A Acquigny, Eure, l'évaluation réalisée cette année (2 ha prévus) a été transformée en sauvetage urgent sur 2 000 m2 ; elle fait suite à un diagnostic mené en 1992.

Chronique de site
Dernière modification
10 mai 2016

La carrière, d'une emprise de 18 ha environ, est localisée le long de l'Iton, près de sa confluence avec l'Eure. La nappe de graves alluvionnaires exploitables affleure dans la moitié occidentale de l'emprise. Le toit de graves est entaillé par de nombreux paléochenaux de dimensions généralement réduites. Ces derniers sont colmatés par des sédiments argilo-sableux.

En 1992, une petite série lithique (186 pièces), datée alors de l'Épipaléolithique, avait été découverte dans un de ces chenaux au lieu-dit La Noé. La partie centrale de l'emprise est occupée par un paléochenal tourbeux de l'Eure. Des indices d'occupations protohistorique, gallo-romaine et du haut Moyen Âge ont été aperçus également sur la parcelle Les Diguets.

L'impératif de libération d'une partie des terrains a entraîné le décapage de 2 000 m2 sur une partie d'un paléochenal de l'Iton. Sur la berge gauche, a été identifié un atelier de débitage installé sur une barre de grave et une petite dépression argilo-sableuse sur 40 m2. La série comprend 1 400 pièces très peu déplacées par les reprises du cours d'eau et de ses différentes phases de sédimentation durant l'Holocène. Il s'agit d'un débitage réalisé au percuteur de pierre tendre. L'objectif était l'obtention de grandes et petites lames à partir de nucleus à deux plans de frappe opposés. Il faut noter l'absence d'outils.

L'étude technologique met en évidence des correspondances avec les sites du nord de la France attribuable au faciès Belloisien. Il correspond pleinement aux problématiques actuelles de recherches sur le Paléolithique supérieur final en Europe. Seul un décapage exhaustif permettrait de repérer d'autres aires de débitage paléolithiques dans un environnement au potentiel particulièrement riche (paléochenaux colmatés, proximité immédiate des sites d'Arquigny/L'Onglais et La Noé).

Par ailleurs, d'autres vestiges ont été repérés sur la très faible partie évaluée de la parcelle. Il s'agit d'un niveau de mobilier épars (faune, lithique, céramique fragmentée) datable du Néolithique final-Chalcolithique, situé au sommet d'argiles organiques, en piedmont d'un " îlot " de graves. Une occupation de La Tène D2/périodes républicaine et augustéenne est matérialisée par un réseau de fossés, un dépotoir de mobiliers (amphore, céramique, faune) et des trous de poteau témoignant d'un habitat. Cette dernière occupation antique peut être plus conséquente qu'il n'y paraît actuellement (indices de 1992, à environ 100 m au nord, implantée au débouché de l'Iton traversant le territoire des Aulerques Éburovices ; aménagement de berge antique).

Cette confluence des deux vallées mérite donc, du point de vue archéologique et tout spécialement en ce qui concerne le potentiel de vestiges du Paléolithique, des attentions particulières.