Après quarante cinq jours passés sur l'îlot de Tromelin (Océan Indien), l'une des îles Éparses placées sous la juridiction du préfet administrateur supérieur des Terres Australes et Antarctiques Françaises (TAAF), la quatrième mission archéologique "Esclaves oubliés" vient de s'achever le 4 octobre.
Dernière modification
07 avril 2016

Cette mission qui venait après les trois premières campagnes effectuées en 2006, 2008, 2010, visait à élucider les conditions de survie matérielles, psychologiques et sociales des esclaves malgaches abandonnés sur l'île en 1761, après le naufrage de L'Utile, une flûte de la Compagnie française des Indes orientales. 

Retour de la 4e campagne de fouille archéologique sur l'île de Tromelin

Parti de Bayonne le 17 novembre 1760, l'Utile, s'échoue le 31 juillet 1761 sur l'île de Sable (aujourd'hui Tromelin), un îlot désert de 1 km². Il transporte des esclaves malgaches, achetés en fraude, et destinés à être vendus à l'île de France (l'actuelle île Maurice).

L'équipage regagne Madagascar sur une embarcation de fortune, abandonnant quatre-vingts esclaves sur l'île avec trois mois de vivres et la promesse de venir les rechercher. Cette promesse ne fut pas tenue et ce n'est que 15 ans plus tard, le 29 novembre 1776, que l'enseigne de vaisseau de Tromelin, commandant la corvette La Dauphine, sauve les survivants : sept femmes et un bébé de huit mois.

Cette mission était co-dirigée par le Groupe de recherche en archéologie navale (GRAN) et l'Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP), avec la participation d'un chercheur mauricien et d'une archéologue malgache. Le laboratoire « Préhistoire à l'actuel : culture, environnement, anthropologie » (PACEA/Université de Bordeaux 1 - CNRS) et le Muséum national d'histoire naturelle ont collaboré à cette opération.

La fouille de cette année a permis de terminer l'étude de l'ensemble de l'habitat, lorsqu'il était encore accessible. Ce travail a toutefois été malaisé, à cause des destructions provoquées par l'installation de la station météo, et celles datant de la présence des naufragés. Outre la conception d'ensemble de ce véritable hameau regroupant une dizaine de bâtiments, la campagne 2013 a permis de mettre en lumière quatre stades d'occupation, impliquant des remaniements importants et démontrant la maîtrise par ce petit groupe de son habitat et de son environnement.

La découverte d'un nombre important d'outils : burins, grattoirs, gouges, hache, souligne une activité manuelle importante que révèlent par ailleurs les innombrables fragments de cuivre découpés. Un nouveau briquet et sept fragments de silex très usés illustrent pour leur part l'importance du feu dans la vie quotidienne mise en évidence par la localisation de plusieurs foyers. La mise au jour d'objets de la vie courante est venue compléter l'importante collection issue de la mission 2008.

L'étude de la faune aviaire consommée a, cette année, été réalisée en temps réel, permettant une meilleure analyse spatiale et fonctionnelle de l'habitat. Des prélèvements de sédiments permettront enfin d'étudier l'état des ressources disponibles dans l'environnement et les modifications induites par la présence des naufragés.

L'équipe de fouille disposant d'une pelle mécanique, mise à disposition par les TAAF et passée par avion, a pu explorer un vaste terrain : si près de 150 m² ont été fouillés à la main, 200m² l'on été à l'aide de la pelle.

De nombreux sondages ont été effectués à la fois pour évaluer l'espace occupé par les naufragés autour de leurs habitats et localiser les tombes. Ces dernières n'ont cependant pas été trouvées, ce qui accroît la probabilité qu'elles aient été recouvertes par les bâtiments du XXe siècle.

Placée sous l'autorité du préfet des TAAF, en convention avec le ministère de la Culture et de la Communication, la mission a reçu le parrainage de l'UNESCO et du Comité pour la mémoire et l'histoire de l'esclavage, le soutien financier de la Direction des Affaires culturelles - océan Indien / préfet de La Réunion, du conseil régional de La Réunion, de la Fondation du Patrimoine, de la Commission de l'Océan Indien (COI), et des autorités mauriciennes. Elle a bénéficié enfin du soutien logistique du ministère de la Défense, commandement supérieur des Forces armées de la zone sud de l'océan Indien (FAZSOI) et des TAAF.

Comme durant les précédentes campagnes, le GRAN a réalisé sur son site Internet un journal quotidien, relayé par le site des TAAF, permettant de suivre au jour le jour le travail de l'équipe et les progrès des recherches. Les élèves de plusieurs établissements scolaires ont par ailleurs dialogué avec les chercheurs via le réseau Internet et le forum du site du GRAN. Des images vidéo ont été également tournées constituant une véritable banque d'images.

L'opération de recherche archéologique menée à Tromelin et l'enquête historique qui l'entoure sont retracées par Max Guérout (GRAN) et Thomas Romon (INRAP) dans un ouvrage scientifique de référence, Tromelin. L'île aux esclaves oubliés, paru en 2010 aux éditions du CNRS.

Un documentaire de 52 minutes, Les esclaves oubliés de Tromelin, produit par MC4, a été réalisé par Emmanuel Roblin et Thierry Ragobert. Il est inséré dans le livre Esclaves et négriers, publié par les éditions Fleurus Jeunesse.

Une bande dessinée (2 tomes) réalisée par Sylvain Savoia est à paraître en 2014 dans la collection Aire Libre aux éditions Dupuis.

Une exposition itinérante est en cours d'élaboration et devrait pouvoir être inaugurée en 2015 au Musée du Château des Ducs de Bretagne à Nantes.

Contact(s) :

Nelly Gravier
Service de la communication des TAAF
Tel : 02 62 96 78 57 - Gsm : 06 92 76 14 86
nelly.gravier [at] taaf.fr

Sébastien Berthaut-Clarac
chargé de la communication du GRAN
Gsm : 06 29 07 81 67
sebastien.bc [at] archeonavale.org

Mahaut Tyrrell
chargée de la communication de l'Inrap
Tel : 01 40 08 80 24
mahaut.tyrrell [at] inrap.fr

Édouard Jacquot
Direction des affaires culturelles de l'Océan Indien
Tel : 262 2 62 41 99 45 - Gsm : (06) 92 24 86 93
edouard.jacquot [at] culture.gouv.fr