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Paysage ancien et industrie moderne à Gap (Hautes-Alpes)
À Gap, une équipe de l'Inrap a fouillé l'ancien lit de la rivière de la Luye (XIe-XIIe siècles), ainsi qu'une série de sept fours et un bâtiment de l’Époque moderne. La présence de l’ancien lit de la Luye semble avoir conditionné toutes ces constructions.
Les archéologues de l’Inrap ont réalisé une fouille à l’emplacement du nouvel abattoir de Gap, chemin du Moulin du pré. Menée sur prescription du Service régional de l’archéologie (Drac PACA) à la suite de diagnostics archéologiques ayant montré la présence de vestiges archéologiques à l’emplacement des futures constructions, l’opération a été financée par la Ville de Gap. Durant cette intervention, un décapage archéologique a été mené sur une emprise de 3000 m2 et a permis le dégagement de vestiges concentrés sur la frange orientale du site.
Étude du paléoenviroment
Au nord-est, les investigations archéologiques se sont concentrées sur l’évolution du paysage, notamment les fluctuations du cours de la rivière de la Luye. D’après les premières observations qui restent à confirmer, ces modifications sont intervenues entre les XIe -XIIe siècles et la fin de la période médiévale, avant l’édification du moulin du Pré. À cette période, ce cours d’eau, situé à l’ouest de son lit actuel, courait sur le site, entaillant les marnes noires formées au fond de l’océan durant la période du Jurassique (il y a 200 millions d’années) et les dépôts sédimentaires laissés par le retrait du glacier de la Durance il y a 20 000 ans. Ces dynamiques du paysage permettent de comprendre les implantations et activités humaines dont la présence de l’eau est un des préalables.
Découverte de fours à chaux modernes
Au sud-est du site, une série de sept fours, datés de l’époque moderne, a été mise au jour ; ces structures de cuisson se rattachent à la production de chaux pour quatre d’entre-elles et de briquettes de terre cuite dans les trois autres cas.
À l’échelle du site, l’homme a su tirer avantage du milieu en ouvrant les bouches des fours directement dans la pente facilitant ainsi le travail. La disponibilité et la proximité des matières premières (pierres calcaires charriées par la rivière), bois, eau, éclairent, en partie, sur le choix du lieu aux regards des coûts de production.
L’ensemble de ces fours a été fouillé et trois d’entre eux ont fait l’objet de prélèvements en vue de datations archéomagnétiques ; les rares fragments de céramique découverts lors de leur fouille se rattachent à la période moderne (XVIIe ou XVIIIe siècle), mais il n’est pas certain que toutes les structures soient contemporaines entre elles.
Les quatre fours ayant servi à la production de chaux se rattachent au type classique du four de plan circulaire à foyer surélevé. Trois d’entre-eux présentent d’intenses traces de rubéfaction et des comblements de destruction à la base desquels sont préservées des lentilles de chaux et de charbon. Le quatrième semble ne pas avoir servi et pourrait avoir été abandonné avant d’avoir été utilisé. Les trois autres fours sont de plan rectangulaire, plus complexe, avec un alandier voûté et une chambre de chauffe divisée en deux couloirs par un muret axial.
L’un des alandiers contenait de nombreuses briquettes entières et surcuites qui semblent correspondre à la production de ces fours. Cinq de ces briquettes de terre cuite présentent des marques estampées au moyen d’un moule en bois sur lesquelles apparaissent des chiffres romains, des lettres, ainsi que des étoiles et croix pattées.
Une structure bâtie
Un bâtiment situé immédiatement à l’est des fours ne présente pas de lien physique
avec ces derniers et leur relation n’est pas établie, mais il semble s’inscrire dans la même
fourchette chronologique, entre le XVIIe s. et le XVIIIe s. En l’état actuel des recherches, cette contemporanéité permet de poser l’hypothèse d’un lien entre la fonction du bâtiment et des fours (stockage ?). Les murs périmétraux bâtis aux moyen de gros galets et de blocs calcaires ne semblent comporter que très ponctuellement un liant de chaux maigre. Aucun niveau de sol n’était conservé à l’intérieur de cette construction. Là encore, la présence de l’ancien lit de la Luye semble avoir conditionné la technique constructive du bâtiment. Cette construction quadrangulaire, d’environ 68 m², possèdent en effet de puissantes fondations en lien avec la compressibilité d’un terrain particulièrement humide.
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie, Drac PACA
Recherche : Inrap
Responsable scientifique : Philippe Mellinand, Inrap
Responsable de secteur : Laure Cissé, Inrap