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Un atelier métallurgique du Second âge du Fer à Combaillaux (Hérault)
À Combaillaux, l'Inrap a mis au jour un atelier spécialisé dans la réduction primaire de minerai de fer datant du Second âge du Fer (-375 / -195), une découverte importante dans l’histoire de la métallurgie du fer en Gaule du Sud où aucun lieu de réduction n'était attesté avant le IIe siècle avant notre ère.
En 2017, préalablement à la construction d’un lotissement et dans le cadre d’une prescription de l’État (DRAC Occitanie), l’Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap) a réalisé une fouille au lieu-dit Les Érables sur la commune de Combaillaux. Les recherches, menées par Guilhem Sanchez, ont permis de mettre au jour les vestiges d’un atelier de réduction de minerai de fer protohistorique datant des Ve-IIIe siècle avant notre ère, le plus ancien découvert à ce jour en Gaule du Sud.
Relevé orthophotographique des structures protohistoriques (entourées d’un liseré blanc) dont trois bas fourneaux reconnaissables à leur forme circulaire.
© G. Sanchez et S. Laurent, Inrap
Une occupation jusqu'alors inconnue
Le village de Combaillaux est implanté sur une des collines karstiques qui ponctuent l'espace entre le littoral méditerranéen et les causses de l'arrière-pays héraultais. Il domine deux vallons relativement encaissés au sein desquels s’écoulent les jours de pluie les affluents sporadiques de la Mosson, dont le cours d’eau se jette quelques kilomètres plus loin dans le Lez. Hormis quelques indices d’occupation des hauteurs environnantes au Néolithique, cette localité n’avait jusqu’alors jamais livré de vestiges archéologiques antérieurs à la fortification du village médiéval au XIIe siècle. Au cours de la fouille archéologique, la découverte de foyers à pierres chauffées, de trous de poteaux, de fragments de vases en céramique et d’outils en silex, a permis dans un premier temps d’attester une occupation dès le Néolithique (premiers agriculteurs), mais les recherches allaient révéler des vestiges autrement plus singuliers.
Un atelier métallurgique inédit
En bordure de la route des Combes, l'Inrap a mis au jour un ensemble d’aménagements lié à la réduction du minerai de fer. Il forme un véritable atelier organisé autour de trois bas-fourneaux marquant le cœur de l’activité. D’après l’organisation générale des vestiges, la typologie des structures de combustion et l’analyse des déchets qu’elles ont générés, tout porte à croire que l’atelier de Combaillaux était uniquement spécialisé dans la réduction primaire de minerai de fer. En considérant l’extension maximale du crassier et des zones de dépotoir qui se répandent au fond de la combe, l’emprise de cette activité métallurgique atteint une surface minimale d’environ 700 m². La taille des fours, la nature du système technique et des vestiges découverts, permet d’estimer la production de fer entre 100 et 120 kg par réduction et par four. Selon ces données et à partir de la masse du ferrier, entre 250 et 300 opérations de réduction auraient été effectuées en totalité. Une activité métallurgique inédite pour la période et pour la région qui a perduré de nombreuses années en fonction de l’apport de matière première ; a minima 5 ans pour une production intensive d’une réduction par semaine voire 150 ans si celle-ci n’était réalisée que deux fois par an.
Jusqu’à ce jour, aucun lieu de réduction du fer n’était connu dans le Midi de la France et en Méditerranée avant le IIe siècle avant notre ère, et ce, bien que les objets en fer apparaissent dès le VIIe siècle avant notre ère. Cette lacune était jusqu’alors interprétée par la puissance des échanges en cours, ce matériau pouvant être importé de Gaule septentrionale ou de Méditerranée puis mis en forme sur place.
Des perspectives de filiation
Les analyses des scories en laboratoire ont permis d'obtenir une signature chimique propre au fer produit à Combaillaux. Grâce à ces résultats, il sera désormais possible de suivre sa diffusion sur des sites consommateurs au travers de l'analyse des éléments chimiques et des traces des scories de réduction éventuellement présentes dans les objets en fer.
Des échanges de connaissances et de techniques avec la Méditerranée ?
Si aujourd’hui la découverte des aménagements métallurgiques de Combaillaux vient combler une lacune dans l’histoire de la métallurgie du fer en Gaule du Sud, la présence significative de tessons d’amphores étrusques et massaliètes invite à s’interroger sur ses liens avec les différentes cultures méditerranéennes. La présence grecque et étrusque véhicule certainement des innovations techniques en Gaule. Cependant quel rôle ces sociétés ont-elles vraiment joué ? Puis quel a été celui de la Gaule dans la propagation et la banalisation du fer dans les cultures limitrophes ? Encore autant de questions que le site de Combaillaux vient alimenter.
Un patrimoine mis en valeur
La Mairie de Combaillaux travaille en coopération avec l’Inrap pour valoriser les découvertes et le patrimoine archéologique remarquable de son territoire. Des panneaux d’informations seront implantés sur le site de puisage de l’eau qui alimentait le village durant ces derniers siècles, à proximité de la zone de fouilles. Les Combaillaulencs, comme les visiteurs, pourront ainsi prendre connaissance des résultats des recherches menées sur l’histoire du village et sa fontaine, route des Combes.
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie Drac Occitanie
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Guilhem Sanchez (Inrap)
Collaborateurs scientifiques : Rejane Roure , Directrice de l'UMR5140-ASM - CNRS, Maître de conférences - Université Paul Valéry ; Gaspard Pagès, Chargé de Recherches – CNRS UMR7041 ArScAn – équipe GAMA