La Sole d'Happlincourt, une enceinte du Néolithique moyen II à à Saint-Christ-Briost et Villers-Carbonnel , Somme.

Dernière modification
21 mars 2017

La fouille, qui fait suite à un diagnostic mené entre avril et juin 2009 par Didier Lamotte (Inrap), est située sur les communes de Villers-Carbonnel, au lieu-dit Sole d'Happlincourt, et de Saint-Christ-Briost, au lieu-dit Bois de Briost. La surface fouillée se divise donc en deux secteurs, le premier sur une surface de 3 000 m2 et le second sur une surface de 49 000 m2.

Une occupation néolithique

Le site de la Sole d'Happlincourt est implanté sur une légère pente à proximité immédiate de la confluence entre la Somme et l'Omignon. Le décapage, sur une surface de 4,5 hectares, a permis la découverte d'une occupation néolithique comprenant plusieurs fossés d'enceinte, palissadés ou non. L'occupation se développe sur deux types de substrats : dans la partie méridionale, les structures ont été creusées dans la craie, alors que dans la moitié septentrionale, le substrat est constitué de limons sableux. Ces différences ont eu un impact direct sur les modalités de creusement et d'aménagement des structures, ainsi que sur leur état de conservation et sur celui du mobilier. L'emprise d'un peu plus de 450 m de long pour environ 100 m de large a livré, au nord et au sud mais sans solution de continuité, des tronçons de deux palissades et de fossés interrompus.

Une construction en deux étapes

L'organisation spatiale, la morphologie des creusements des fossés et des poteaux, les relations stratigraphiques ainsi que la présence ou non de mobilier archéologique dans les remplissages, permettent d'envisager deux grandes étapes de construction.
La première ne comprenait qu'une palissade enserrant une surface que l'on peut estimer à 6 hectares. La seconde correspond à un agrandissement important du site, dont la surface estimée est d'au moins 20 hectares, et était entourée d'une palissade doublée à l'extérieur de tronçons de fossés. Sur une partie de l'emprise au nord-est du décapage, la seconde étape semble reprendre en partie le tracé de la première palissade. Lors de la première phase d'occupation, les coupes montrent que la palissade a fait l'objet de plusieurs réaménagements observables au travers de recreusements. Au cours de cette étape, les poteaux de forme circulaire suggèrent l'emploi de troncs d'arbres entiers. En revanche, les empreintes semi-circulaires observées dans la palissade de la seconde phase montrent que les troncs ont ici été refendus. La quantité nettement plus élevée de troncs nécessaires la réalisation de la première extension est sans doute l'un des éléments explicatifs du changement de mode de construction des palissades. À l'intérieur de cet espace enclos, de nombreuses fosses ont été retrouvées ainsi qu'un four dont l'usage domestique ne peut, pour le moment, être totalement affirmé.

Un mobilier abondant

Un abondant mobilier archéologique a été retrouvé dans la palissade « interne » ainsi que dans les tronçons de fossés et dans les fosses. La céramique comprend de nombreux vases à col, des bouteilles, des disques en terre cuite, et des vases supports décorés d'incisions. L'abondant matériel lithique, réalisé essentiellement sur le silex local, a été utilisé pour produire des éclats de forme plutôt allongée destinés à la confection de grattoirs, pièces à dos, tranchets et denticulés. La présence de plusieurs pointes de flèches de forme tranchante ou perçante doit aussi être signalée. Les hommes du Néolithique ont également importé des outils finis comme des haches produites directement sur les minières.
Dans les structures creusées dans la craie, d'abondants vestiges osseux ont été retrouvés qui donneront des informations sur les pratiques de l'élevage et de la chasse lorsque l'étude sera effectuée. Néanmoins, de nombreux outils en os ont déjà été isolés, parmi lesquels de nombreux poinçons, mais également des outils en bois de cerf comme une gaine de hache perforée ou un pic. L'une des découvertes importantes de la fouille est une statuette féminine en terre cuite, entière, dans le four.
L'ensemble des éléments permet de situer l'occupation du site dans le Néolithique moyen II, autour de 4000 avant notre ère, même si ce n'est qu'à l'issue de l'étude des différents mobiliers qu'une chronologie plus fine des occupations pourra être définie. Dans une région vide d'occupations néolithiques, le site constitue donc un jalon important pour la compréhension des interactions entre les groupes culturels en présence à la charnière des Ve et IVe millénaires, le Chasséen septentrional au sud-ouest, le Michelsberg à l'est et le groupe de Spiere au nord.

 
Françoise Bostyn, Inrap