A Rancenay, Doubs, les archéologues de l'Inrap ont mené des fouilles archéologiques à la base du flanc nord-ouest du Mont Rapin. Dominant de quelques mètres le cours du Doubs, l'espace étudié, d'une superficie de près de 1 hectare, livre de nombreux vestiges témoignant d'une présence humaine ancienne.

Dernière modification
10 mai 2016

Si quelques éclats de silex attestent une fréquentation dès le Paléolithique supérieur (vers 10 000 ans avant notre ère), l'intérêt scientifique majeur du site réside dans les habitats médiévaux mis au jour. La fouille de plus de 650 structures en creux permet de restituer le cadre de vie et les activités des habitants se succédant là durant une partie du haut Moyen Âge (VIe-VIIIe siècles) et le Moyen Âge central (Xe-XIIe siècles).

L'occupation du haut Moyen Âge

À la fois centres de production agricole, résidences et lieux d'activités artisanales, les fermes du haut Moyen Âge s'organisent en un hameau allongé. Hors d'atteinte des crues, l'habitat implanté sur le rebord de terrasse n'empiète pas sur l'espace réduit du coteau cultivable. Si les bâtiments principaux, construits de plain-pied sur la base d'une architecture associant ossatures de bois, murs de terre et couvertures végétales, ne laissent que des traces ténues, de nombreuses constructions associées, semi-excavées, caractérisent la période. Annexes de l'habitat, ces « fonds de cabane » semblent réservés à des activités particulières. Parfois évoquée, la confection de fromage dans ces édifices partiellement enterrés, garantissant une forte humidité et des variations de température limitées, reste difficile à prouver. Présentant les mêmes exigences climatiques, une activité de tissage semble plus probable. Observée en fond de fosse, la présence répétée de deux creusements permet de restituer autant de métiers à tisser verticaux.

Du pain

Perceptible dans les reliefs de repas et les fragments de récipients de poterie recueillis lors de la fouille des zones de dépotoir, les pratiques alimentaires peuvent également se lire au travers de structures spécifiques. Quatre fours culinaires témoignent ainsi de la cuisson du pain, aliment essentiel choisi comme symbole central de la religion chrétienne s'imposant alors. Si deux petits fours implantés au coeur même de l'habitat renvoient à des productions satisfaisant une demande domestique, une structure plus vaste, vraisemblablement postérieure, s'établit en marge de l'occupation.
Deux fours associés, desservis par une aire de travail unique, paraissent correspondre à une installation collective répondant aux besoins de la communauté. Ce dispositif collectif mis en place sur la base d'un principe d'économie et de sécurité (incendie), préfigure aussi le système du four banal imposé par les seigneurs, pour leur seul profit, à la fin du Moyen Âge central.

L'occupation du Moyen Âge central

Marquée par une multitude de trous de poteau dessinant les plans de bâtiments toujours édifiés à partir de matériaux périssables, l'occupation du Moyen Âge central semble être concentrée.
Élément déterminant la structure du village moderne, la cluse séparant les reliefs du Bois de la Côte et du Mont Rapin semble constituer dès lors un axe de circulation attractif. Sans renier leur fonction agricole, attestée par la mise en évidence de greniers surélevés ou de fosses-silo assurant la conservation des grains par leur stockage souterrain, les édifices accueillent des activités nouvelles. Si les travaux de métallurgie détectés (parois de fours, scories...) peuvent répondre à des besoins locaux, une activité paraît directement dépendre du trafic canalisé par la cluse.
Plus que les quelques monnaies d'argent recueillies, la découverte de petits poids de balance et d'une pierre de touche permettant de tester les alliages et métaux précieux atteste la présence d'un commerçant particulièrement avisé, sinon d'un changeur.