Vous êtes ici
Une mosaïque antique refait surface à Alès (Gard)
Une équipe de l’Inrap a fouillé un terrain de 3 750 m² à l’Ermitage dans les pentes de la colline dominant Alès. Menée sur prescription de l’Etat (Drac Occitanie), l’intervention s’est déroulée entre février et juin 2025. Les recherches révèlent une occupation dense et continue entre le IIe siècle et le VIe siècle apr. J.-C. Parmi les découvertes, une mosaïque remarquablement bien conservée a récemment été mise au jour.
Un remarquable savoir-faire antique en matière de construction
Les fouilles ont révélé au moins quatre habitations anciennes partiellement aménagées dans la roche. Bien conservées, elles témoignent d’un savoir-faire en matière de construction et de gestion de l’eau par leurs constructeurs. Leurs parois intérieures sont recouvertes d’une couche d’argile destinée à contenir les infiltrations d’eau qui suintent des bancs calcaires lors d’intempéries. Des vestiges de peinture murale, bien que très rares et difficilement lisibles, subsistent encore par endroits sur ce revêtement. Ce système est complété par des conduites souterraines en tuiles, parfois associées à des remblais de blocs servant de couche drainante.
Le sol de ces habitations repose sur une couche de brasier (un mélange d’éclats de taille et de poudre calcaire) qui supporte un sol aménagé en dalles calcaires ou en béton de chaux.

Vue d'ensemble des opérations de fouille.
© Antoine Farge, Inrap

Vue aérienne d'une habitation creusée dans la roche.
© A. Farge, Inrap

Ensemble de construction en cours d'étude.
© F. Giraud, Inrap
Une belle demeure …
Les archéologues ont également mis au jour un vaste bâtiment d’environ 750 m², ayant connu deux phases d’aménagement qui traduisent des transformations architecturales successives. Construits en pierres liées à la terre, les murs délimitent des sols initialement en terre battue. Par la suite, ils ont été régulièrement remplacés par des pavements en béton, dont certains présentent des décors composés de tesselles (petites pièces, souvent cubiques, utilisées pour composer des mosaïques).
Sur le côté est du bâtiment, un système d’évacuation des eaux de pluie, venant vraisemblablement de la toiture, a été mis au jour sous la forme d’un conduit constitué d’amphores dont les extrémités ont été découpées puis emboîtées les unes dans les autres.

Canalisation formée d'amphores tronquées et emboitées les unes dans les autres.
© S. Pancin et M. Benard, Inrap
Une pièce d’apparat au sol en mosaïque
Dans un espace de 4,50 x 3,80 mètres, un sol présente un pavement en mosaïque polychrome. Son décor se distingue par un tapis central constitué d’entrelacs géométriques en tesselles blanches et noires parfois peintes en rouge violacé. Certains de ces motifs sont rehaussés par une teinte rouge plus soutenue suggérant l’usage possible d’un pigment précieux. Des analyses détermineront s’il s’agit du rouge cinabre, un pigment minéral d’un rouge éclatant tiré du sulfure de mercure.

Découverte de la mosaïque.
© F. Chandevau, Inrap

Nettoyage en cours de la mosaïque.
© F. Giraud, Inrap

Vue d'ensemble de la pièce mosaïquée.
© F. Giraud, Inrap
Autre particularité, certaines tesselles ont été peintes en jaune. Autour de ce tapis, deux sections composées uniquement de tesselles blanches et dépourvues de motifs interrogent sur la fonction de la pièce : s’agissait-il d’alcôves ou d’aménagements particuliers destinés à la mise en place d’une banquette ou de mobiliers spécifiques ? Enfin, un côté du pavement présente un motif de croix blanches sur fond noir encadré de blanc, qui pourrait indiquer l’emplacement d’une ouverture, éventuellement une porte menant à une autre pièce. Les recherches en cours visent à préciser l’organisation du bâtiment et à confirmer s’il s’agissait bien d’une domus, une maison urbaine romaine généralement occupée par une famille aisée.

Vue générale de la mosaïque.
© F. Giraud, Inrap
Présence de sépultures tardo-antiques
Au sud de l’emprise, une aire funéraire composée de dix sépultures marque une occupation datée de l’Antiquité tardive (milieu Ve siècle à la fin du VIe siècle apr. J.-C.). Les défunts y étaient enterrés la tête orientée vers l’ouest et les premiers indices indiquent l’usage probable de cercueils ou d’aménagements en planches de bois. Certaines tombes présentent en surface une couverture de pierres. Elles sont généralement dépourvues de mobilier funéraire. Deux autres sépultures, situées plus au nord-ouest, semblent participer de ce même phénomène pour la même période, de manière isolée. Des analyses radiocarbone permettront de les dater avec plus de précision.
À l’époque moderne, entre le XVIe et le XVIIIe siècles, le terrain est transformé en terrasses (ou « faïsses »), puis à nouveau remanié au XIXe siècle.

Une des sépultures tardo-antiques.
© C.Martofel et D. Montaru
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac Occitanie)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Olivier Mignot, Inrap