle avant J.-C. et illustrant la diversité des productions massaliètes. Les formes identifiées correspondent principalement à des plats, des coupes ou des cruches de fabrication locale. Les mortiers et les amphores comportent aussi une pâte riche en fragments de mica, typique des ateliers de potiers marseillais. Certaines de ces dernières sont timbrées de lettres grecques accroissant le corpus du sud de la France. Quelques tessons de céramique non tournée gauloise ainsi que des importations attiques complètent le lot. Des fragments d’amphores étrusques, phénico-puniques et ibériques, correspondent à des vases plus anciens se trouvent probablement en position résiduelle.

Promoteur : Arkadéa
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac PACA)
Recherches archéologiques : Inrap
Responsables scientifiques : Elsa Sagetat-Basseuil, Inrap – Philippe Mellinand, Inrap